Intervention de François Sauvadet

Séance en hémicycle du 22 février 2013 à 9h30
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Article 23, amendement 641

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Sauvadet :

Deuxièmement, je m'étonne que vous inscriviez dans la loi les règles dégagées par la jurisprudence du Conseil d'État, confirmées par le Conseil constitutionnel. Franchement, je voudrais que vous me répondiez sur ce point.

Cette règle était une acceptation de la région par rapport au département. D'ailleurs, quand nous avons débattu de cette question avec le Gouvernement, nous avons augmenté le nombre des élus pour faire en sorte qu'une représentation territoriale soit assurée. La discussion portait donc sur le département par rapport à la région. La moyenne était régionale, ce qui faisait naturellement baisser, pour un certain nombre de territoires ruraux, la moyenne arithmétique et conduisait à la disparition pure et simple de la représentation politique des territoires ruraux.

Je m'étonne donc que vous inscriviez cette règle dans la loi. En revanche, la loi devrait préciser non pas seulement les exceptions, mais la nature de ce que vous voulez faire. Inscrire ces éléments dans la loi est très dangereux. La jurisprudence ne repose que sur l'interprétation du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel. Ce qui forge le destin d'un pays, c'est la loi ! La loi doit naturellement respecter la loi fondamentale, mais elle doit aussi fixer un cap, traduire une ambition.

Mes collègues et moi sommes attachés à la représentation territoriale, à ce lien étroit qui unit un territoire et un élu. Vous l'avez distendu en choisissant la formule du binôme, qui introduira une forme de compétition territoriale – je ne reviens pas sur ce sujet. Monsieur le ministre, je crois franchement que vous prenez un risque en décidant d'inscrire dans la loi cette règle limitant les écarts de population entre cantons à plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne, et en inscrivant également dans la loi les exceptions à ce principe. Je le pense profondément. Je ne vois pas ce qui, aujourd'hui, justifie cela.

Je vous demande simplement de renoncer à votre texte. Au regard du défi que constitue l'aménagement du territoire, la structure territoriale que vous voulez mettre en place fera disparaître politiquement, puis réellement, les territoires ruraux. Je vous demande donc de bien mesurer les conséquences de vos actes quand vous faites oeuvre de législateur, et je sais que vous y êtes attentif. Quand on fait la loi, il faut faire attention à ce qu'on fait. La réforme que vous engagez sera lourde de conséquences pour l'avenir de la France. Je pèse mes mots : ce sera lourd de conséquences. Ne sacralisez donc pas ce principe en l'inscrivant dans la loi !

Je vous ai remercié, non parce que vous nous présentez ce projet de loi que je combats naturellement avec beaucoup de force, mais parce que vous avez pris en compte, en acceptant au tout début du débat un de mes amendements, la dimension des populations qui vivent dans les territoires. Le fait démocratique n'est pas simplement fondé sur le principe d'un homme, une voix – le fait aggloméré l'emportant par conséquent –, mais sur des circonscriptions électorales au sein desquelles s'applique le principe d'un homme égale une voix.

Monsieur le ministre, vous acceptez de reconnaître que les populations vivant dans les territoires doivent être reconnues en tant que telles dans le découpage généralisé, donc dans le charcutage que vous entendez faire. L'avenir du pays se fonde aussi sur la représentation de tous ceux qui vivent dans des territoires moins denses, moins peuplés et qui ont droit à être entendus sans que ne soit, bien sûr, remis en cause le principe constitutionnel.

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