Monsieur Bussereau, laissez-moi vous dire combien j'ai apprécié votre ton : vous connaissez bien notre pays et les grands défis de la décentralisation.
Les grandes réformes : celle de 1982, celle de l'intercommunalité, celle de Jean-Pierre Raffarin, avaient un sens : le but était d'approfondir la décentralisation. Sans ouvrir de polémique inutile, vous savez que ce que nous avons reproché à la réforme territoriale portée par le président Sarkozy tient au fait qu'elle apparaissait plutôt comme une régression, comme une recentralisation.
Ces critiques étaient d'ailleurs partagées sur tous les bancs.
Il est bon de s'interroger et de faire le point sur la décentralisation. Sans doute a-t-elle perdu une part de sa force aux yeux de nos compatriotes, pour des raisons liées à l'empilement des échelons, aux problèmes posés par les finances des collectivités territoriales et à une crise de la représentation politique. Ce sera évidemment un rendez-vous que le Gouvernement vous proposera.
Certes, je peux considérer que votre analyse selon laquelle il aurait fallu examiner d'abord le texte relatif à la décentralisation et aborder ensuite la question des scrutins est pertinente. Cependant, je le dis en toute transparence : nous sommes confrontés à un dilemme. Outre les élections municipales de 2014, des rendez-vous étaient prévus par la loi relative au conseiller territorial ; si nous laissons passer trop de temps, nous dépasserons la date prévue, y compris pour changer les modes de scrutin qui concernent, à travers l'intercommunalité, les élections municipales. Vous nous reprocheriez alors, à juste titre, de ne pas respecter l'esprit ni la lettre de la décision du Conseil constitutionnel sur ce sujet, d'où le texte que je vous présente.
Cependant, nous aurons l'occasion de discuter d'un projet de loi sur cette nouvelle phase de la décentralisation, ainsi que du report des élections cantonales et régionales en 2015 – j'y reviendrai. Nous devrons débattre de l'organisation de l'État – cette question est de ma responsabilité – et des collectivités territoriales – celle-là relève de celle de ma collègue Marylise Lebranchu. Ce débat se tiendra évidemment devant le Parlement. La Constitution prévoit que le texte sera d'abord débattu au Sénat, mais je ne doute pas qu'il trouvera à l'Assemblée nationale un prolongement particulièrement utile.
Je vous ai écouté avec beaucoup d'attention sur le sujet de l'intercommunalité. Le Gouvernement a repris la réforme de la carte et la rationalisation initiées par le gouvernement précédent, avec des modifications qui visaient plutôt à répondre à certaines attentes, demandes ou suggestions des élus locaux. L'achèvement de cette carte a d'ailleurs fait l'objet d'une communication très précise de Mme Escoffier en conseil des ministres la semaine dernière.
Chacun le reconnaît, et vous l'avez dit : l'intercommunalité assume de plus en plus de responsabilités. L'élection directe des représentants intercommunaux est une exigence démocratique. Par le mécanisme du fléchage, nous avons veillé à ne pas politiser outre mesure l'intercommunalité à ce stade, et surtout à ne pas mettre à mal la commune, même si, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous savons tous qu'il faudra sans doute aller plus loin en 2020, notamment pour les grandes intercommunalités. Je vous fais seulement part de mes réflexions, je n'annonce rien : cela n'aurait aucun sens. Reste qu'au vu des budgets et des responsabilités qu'assument les intercommunalités, le suffrage universel devra sans doute être progressivement instauré. Cependant, comme je l'ai dit dans mon propos initial, chacun d'entre nous est très attentif à préserver la commune, puisque les références à la commune et au maire font partie de celles que nos concitoyens veulent protéger, en tout cas à ce stade.
Le fléchage était déjà prévu par la loi de réforme des collectivités territoriales promulguée en décembre 2010 à l'initiative de la précédente majorité. Le Gouvernement ne fait donc que mettre ce principe en application, selon des modalités opportunément complétées par la commission des lois et garantissant à la fois le pluralisme, la parité et la représentation de chacune des communes membres de la communauté de communes ou d'un autre type d'établissement de coopération intercommunale.
Contrairement à ce qui a été affirmé tout à l'heure par l'un des orateurs de l'opposition, je suis convaincu – mais je n'oserai peut-être pas m'aventurer sur ce terrain – que la parité ne posera pas de difficulté dans les petites communes, et donc dans l'intercommunalité.