Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 22 février 2013 à 9h30
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Article 23

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Bien sûr, monsieur le président Sauvadet, vous avez raison : les électeurs de toute la France. Je ne fais que répondre sur le ton de l'humour à des interpellations amicales, que vous n'avez pu entendre car vous êtes assis trop loin pour les capter. N'ayez crainte, monsieur Sauvadet, je ne vous provoque pas ! (Sourires.)

En dehors des considérations géographiques, les jurisprudences du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État montrent que la notion d'impératif d'intérêt général doit être maniée avec prudence et qu'elle doit être regardée comme étant d'interprétation stricte. Notre débat est encadré par le contenu de ces différentes décisions. Dans ses conclusions communes aux affaires Boulanger et Guinde portant sur le département des Bouches-du-Rhône, affaires sur lesquelles le Conseil d'État a rendu sa décision le 21 janvier 2004, le commissaire du Gouvernement a considéré que « le Gouvernement peut légalement tenir compte, lorsqu'il établit la carte cantonale, de considérations territoriales tenant par exemple à la nécessité d'assurer la représentation de telle ou telle partie du département qui, bien que peu peuplée, présenterait une forte spécificité. Le Conseil constitutionnel a en effet jugé que les conseils généraux ont aussi vocation à assurer la représentation des composantes territoriales du département ».

Ces motifs d'intérêt général sont cependant appréciés in concreto par le Conseil d'État. Il a ainsi considéré en 2004 que « les raisons d'intérêt général invoquées par le ministre de l'intérieur et tirées des caractéristiques spécifiques de la Camargue ne font pas obstacle à ce qu'il soit procédé à un nouveau découpage tenant compte des nécessités de représentation de la Camargue, mais plus conforme au principe de l'égalité du suffrage ». Il semble dès lors qu'au sens de cette jurisprudence il ne pourra être argué d'un motif d'intérêt général pour prendre en compte des considérations économiques, sociologiques ou culturelles dont le caractère subjectif ou imprécis pourrait laisser penser qu'il s'agit simplement d'un argument d'opportunité.

Voilà ce que je voulais vous rappeler, après les interventions sur l'article 23, et avant l'examen des amendements sur cet article. Le Gouvernement souhaite procéder à l'élaboration de la nouvelle carte cantonale en respectant le principe d'égalité des suffrages, tout en faisant jouer les marges reconnues par la jurisprudence du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel. Après que cette loi aura été examinée par le Conseil constitutionnel, le décret procédant au redécoupage cantonal sera examiné par le Conseil d'État, après consultation des conseils généraux – et donc des élus des départements. Nous utiliserons donc cette marge que nous laisse la jurisprudence pour tenir compte de la réalité de nos territoires. C'est pour cela que le Gouvernement donnera un avis favorable à l'amendement que Mme Frédérique Massat présentera tout à l'heure. En effet, cet amendement intègre les éléments que je viens d'évoquer, tout en sachant que le découpage cantonal lui-même sera examiné par le Conseil d'État.

À titre personnel, monsieur Marleix, s'il était possible, en acceptant des amendements déposés par des parlementaires, d'aller au-delà de la limitation à 20 % des écarts démographiques entre cantons, je le ferais ! J'ai eu l'occasion de le dire au Sénat, et nous en discuterons également avec la Haute assemblée. Mais comprenez que je ne peux courir le risque de l'inconstitutionnalité ! Si la loi que je présente aujourd'hui était censurée, vous pourriez me le reprocher.

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