Ce travail effectué par nos deux rapporteures se trouve aujourd'hui concrétisé par leurs rapports, pour les deux commissions qui examinent cette question, depuis que la Commission européenne a présenté le projet de règlement destiné à instaurer ce principe de réciprocité dans l'ouverture des marchés publics au sein de l'Union européenne.
La commande n'est pas récente : elle a dix-huit mois. C'est en octobre 2011 que le Conseil européen a demandé à la Commission de présenter une proposition d'instrument « visant à ouvrir les marchés publics, en précisant que l'Europe continuera à favoriser des échanges commerciaux libres, équitables et ouverts tout en défendant avec force ses intérêts dans un esprit de réciprocité et de bénéfice mutuel ».
Nous sommes aux antipodes de toute volonté de protectionnisme. Ce projet de règlement qui nous est présenté, sur lequel les deux commissions ont bien travaillé, consiste en une redéfinition du périmètre d'ouverture des engagements à la fois bilatéraux et multilatéraux de l'Europe : ainsi, pour les entreprises d'un pays dont les marchés publics sont fermés, l'ouverture de nos marchés publics européens deviendrait conditionnelle.
Afin d'appuyer cette démarche à l'Assemblée nationale, cette proposition de résolution européenne a été étudiée le 15 janvier dernier par la commission des affaires européennes et plus récemment, le 5 février, par la commission des affaires économiques. Je voudrais saluer la décision, que cette commission a prise unanimement, de durcir à bon escient le texte pour affirmer la nécessité d'être ouvert, disponible, mais « ferme sur les prix », si je peux me permettre cette expression un peu triviale.
Les États de l'Union européenne sont désavantagés dans leurs relations commerciales avec leurs partenaires. La base sur laquelle les choses se construisent vaille que vaille, dans le déséquilibre constaté, c'est cet accord plurilatéral sur les marchés publics conclu en 1994, conjointement avec la transformation du GATT au moment des accords de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce. Cependant, il est utile de rappeler que sur les 156 membres de l'OMC, l'engagement ne concerne que 41 membres, un gros quart, dont l'Union européenne, et que, d'autre part, les États même qui y ont souscrit ont eu la possibilité d'inclure des dérogations.
Mes prédécesseurs l'ont dit, le déséquilibre est flagrant : nous ouvrons 85 à 90 % des marchés européens à la concurrence, pour un montant estimé à 352 milliards d'euros ; les États-Unis n'ouvrent qu'à 32 %, ce qui représente un volume de marchés ouverts moitié moindre, 178 milliards d'euros, que ceux de l'Union européenne. Quant aux autres – le Japon, le Canada, la Chine plus encore –, soit prétendent ouvrir et en réalité ferment beaucoup ; soit ils ont l'honnêteté de s'en tenir à un discours qui n'est même pas arrogant, mais qui affirme leur émergence flamboyante, revendiquant l'accès à tous les marchés et la fermeture du leur.
C'est pourquoi le règlement européen serait un instrument utile : il permettrait de faire pression sur nos partenaires commerciaux tout en manifestant notre volonté d'un partenariat équilibré au niveau des marchés publics, qui pour l'instant nous sont beaucoup trop fermés.
Cette problématique de la réciprocité sur les marchés publics aura des conséquences concrètes sur nos entreprises et sur nos emplois. On a parlé de 1 000 milliards d'euros, de 20 millions voire 30 millions d'emplois concernés. Les achats publics représentent 19 % du PIB, dans le haut de la fourchette, pour l'Union européenne.
Madame la ministre, ce ne sera pas une surprise, mais je pense qu'il est important que vous ayez cette tranquille certitude : le groupe UMP votera sans difficulté ce projet de résolution qui a été bien travaillé, qui nous a été bien rapporté et qui mérite maintenant d'être repris comme outil supplémentaire de la volonté de notre gouvernement de combattre à l'échelle européenne. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Qu'il me soit permis, pour conclure, de dire que si cette proposition de résolution confortant la proposition de règlement européen sera un bon outil, cela ne suffira pas pour gagner des marchés publics à l'étranger : ce qui est en jeu, notre collègue Yannick Favennec le disait, c'est aussi la compétitivité profonde, intrinsèque, de nos entreprises.