Intervention de Delphine Batho

Séance en hémicycle du 11 mars 2013 à 21h45
Tarification progressive de l'énergie — Présentation

Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

Aujourd'hui, en France, ce sont les mêmes qui subissent les inégalités sociales et les inégalités environnementales. Nous sommes fiers d'étendre, à travers le vote de cette proposition de loi, le bénéfice des tarifs sociaux de l'énergie à 8 millions de Français, alors que s'aggrave dans notre pays le scandale de la précarité énergétique, qui voit de plus en plus de familles aux prises avec des situations très difficiles face à l'augmentation des factures d'électricité et de gaz.

Le Gouvernement a déjà étendu par arrêté, au mois de décembre dernier, le bénéfice des tarifs sociaux de 1,2 million à 1,7 million de foyers, mais seul le vote de la loi permettra à 8 millions de Français d'accéder à ces tarifs sociaux – rappelons que cela représentera en moyenne un gain de pouvoir d'achat de 200 euros par an pour une famille se chauffant au gaz et de 90 euros pour une famille se chauffant à l'électricité. Le plafond de revenus, jusqu'alors de 661 euros, va passer à 893 euros pour une personne seule, ce qui correspond à peu près au seuil de pauvreté. C'est donc une avancée sociale majeure.

Ce texte instaure aussi la trêve hivernale. C'est une question de dignité : au XXIe siècle, dans un pays avancé comme la France, on ne peut pas couper le chauffage à une famille entre le 1er novembre et le 15 mars.

En même temps que nous procédons à l'extension des tarifs sociaux, nous avons souhaité porter un message de responsabilisation et d'incitation aux économies d'énergie en direction des consommateurs. Nous sommes donc également fiers de l'innovation que constitue la création du bonus-malus sur les factures d'énergie de réseau. C'est un signal vertueux qui sera envoyé aux ménages pour qu'ils maîtrisent leur consommation.

Le bonus-malus s'appliquera en 2015. Il touchera les énergies de réseau ; 75 % des consommateurs percevront un bonus et seront donc gagnants avec ce dispositif doté de surcroît d'une forte dimension sociale. Il y aura un premier niveau de malus, de nature essentiellement pédagogique ; s'appliquera ensuite un malus dissuasif qui visera les consommations réellement extravagantes. Ainsi que l'avait souhaité le groupe socialiste, ce dispositif ne s'appliquera pas aux personnes qui, bien qu'elles habitent dans des « passoires » énergétiques, bénéficient des tarifs sociaux.

Ce déploiement du dispositif du bonus-malus va de pair avec la mise en place du service public de la performance énergétique, lequel va constituer une priorité nationale. Les travaux d'efficacité énergétique viseront à éliminer les logements énergivores dans notre pays. À cette fin, un important travail est en cours ; les décisions seront finalisées d'ici la fin du mois par le Premier ministre. Le but est de permettre à tout un chacun de réaliser des travaux d'isolation thermique dans son logement.

À cet égard, je voudrais appeler votre attention, mesdames, messieurs les députés, sur la récente note du Centre d'analyse stratégique concernant l'effet rebond en matière d'économies d'énergie. Ce texte est très intéressant car il révèle que les travaux d'isolation thermique et d'efficacité énergétique dans les logements engendrent un effet rebond représentant entre 5 % et 50 % des économies d'énergie réalisées s'ils ne sont pas accompagnés d'un message en direction des consommateurs visant à une modification des comportements. C'est tout le sens du bonus-malus. La démonstration en a d'ailleurs été faite par toute une série d'économistes : on voit bien qu'il y a une cohérence à mener de front une extension des tarifs sociaux, en réponse la précarité énergétique, un travail sur la performance énergétique des logements, avec un programme de grande ampleur au niveau national pour éliminer les logements énergivores et un système de bonus-malus permettant de responsabiliser les consommateurs et d'inciter aux changements de comportement.

Vous le savez, la France a aujourd'hui un important retard en matière d'économies d'énergie : alors que nous nous sommes fixé l'objectif de 20 % d'économies d'énergie en 2020, nous sommes seulement à 3 % ; il reste donc à accomplir 85 % de l'effort. Nous sommes aux prises avec un gros problème de développement de la pointe électrique : c'est ce qui a conduit, l'année dernière, à une augmentation de 35 % de la part du charbon dans la production d'électricité, ce qui constitue une régression historique. Il y a donc urgence à prendre des mesures de grande ampleur en faveur de la maîtrise de notre consommation d'énergie.

Pour conclure, la présente proposition de loi comporte d'autres mesures très attendues et importantes : la valorisation de l'effacement industriel et de l'effacement diffus, sans oublier les mesures d'urgence en faveur de l'énergie éolienne, qui est une énergie renouvelable parmi les plus compétitives…

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