Permettez-moi de rappeler la formulation de l'article 353 du code de procédure pénale : « Sous réserve de l'exigence de motivation de la décision, la loi ne demande pas compte à chacun des juges et jurés composant la cour d'assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : “Avez-vous une intime conviction ?” »
Ce principe me paraît archaïque et injuste. La cour peut condamner à de très lourdes peines sans preuve véritable, suffisante ou totalement convaincante, en se fondant sur la seule subjectivité des juges et des jurés, sur leur sentiment personnel, sur leurs impressions, comme s'il pouvait exister une justice impressionniste. Ce système paraît presque aussi hasardeux que l'ordalie ou le jugement de Dieu au Moyen Âge.
En outre, le principe de l'intime conviction paraît contraire à un principe du droit assez universel, qui s'énonce en latin : « In dubio pro reo », « le doute doit bénéficier à l'accusé ». Je souhaiterais donc vivement que soit modifié cet article du code de procédure pénale.
D'autre part, je souhaiterais qu'il soit rendu hommage à Paul Didier, seul magistrat qui, s'élevant contre les mesures xénophobes et racistes du gouvernement dit de « l'État français » et contre la création des sections spéciales, refusa de prêter serment de fidélité à la personne du maréchal Pétain. Révoqué, interné au camp de Châteaubriant, il put rejoindre la Résistance et, après la Libération, termina sa carrière comme président de chambre à la cour d'appel de Paris. Il fut un moment de la conscience humaine. L'École nationale de la magistrature a baptisé de son nom la promotion 1997 et il me paraîtrait souhaitable qu'une plaque rappelle son souvenir au ministère de la Justice.