Je me réjouis que les organisations syndicales se présentent unies dans le cadre d'une intersyndicale, preuve que les salariés savent se regrouper pour prendre à bras-le-corps les difficultés et pour mobiliser les politiques.
En faisant appel à l'intelligence collective au lieu de vous enfermer dans une attitude protestataire, vous avez en effet pu présenter des propositions précises. Vous prenez ainsi position sur les choix stratégiques effectués par l'entreprise, en soulignant le risque que présentent le nantissement des 29 000 brevets et l'externalisation de la vente. Vous montrez la nécessité de sécuriser le financement, grâce à l'échelonnement de la dette et à la montée de l'État dans le capital. Enfin, pour conserver ses compétences, vous suggérez que le groupe s'appuie sur le contrat de génération pour embaucher, innove dans les produits et investisse dans les pôles de compétitivité. Bref, vous arrivez avec une panoplie de propositions.
Ce travail appelle des réponses concrètes : vous n'êtes pas venus pour écouter des discours ! En ce qui concerne le Gouvernement, vous ne sauriez vous contenter de l'expression d'une volonté politique ou de l'assurance selon laquelle il suit attentivement l'évolution de la situation : il faut des actes forts, que nous appuierons. Il est essentiel ainsi qu'il intervienne auprès des décideurs pour bloquer une évolution catastrophique.
Mais certaines de vos propositions concernent directement les législateurs que nous sommes. Vous recommandez que l'on prenne de plus en plus en compte la part non matérielle des exportations et que la COFACE, notamment, s'intéresse davantage aux questions de propriété intellectuelle. Vous suggérez de faire évoluer les critères retenus pour l'attribution des marchés publics et, surtout, vous posez le problème essentiel du financement de l'industrie. Personnellement, j'estime qu'il ne faut pas s'arrêter à la création de la BPI, mais constituer un pôle public d'investissement. Il reste que vous avez raison de souligner que le problème ici est avant tout celui du développement industriel, au-delà des licenciements boursiers.
Néanmoins, avez-vous évalué le poids des frais financiers pour le groupe, après l'appel qu'il vient de faire au capital privé ? D'autre part, quelle est votre position sur l'éventualité d'une nationalisation, qui pourrait être partielle ? La valeur boursière d'Alcatel-Lucent étant de 2 milliards, il suffirait à l'État d'acheter entre 500 millions et 1 milliard d'actions pour prendre le contrôle de l'entreprise.