Intervention de Barbara Pompili

Réunion du 20 février 2013 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

La refondation de l'école est une priorité urgente, compte tenu de la situation dans laquelle se trouve notre système scolaire. Ainsi la dernière enquête PISA montre qu'aujourd'hui, en France, l'origine sociale reste le facteur déterminant de la réussite scolaire. Nous sommes loin, trop loin du modèle de l'école de la République, garante de l'égalité des droits sans condition d'origine ou de moyens !

Pour renouer avec ses missions, l'école a donc besoin d'une refondation digne de ce nom. Ce constat est partagé par la majorité des acteurs du monde de l'éducation, comme il ressort des nombreuses auditions auxquelles j'ai participé – dont certaines organisées par vous, monsieur le rapporteur, et je tiens à ce propos à saluer le sérieux et la rigueur avec lesquels vous avez mené vos travaux. Représentants des syndicats et des associations, professionnels : tous m'ont fait part de la nécessité de réformer en profondeur l'école, car la situation n'a cessé de se dégrader depuis dix ans, avec une mastérisation qui a détruit toute formation digne de ce nom – pour ne pas parler du décret de 2008 sur les rythmes scolaires.

Mme Isabelle Attard et moi-même l'avons dit ici à plusieurs reprises : les écologistes soutiennent cette volonté de refondation, en particulier la priorité donnée à l'école primaire. Et parce que nous souhaitons une refondation globale et ambitieuse, à la hauteur des attentes qui se sont exprimées, nous proposerons des amendements en vue d'améliorer ce projet de loi, en espérant qu'ils rencontreront un écho favorable.

Tout d'abord, nous souhaitons aller plus loin dans la définition des projets éducatifs territoriaux. En effet, ceux-ci joueront un rôle central dans la réforme des rythmes, dans le développement de l'innovation pédagogique et des expérimentations et dans la recherche d'un nécessaire équilibre entre le cadre national et l'adaptation aux spécificités locales.

Ces projets éducatifs territoriaux doivent organiser une continuité éducative entre le temps scolaire et les autres temps de l'enfant. Ils doivent ainsi assurer la cohérence entre activités scolaires et activités périscolaires, en impliquant l'ensemble des acteurs concernés : communauté éducative, parents, associations – dans lesquelles il faudrait comprendre celles qui s'occupent du handicap – et, bien sûr, collectivités territoriales car c'est aussi dans le cadre d'une « co-construction » des projets que leur rôle doit être appréhendé, étant entendu qu'il conviendrait de réfléchir à la pérennisation et au renforcement du dispositif de péréquation.

Ensuite, nous souhaitons que la refondation permette des évolutions pédagogiques. Les projets éducatifs territoriaux et la réforme des rythmes ouvrent à cet égard le champ des possibles. Alors soyons audacieux, sortons du carcan conservateur ! Il s'agit d'ouvrir l'école sur l'extérieur, à d'autres acteurs, en revoyant les emplois du temps de manière à donner vie à des projets collectifs. La réforme des rythmes doit susciter une réforme des pratiques. Dans cet esprit, nous déposerons des amendements posant un droit à l'expérimentation et à l'innovation pédagogique et visant à ouvrir les établissements aux associations, en particulier aux associations d'éducation populaire.

Enfin, nous appelons de nos voeux une gouvernance plus ouverte. Il faudrait en particulier y donner plus de place aux élèves et à leurs parents.

Pour ce qui est de la pédagogie, nous prônons une révision profonde du système de notation, l'interdiction de la notation chiffrée à l'école primaire et, à tout le moins, l'instauration d'une notation positive par la suite. L'école ne doit pas être le lieu d'apprentissage de la compétition.

De façon plus globale, il convient de repenser la totalité du système d'évaluation des élèves, du cours préparatoire au baccalauréat. En effet, les modalités d'examen sont elles aussi à revoir. Comment peut-on encore raisonnablement considérer qu'un 12 sur 20 en mathématiques « rattrape » un 8 sur 20 en français ?

Au-delà des connaissances, il faut aussi s'intéresser aux compétences. Dans la mesure où un parcours culturel et artistique est prévu, pourquoi ne pas s'appuyer sur l'enseignement moral et civique pour créer aussi un parcours citoyen ? Et pourquoi pas un parcours professionnel, pour chaque élève ? Nous proposerons plusieurs amendements en ce sens, concernant aussi bien le brevet que le bac.

Vous ne serez pas surpris, d'autre part, que nous souhaitions faire du redoublement une réelle exception.

Je tiens à insister sur la nécessité d'aller plus loin aussi dans la scolarisation des élèves handicapés. Parler d'accueil et d'accompagnement ne suffit plus. Nous demanderons une meilleure adaptation des locaux, davantage de personnels dédiés et une formation plus poussée des équipes pédagogiques et des enseignants.

Enfin, concernant la formation des enseignants, nous avons exprimé à plusieurs reprises des demandes précises : davantage de moyens pour la formation continue, qui est le véritable levier de la refondation de l'école ; un concours en troisième année de licence afin que les deux années de master soient réellement consacrées à la formation ; un prérecrutement digne de ce nom. Les emplois d'avenir professeur et l'organisation envisagée actuellement nous paraissent en effet perfectibles.

Vous le constatez, les pistes que nous proposons d'explorer sont nombreuses, et nous sommes impatients d'entrer dans le coeur du débat.

Je terminerai par un petit mot à l'intention de mes collègues de l'opposition. J'ai appris que, la semaine dernière, certains d'entre vous s'étaient émus de mon absence à la fin de la discussion de la proposition de la loi visant à prévenir la violence en milieu scolaire. J'ai été touchée par cette marque d'attention mais, comme M. le président de la Commission vous l'a précisé, j'étais tenue par mes obligations de présidente de groupe. Rassurez-vous toutefois : la coprésidence que nous avons instaurée avec M. François de Rugy nous permettra de mieux nous organiser. Je serai ainsi pleinement disponible pour prendre toute ma part dans ce débat essentiel !

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