Intervention de Vincent Peillon

Séance en hémicycle du 27 février 2013 à 21h30
Questions au ministre de l'éducation nationale

Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale :

Vous appartenez, monsieur Braillard, au parti non seulement de Jules Ferry mais aussi de Ferdinand Buisson et de quelques autres qui ont fait l'école de la République en un temps où le conseil supérieur de l'instruction publique pensait qu'il n'était pas totalement absurde d'enseigner aux plus jeunes des valeurs constitutionnelles dès lors qu'elles sont partagées. C'est pour cela que nous instruisons, mais que nous éduquons aussi.

J'entends aujourd'hui des gens se demander ce qu'est la morale laïque. C'est dire que les jeunes ne sont pas les seuls à donner dans l'individualisme et le relativisme et qu'il faut rappeler aux plus âgés quelques principes élémentaires !

Une morale laïque, c'est une morale qui n'est pas confessionnelle. Pour autant, elle n'est pas antireligieuse. Elle ne repose pas sur un fondement transcendant, mais essaie d'enseigner des valeurs de respect, de dignité, de tolérance et la notion même de devoir, qui est morale et non juridique, sans avoir recours à une quelconque transcendance, mais sans blesser les consciences qui ont d'autres opinions religieuses.

Un tel enseignement peut être utile, car si nous renonçons à défendre la morale laïque, il semblerait que seuls ceux qui ont recours à la transcendance – donc à dogmatismes et des catéchismes édictés par des églises – transmettent ces valeurs.

La morale laïque n'est pas non plus le droit. La République s'est construite sur l'idée qu'une politique, c'est-à-dire un rapport de pouvoir, ne suffisait pas – c'est la raison pour laquelle nous sommes le pays de la Déclaration universelle des droits de l'homme, seul credo du républicain – et qu'il fallait y ajouter de la morale. On obéit au droit parce qu'il prévoit une sanction ; en revanche, dans la morale, l'obligation est intérieure. Sur le plan juridique, on peut mentir : si ce n'est pas su, on n'est pas sanctionné ; sur le plan moral, on ne le peut pas.

Nous allons donc rappeler au pays que sa tradition est d'unir morale et politique, que la morale laïque est un élément essentiel du pacte républicain et que si l'on s'abstient de la défendre, on affaiblit le pays et on rend impossible la construction d'une communauté nationale.

Cela étant, je veux rassurer les inquiets, cette morale ne sera pas celle du ministre : nous la construirons tous ensemble. Nous avons de grands prédécesseurs et il nous faut faire vivre la tradition, car elle engage l'avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC et écologiste.)

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