Intervention de Suzana Grubjesic

Réunion du 13 février 2013 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Suzana Grubjesic, vice première ministre de Serbie, chargée des affaires européennes :

Les données des ministères serbes relatives aux relations économiques bilatérales entre la France et la Serbie diffèrent de celles dont vous disposez. En matière d'investissements, la France est aujourd'hui au quatrième, et non au onzième rang. En 2011, les exportations de la Serbie vers la France s'élevaient à 221 millions, et les importations depuis la France à 387 millions d'euros ; sur les six premiers mois de l'année 2012, les exportations ont atteint 111 millions, et les importations 204 millions d'euros. Nous avons l'intention d'intensifier la coopération interrégionale : un accord a par exemple récemment été signé entre la province autonome de Voïvodine et la Bretagne. La Serbie souhaite développer ses relations économiques bilatérales avec la France de toutes les manières possibles.

Je ne peux malheureusement pas dire avec précision combien d'enfants serbes apprennent aujourd'hui le français, mais c'est l'une des trois langues les plus enseignées à l'école. Les élèves commencent à apprendre les langues étrangères à sept ans, lorsqu'ils entrent à l'école primaire, choisissant toujours deux langues – une obligatoire, l'autre optionnelle – entre le français, l'anglais, l'allemand, et parfois également le russe. À l'université, ils choisissent une langue étrangère dominante, mais en gardent parfois une deuxième. Si vous avez besoin de données plus précises, je les demanderai au ministère de l'éducation et reviendrai vers vous.

En ce qui concerne la circulation des armes, triste conséquence des conflits balkaniques, les forces policières serbes coopèrent non seulement avec la police française, mais également avec d'autres pays. Nous participons activement à toutes les institutions internationales ayant pour objectif la lutte contre le crime organisé et la corruption. Ces derniers mois, la Serbie combat également tous ces phénomènes à l'intérieur de ses frontières, avec des résultats considérables. Nous travaillons d'ailleurs aussi avec les policiers américains, notamment en matière de trafic de stupéfiants. Il faut réunir tous les efforts pour affronter ces fléaux ensemble.

La Serbie entretient de bonnes relations avec la Bosnie-Herzégovine. Après la formation du nouveau gouvernement, Sarajevo fut l'une des premières destinations officielles du président serbe ; la semaine dernière, une délégation de la Fédération de Bosnie-Herzégovine de très haut niveau s'est rendue en Serbie. La position de notre pays est claire à l'égard de ce voisin dont nous respectons la souveraineté et l'intégrité territoriale ; signataire des accords de Dayton de 1995, la Serbie est liée à la Bosnie-Herzégovine par un contrat moral. Nos relations avec le Monténégro sont très amicales. La séparation entre la Serbie et le Monténégro s'est déroulée de manière très civilisée après le référendum organisé dans ce pays ; ce sont donc les citoyens monténégrins qui ont fait de la Serbie un État indépendant.

J'en viens à la question des relations stratégiques de la Serbie avec la Russie, les États-Unis et l'OTAN. À la différence des autres pays des Balkans, la Serbie a signé avec la Russie un accord sur la libre circulation des marchandises. Alors que les pays de l'UE pourraient utiliser la Serbie comme plateforme d'exportation vers la Russie, cet accord reste malheureusement sous-exploité. Nous avons d'excellentes relations – notamment politiques et économiques – avec la Russie. Elles sont également bonnes avec les États-Unis ; nous coopérons ainsi en matière d'industrie militaire et de lutte contre le crime organisé et la corruption. S'agissant de l'OTAN, la Serbie a adhéré au Partenariat pour la paix et participe activement à tous ses projets. Mais le gouvernement actuel, comme ses prédécesseurs, doit respecter la résolution du parlement serbe de 2007 qui proclame la neutralité militaire de notre pays. Aujourd'hui, l'adhésion à l'OTAN ne fait pas l'objet d'un débat en Serbie ; les bombardements de 1999 étant encore très présents dans les mémoires, aucune discussion rationnelle sur les avantages que la Serbie pourrait en retirer n'est pour le moment possible. Pourtant, la question commencera sans doute à être soulevée dans les années à venir, lorsque la Serbie sera entourée par des pays membres de cette alliance, à laquelle elle sera seule à ne pas appartenir.

Quelques mots pour expliquer en quoi consiste la réforme judiciaire. La cour constitutionnelle de Serbie a examiné les plaintes des juges qui n'avaient pas été reconduits au terme des décisions précédentes de justice ; plus de 500 d'entre eux ont été remis à leur poste. Cette mesure capitale fait partie des premières actions du nouveau ministre de la justice. Nous analysons également le réseau des tribunaux sur notre territoire, afin d'en équilibrer le nombre. La précédente réforme s'était, en effet, traduite par la disparition des tribunaux dans beaucoup de villes. La nouvelle stratégie et le nouveau plan d'action quinquennal devraient être adoptés avant la fin du mois de mars 2013. Le ministère de justice mène cette réforme avec le concours des experts envoyés par les pays de l'Union européenne – dont la France – et travaille en étroite collaboration avec la commission de Venise et la Commission européenne.

L'un d'entre vous, messieurs et mesdames les députés, a affirmé que la Serbie devrait entrer dans l'Union européenne ; j'espère que ce jour viendra, mais pour le moment, il n'est question que de commencer les négociations. Leur durée permettra à la Serbie de changer et d'adapter sa législation ; notre objectif, en effet, n'est pas uniquement de devenir membre de l'Union européenne, mais d'utiliser les négociations pour nous aligner sur les normes européennes. Certes, la politique d'élargissement n'est pas à la mode, mais elle était déjà impopulaire avant le début de la crise économique. La Serbie ne demande aujourd'hui qu'une date de début des négociations ; quant au débat sur l'adhésion, il pourra se tenir dans les années à venir. Géographiquement, culturellement et économiquement, la Serbie appartient à l'Europe, et elle devrait également en faire partie au niveau institutionnel. Le soutien du gouvernement serbe au processus d'adhésion de la Serbie à l'UE reste et restera constant en dépit du changement des équipes au pouvoir, notre souhait étant de rendre l'intégration irréversible.

Vous avez enfin demandé ce que la Serbie pouvait apporter à l'Union européenne. Une fois membre, notre pays ne sera pas plus un poids pour l'Europe qu'il ne l'est aujourd'hui. Or, la Serbie fait face à la crise sans aide extérieure, hormis les 200 millions d'euros par an qu'elle reçoit au titre d'instrument d'aide de pré-adhésion (IAP). En janvier 2013, pour la première fois depuis des mois, la production industrielle serbe a augmenté de 2 %, et nous espérons que cette tendance se poursuivra dans les années à venir, nous permettant de sortir de la crise. Je le répète, le principal problème de la Serbie est aujourd'hui le chômage ; sa progression est stoppée, et nous essayons de le résorber en créant un environnement favorable pour les investisseurs étrangers et nationaux. Autre réforme économique d'importance : cette année, nous avons réussi à augmenter nos exportations de 20 %. Grâce à la production de Fiat et de ses sous-traitants – installés dans une ville de la région centrale de Šumadija –, les exportations serbes devraient augmenter davantage encore avant la fin de l'année. Le gouvernement serbe prépare également un plan de soutien au secteur des technologies de l'information. Ce domaine est très important pour notre pays, et nous y travaillerons cette année et dans les années à venir.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion