Notre débat n'est pas sans rappeler celui sur la proposition de loi dite « Cartron », dont l'adoption – avec le soutien des écologistes – a permis de mettre fin à une injustice instituée par l'ancien gouvernement, stigmatisant des populations déjà en difficulté. Je veux parler de la « loi Ciotti », qui permettait de suspendre les allocations familiales aux parents des enfants en situation de décrochage scolaire : pour lutter contre l'absentéisme scolaire, elle proposait donc une approche punitive pénalisant un peu plus ces familles, sans pour autant s'attaquer aux racines du problème.
Injuste socialement, la « loi Ciotti » s'est aussi révélée inefficace.
Malgré l'épreuve des faits et les nombreuses analyses démontrant l'injustice et l'inefficacité de cette approche punitive, c'est bien le retour de cette logique qui nous est aujourd'hui proposée. Les écologistes s'opposeront donc à cette proposition de loi.
La logique doit être inversée : il ne s'agit pas de sanctionner, mais d'accompagner les élèves et les familles. Ce texte est donc une mauvaise solution à un vrai problème.
Il ne s'agit pas de nier le problème de la violence scolaire, mais d'y apporter les réponses adéquates. Au cours de l'année 2011-2012, les établissements du second degré ont connu en moyenne 13,6 incidents pour 1 000 élèves. Il y a là un enjeu pour les élèves, mais aussi pour les adultes.
Le Gouvernement a démontré sa volonté d'agir en créant 500 postes d'assistants de prévention et de sécurité, ainsi qu'une délégation ministérielle chargée de la prévention et de la lutte contre les violences en milieu scolaire. Nous attendons beaucoup des travaux de cette délégation, qui devra notamment s'intéresser à la formation dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation. Nous souhaitons que, dans ce cadre, des formations à la résolution des conflits soient organisées à l'intention des enseignants, des conseillers principaux d'éducation et des élèves, voire des familles. Les initiatives de médiation doivent par ailleurs être renforcées.
Je tiens à insister sur un autre aspect : le lien entre violence scolaire et pratiques pédagogiques. Le système de notation doit être revu : souvent vécue comme stigmatisante, la notation peut susciter incompréhension et sentiment d'injustice, et conduire au décrochage scolaire, alors qu'il faut au contraire accompagner les élèves en difficulté pour leur redonner le goût d'apprendre.
De même, il convient de repenser l'idée de la punition. Sans nier la nécessité d'une sanction dans certains cas, force est de constater que, plus celle-ci est sévère et perçue comme injuste, plus les comportements seront agressifs. Le retour à l'autorité comme remède à la violence scolaire va donc à l'encontre de la réalité et de l'expérience.
Nous attendons beaucoup de la refondation de l'école sur ces sujets : une autre approche contribuera à apaiser certains climats tendus et permettra à chacun de trouver sa place au sein du système scolaire.
S'il est important de renforcer la présence humaine et sa qualité, il est aussi démontré que la stabilité des équipes pédagogiques contribue à un climat apaisé, notamment dans les quartiers sensibles où l'investissement des équipes pédagogiques dans la durée est nécessaire.
L'amélioration de la vie d'équipe, l'instauration d'une gouvernance démocratique ou le développement de projets collectifs et participatifs sont aussi des facteurs qui contribuent à résoudre le problème de la violence scolaire.
Une plus grande implication de tous les acteurs de l'éducation, dont les parents d'élèves, est nécessaire. Les élèves eux-mêmes doivent devenir acteurs de leur parcours scolaire.
On observe par ailleurs une corrélation entre la violence et le contexte scolaire dans lequel évolue l'élève. La composition des classes, par exemple, influe grandement sur le climat social de l'établissement : il est préférable d'éviter les classes de même niveau, stigmatisantes pour les plus faibles.
S'il convient de faire évoluer les habitudes et de bousculer la pédagogie, la question des inégalités territoriales est également posée. En effet, ce sont souvent sur les mêmes territoires que les difficultés – absentéisme, échec scolaire, décrochage, violence – se concentrent.
La philosophie générale de l'éducation prioritaire doit certes être améliorée, mais les inégalités socio-territoriales restent une réalité. La politique de la ville a ici un rôle important à jouer.
Une approche globale est nécessaire, car la violence ne concerne pas que l'école : elle est présente dans l'ensemble de notre société. C'est pourquoi il est nécessaire de retisser du lien social tant à l'intérieur qu'à proximité des établissements.
Enfin, nous plaidons pour une meilleure coordination entre l'ensemble des structures qui interviennent auprès des familles et sur les territoires en difficulté.
La violence en milieu scolaire a des causes multiples. Elle appelle donc une réponse globale, à la fois éducative et sociale, qui dépasse de loin la simple suppression des allocations familiales.