Intervention de Christian Noyer

Réunion du 24 juillet 2012 à 16h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Christian Noyer :

À titre temporaire seulement, pour que le fonds puisse emprunter dans de bonnes conditions, ou bien il empruntera aux banques ; mais c'est un détail. L'essentiel est la source d'alimentation : si le fonds agit comme les États sont censés le faire en cas de risque systémique, il est logique qu'il reçoive le produit de la taxe systémique.

Par ailleurs, le fait que Londres soit hors du dispositif ne me semble pas poser de problème. Nous avons bien le marché intérieur – les mêmes règles s'appliquent en son sein et une autorité est chargée d'y veiller – et un système véritablement intégré, lequel régira les 17 et fonctionnera comme l'Eurosystème, avec la BCE au centre et les banques nationales, à l'image du Board of Governors de Washington et des douze banques de Réserve fédérale des différents districts des États-Unis. Que Londres soit une place financière importante ne nous empêche pas d'avoir une politique monétaire unique et de la mener correctement.

La hausse des taux espagnols constitue un problème de fond. L'Espagne est confrontée à plusieurs difficultés. Elle a commis de sérieuses erreurs de communication, en tardant à reconnaître les problèmes et à trouver des parades, ce qu'elle paie très cher aujourd'hui puisque sa crédibilité est compromise. N'oublions pas qu'au tournant de l'année, les taux d'emprunts espagnols étaient inférieurs de 100 points de base à ceux de l'Italie ; le gouvernement Monti a inversé la situation. Quant au nouveau gouvernement espagnol, il a mis trois mois à entreprendre de traiter les problèmes auxquels il était confronté, plusieurs mois à reconnaître les difficultés du secteur bancaire, et il n'a pas su faire valoir que 30 % seulement des banques espagnoles étaient en difficulté et que les deux principaux établissements se portent bien. Il a mis du temps également à revoir son objectif de déficit budgétaire et à se coordonner avec ses alliés de la zone euro dans un premier temps. Tout cela lui coûte très cher.

Cela étant, les marchés sont complètement aveugles : ils oublient que le commerce extérieur espagnol est florissant, que le taux de croissance des exportations est plus rapide en Espagne qu'en Allemagne, que le déficit commercial et le déficit des paiements courants y diminuent rapidement ; en somme, que l'économie espagnole, en ce qui concerne l'industrie et les services, se porte bien. Il lui reste naturellement à retrouver un moteur de croissance pour remplacer la bulle immobilière qui a alimenté une croissance artificielle pendant des années. La tâche est difficile mais pas impossible. D'une manière générale, les orientations de la politique économique sont les bonnes.

Madame Karamanli, je ne saurais vous répondre sur les fraudes dirigeantes. Mais la crise des caisses d'épargne américaines fournit une analogie très intéressante qui me permet de répondre également à M. Myard. Aux États-Unis, jusque dans les années soixante-dix, les banques petites et moyennes n'étaient contrôlées que par un superviseur d'État ; les grandes banques l'étaient par la Fed, par l'Office of the Comptroller of the Currency ou par la Securities and Exchange Commission – très mauvaise idée, abandonnée depuis. La crise des caisses d'épargne a montré que le système ne fonctionnait pas puisque sans intervention fédérale, les caisses d'épargne de certains États auraient fait faillite.

On a donc chargé le Federal Deposit Insurance Corporation, jusqu'alors uniquement destiné à garantir les dépôts sur le territoire américain, de mettre fin à cette crise mais aussi, plus généralement, d'assurer la supervision de tous les superviseurs d'État, puis, plus tard, de résoudre les problèmes des banques en les recapitalisant ou en les fermant de manière ordonnée. Voilà ce qu'il faudrait faire dans la zone euro.

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