Intervention de Hervé Lassalle

Réunion du 13 février 2013 à 10h00
Commission des affaires économiques

Hervé Lassalle, CFDT :

Alors qu'en 2013, le groupe envisage de supprimer 1 430 emplois en France, quel engagement peut-on obtenir du Gouvernement pour limiter la casse et pour investir dans l'avenir de la filière ? Les mesures financières comme le crédit d'impôt pour la recherche et le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) doivent impérativement être assorties de contreparties pour l'emploi en France, de la R&D aux métiers impliqués dans le déploiement des projets en clientèle.

L'État dispose aussi de leviers économiques et politiques pour agir sur les opérateurs, soit parce qu'il en est actionnaire, soit parce qu'il passe des marchés avec les groupes qui les détiennent. Les attributions futures de fréquences, qui font partie du patrimoine national, doivent faire l'objet de contreparties en matière d'emploi, y compris chez les équipementiers.

Le maintien de l'emploi doit de même être au coeur de la mission des autorités de régulation, dont l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) – nous renvoyons sur ce point au récent rapport de Mmes Erhel et de La Raudière sur l'impact de la régulation dans le secteur des télécommunications.

L'État doit aussi montrer l'exemple et permettre à Alcatel-Lucent de répondre aux appels d'offres lancés par les administrations et par les collectivités – réseau télécom des ministères, autocommutateurs PABX (Private Automatic Branch eXchange). Notre branche « Entreprise » a un réel potentiel face à ses concurrents Avaya et Cisco.

Pour préparer l'avenir et préserver notre indépendance économique, l'État doit fixer des objectifs clairs quant aux besoins du pays en TIC, pour une plus grande compétitivité et plus d'efficacité dans les entreprises et dans les services publics, pour la sécurité du territoire, pour la transition énergétique et écologique. Il s'agit de soutenir par l'investissement des projets intéressant la France ou l'Europe : 4G, fibre optique, haut débit, gestion intelligente de la ressource en énergie ou en eau, réduction de la consommation d'énergie dans les équipements de réseau, santé, respect de normes paysagères...

Il faut bien sûr que le groupe puisse répondre aux appels d'offres concernant ces plans d'investissements et d'innovation. Si le plan numérique qui doit être annoncé par Mme Fleur Pellerin fin février ne bénéficie pas en partie à Alcatel-Lucent, il profitera de facto à nos concurrents, ce qui serait déplorable pour l'emploi du groupe en France sans d'ailleurs créer d'emplois pérennes chez ces concurrents. À l'heure où le groupe n'a pas les moyens financiers d'investir suffisamment dans ces domaines, l'État peut garantir ou favoriser ces investissements, en contrepartie d'un engagement pour l'emploi en France. Il doit aussi intervenir dans l'élaboration des plans numériques au niveau européen pour susciter la création d'emplois mais, d'abord, pour sauvegarder ceux de la filière. Or le budget européen annoncé récemment ne nous rassure pas à cet égard…

Avec son volet de suppressions d'emplois, le plan de la direction, loin d'améliorer la situation économique d'Alcatel-Lucent, accélérera le cercle infernal des plans sociaux et précipitera le démantèlement du groupe. Tout doit être mis en oeuvre pour éviter un plan coercitif incluant des critères d'ordre de licenciement, qui détruirait des compétences nécessaires à l'avenir et provoquerait d'importants dégâts dans les bassins d'emploi.

S'agissant de ceux-ci, la direction projette de fermer le site historique de Vélizy. Le mouvement géographique prévu en région parisienne créera pour la majorité des 2 300 salariés de graves difficultés, puisqu'il allongera leur temps de transport et augmentera le trafic automobile. Quel appui peut-on attendre à cet égard du Gouvernement ?

Les réductions d'effectifs auraient des conséquences catastrophiques sur les bassins d'emploi de Lannion, centré sur une activité industrielle unique, d'Orvault, de Toulouse, de Rennes ou de Sophia Antipolis. Nous demandons que le Gouvernement impose à notre direction de prendre en compte les spécificités locales et incite au redéploiement du tissu industriel sur ces bassins.

Je rappelle que le groupe est présent dans neuf régions et une vingtaine de sites, où travaillent de 25 à 2 300 salariés. Cela représente au total 9 000 emplois sur les 76 000 du groupe, alors que l'effectif en France était, début 2007, de 12 600 personnes.

Nous vous invitons à visiter nos sites et à venir observer nos travaux, que ce soit en production – à Eu, Calais ou Trignac –, en démonstration et R&D sur maquette ou en démonstration client, à Nozay. Nous espérons organiser des états généraux des télécoms qui permettraient des débats avec tous les acteurs et des prises de décisions sur cette filière stratégique pour l'avenir de l'Europe. Nous vous invitons à y réfléchir.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion