Je suis vraiment ravi que ce soit la ministre chargée des Français de l'étranger, dont je suis l'un des représentants, qui réponde à ma question ce matin.
Point n'est besoin d'avoir lu Le Siècle des Lumières d'Alejo Carpentier pour savoir que l'Amérique latine fut un réceptacle extrêmement fertile des idées révolutionnaires, et qu'après la guerre, notamment après la révolution cubaine, elle fut à la fois un centre d'intérêt et une destination privilégiée pour nombre de nos intellectuels et de nos politiques. La France fut à son tour, aux périodes les plus noires des dictatures latino-américaines, une destination, une terre d'accueil pour de nombreux exilés.
Paradoxalement, le retour du continent latino-américain à la démocratie, à la stabilité économique et politique et même à la croissance, et l'installation au pouvoir des gauches latino-américaines se sont traduits par une forme d'indifférence de la France à l'égard de ce continent.
La France, nous dit-on, y est désormais de retour. C'est une bonne nouvelle. Nous sortons en effet d'une période où l'indifférence, les crispations, parfois même les maladresses, ont caractérisé notre relation au continent latino-américain.
Lundi dernier, au cours de sa visite latino-américaine que j'ai eu l'honneur d'accompagner, Laurent Fabius s'est adressé, à Bogotá, à un parterre d'étudiants de l'université Externado. Dans un discours important, il a tenté de synthétiser ce nouveau partenariat avec l'Amérique latine, fondé sur la question des enjeux globaux.
Madame la ministre, comment la France entend-elle aborder ces enjeux globaux, notamment celui de la drogue, l'un des plus importants qu'affronte aujourd'hui le continent latino-américain ? Rappelons que la zone située entre les États-Unis et le nord du Brésil est l'une des plus violentes au monde et que, tirant les leçons de l'échec de la lutte contre les drogues, les gouvernements concernés ont changé de politiques.
Comment la France articule-t-elle ce nouveau partenariat avec l'Union européenne et les politiques de l'Union à l'égard du continent latino-américain, notamment les accords de libre marché ?
Pourriez-vous me préciser la manière dont le partenariat économique est désormais envisagé ? Les pays latino-américains ne sont pas uniquement des marchés, et nos relations culturelles sont extrêmement denses, comme en témoignent le nombre des centres de l'Alliance française et des lycées français. Nous pouvons aider les grandes entreprises françaises dont la présence ancienne ne parvient pas à masquer le déficit du commerce courant.
Enfin, quelle est la nature des relations qu'un gouvernement de gauche peut établir avec les gauches actuellement au pouvoir en Amérique latine, qui ont fait du retour de l'État, dans l'économie notamment, l'une des principales caractéristiques de la période ?
Les Français qui habitent le continent ont besoin d'avoir des éclaircissements. Ils sont heureux du retour de la France en Amérique latine, mais les déclarations ne suffisent pas forcément à construire le nouveau récit nécessaire à la relation entre la France et l'Amérique latine.