Intervention de François Sauvadet

Séance en hémicycle du 20 février 2013 à 21h30
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Article 3

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Sauvadet :

Après l'article 2, cet article 3 est l'un des plus importants. Il concerne le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux et que vous envisagez, monsieur le ministre, de réduire de moitié.

Nous avons déposé un amendement de suppression de l'article 3, car celui-ci conduit à la mort programmée des territoires ruraux. Derrière la division par deux des cantons, se cache un autre mal, plus profond : la prééminence du fait démographique. Dans la gouvernance de nos conseils généraux – ou, selon la nouvelle formule, de nos conseils départementaux –, avec le binôme, le fait démographique va l'emporter sur toute autre considération.

Monsieur le ministre, vous avez accepté que nous réaffirmions que le conseil départemental représentait non seulement des populations, mais aussi des territoires. Or l'article 3 tel qu'il est rédigé va conduire à d'immenses circonscriptions territoriales : en divisant par deux le nombre de cantons, vous allez calibrer et redécouper l'ensemble des cantons sur la base de la population, avec un taux moyen, donc un nombre d'habitants calculé sur le nombre de cantons ramené à la population.

Dans un département comme le mien – mais cela vaut pour toute la France –, vous allez créer des situations que vous devrez expliquer. Quand vous avez critiqué le conseiller territorial avec tant de force, tant de véhémence, vous l'avez fait au motif essentiel que cela allait rompre le lien avec le territoire. Or, avec le conseiller territorial, il y avait un lien ténu avec un élu qui, certes, siégeait dans deux assemblées, mais restait connecté à son territoire, et un territoire moitié moins grand que celui que vous nous proposez aujourd'hui. Vous critiquiez hier un système sur lequel vous vous appuyez aujourd'hui pour justifier un dispositif bien plus grave que celui que vous dénonciez hier.

Monsieur le ministre, chez moi, dans un département comme la Côte-d'Or, nous allons passer à vingt-deux cantons. Sur ces vingt-deux cantons, cinq ou six cantons vont représenter 500 des 700 communes. Comment pensez-vous que les habitants vont percevoir cette proximité, cet ancrage territorial ? En réalité, ce tripatouillage électoral va conduire à la mort des territoires ruraux par la représentation.

La situation est paradoxale. Avec votre dispositif, vous allez donner les clés des départements aux agglomérations, à un moment où jamais l'aspiration à l'aménagement du territoire n'a été aussi grande chez nos compatriotes et jamais le sentiment d'abandon des territoires n'a été aussi fort, malgré ce que vous avez qualifié vous-même de surreprésentation des territoires ruraux. Je vous laisse imaginer la réaction de tous ces habitants qui se sentent parfois perdus, isolés, lorsqu'ils vont découvrir qu'ils ne sont plus représentés par le même nombre de conseillers généraux et que, de surcroît, ils n'auront plus la même réponse qu'avant.

Je m'interroge aussi sur l'urgence de la réforme, l'urgence de créer une nouvelle carte électorale. Cette urgence, on l'aura compris, est dictée par le calendrier : ce sont les municipales et surtout les sénatoriales. Vous engagez ce redécoupage pour vous assurer, demain, du vote de ceux dont vous préjugez qu'ils vous seront les plus proches.

Cela étant, monsieur le ministre – je le dis aussi à nos collègues du groupe SRC –, vous avez rendez-vous avec l'avenir. Lorsque les habitants de ces cantons découvriront ce que vous avez mis en place, ils vous demanderont des comptes et nous serons là pour leur rappeler que nous vous avions alertés sur la gravité de ce que vous étiez en train de mettre en oeuvre, s'agissant de l'avenir de notre territoire.

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