Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 5 juillet 2012 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice :

Que Mme Marie-Françoise Bechtel veuille bien me pardonner si j'ai tout à l'heure omis de répondre à sa question. Nous allons travailler à l'indépendance des parquets, non seulement avec le CSM et les magistrats, mais également avec les parlementaires. Vous avez bien récapitulé les principaux thèmes d'un débat difficile : parité, présence de non-magistrats, risque corporatiste. L'indépendance des parquets dépend de la réponse qui sera apportée à la question concernant les compétences du CSM, le mode de désignation des magistrats qui y siègent ou des personnalités qualifiées. Les consultations ont commencé : une séance de travail avec le CSM doit se dérouler le 18 juillet. On a pu accuser la majorité sortante d'instrumentaliser ce dossier : mais tout cela n'est que l'écume, il faut aujourd'hui s'atteler aux sujets de fond. Il ne s'agit pas de défaire ce qu'a fait la législature précédente, mais de réfléchir au meilleur moyen de réformer un instrument extrêmement important. La concertation doit avoir lieu, rien n'est encore tranché.

Pour répondre à M. Poisson, je vais adopter un ton solennel. En tant que garde des Sceaux, j'ai une responsabilité particulière à l'égard de la Constitution qui, en son article 2, dispose que « l'emblème national est le drapeau tricolore ». Avant que je sois nommée garde des Sceaux, personne, en aucune circonstance, ne m'a jamais entendue dire – et moi, je ne me suis jamais surprise à penser – qu'il était banal de brûler les symboles d'appartenance. Aussi, vous ne faites ici que propager des calomnies. Tout d'abord, il n'y a jamais eu de drapeaux brûlés place de la Bastille le soir du second tour de l'élection présidentielle. Il n'y a pas eu de fait. Mais, comme on me crédite du pouvoir de réaliser des exploits, on va jusqu'à dire que j'ai réussi à commenter, sur RFI, un événement qui n'a jamais existé et l'on m'a accusé d'avoir déclaré que brûler des drapeaux participait de la liesse populaire, que ce n'était pas grave. On a même précisé que j'avais fait ces déclarations en tant que garde des Sceaux – la non-rétroactivité semble ne pas être un principe démocratique pour des tas de gens – alors que, le 6 mai, je n'avais évidemment pas encore été nommée ! Un communiqué de presse signé par l'UMP des Bouches-du-Rhône, et comportant le nom d'un responsable de ce parti et un numéro de portable, a même repris l'information, que l'on a retrouvée pendant une semaine sur Twitter et sur différents sites. Ce communiqué est de la pire calomnie. RFI a pourtant confirmé que je n'avais jamais tenu de tels propos et a passé tout un week-end à répondre aux journalistes qui l'interrogeaient à ce sujet. J'aurais pu poursuivre en diffamation la section UMP des Bouches-du-Rhône, mais, étant garde des Sceaux, j'ai préféré m'abstenir. Je suis ravie à l'idée que le compte rendu de cette audition contribuera à rétablir la vérité, même si je m'étonne que, pour certains, la première calomnie lancée sur internet puisse constituer un sujet de débat en commission des Lois.

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