Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 20 février 2013 à 16h15
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Monsieur Deflesselles, la mission EUTM Mali, chargée d'assurer la formation des forces armées maliennes, comprendra 500 militaires européens. Lancée ce lundi, elle commencera prochainement son travail, avec un mandat initial d'un an, pouvant être prolongé. La France étant la nation cadre, la mission est commandée par un général français, mais la participation de nos partenaires européens a été obtenue. Le seul point d'interrogation concernait leur volonté d'envoyer non seulement des formateurs, mais également des protecteurs, afin que la France n'ait pas à prendre en charge la totalité de cette tâche. Sécurisée par 5 000 soldats de la MISMA et par des militaires français, la zone de Koulikoro, où se déroulera la formation, ne présente pas de risques majeurs ; aussi le problème est-il désormais réglé, les protecteurs tchèques, espagnols et belges venant étoffer les effectifs. Certains pays fournissent à la fois des formateurs et des protecteurs ; l'Allemagne n'envoie, pour sa part, que des formateurs. La mission de formation et d'entraînement des forces maliennes débute, avec l'objectif de doter le Mali d'une armée digne de ce nom.

Au moment du lancement de l'intervention, le 9-10 janvier, il y avait au Mali quelque 2 500 terroristes – qu'il faudrait plutôt qualifier de narco-djihadistes – de différents groupes. Que sont-ils devenus ? Plusieurs centaines ont été tués ; le nombre significatif de morts – 25 hier, 10 avant-hier – représente une perte nette. Certains ont ainsi déserté, d'autant qu'il s'agissait souvent de mercenaires que leur employeur rémunérait mieux que l'armée régulière, grâce à l'argent des divers trafics. Au total, une partie des terroristes a été neutralisée, une autre s'est dispersée, le reste des combattants – dont on mesure mal le nombre – émigrant vers le Sud de la Libye et jusqu'au Soudan où se trouvent peut-être certains leaders.

Les terroristes encore présents au Mali se concentrent en plusieurs endroits. Nous sommes désormais sûrs que les combattants d'AQMI qui n'ont pas fui vers le Sud de la Libye se trouvent dans l'Adrar des Ifoghas ; les 25 terroristes tués hier appartiennent d'ailleurs à cette organisation. Ces militants ne se mélangent pas à la population ; rattachés au djihadisme international – ils s'en iront proliférer ailleurs lorsque la guerre sera terminée au Mali –, ils représentent quelque 100 ou 150 « Mohamed Merah », capables de tout et armés.

Quant au MUJAO, il rassemble aujourd'hui, selon nos estimations, environ 300 terroristes, toujours dispersés autour de Bourem et de Gao. Les missions que nous menons, avec le concours de l'armée malienne, pour les éradiquer doivent être poursuivies jusqu'au bout. Le site de Bourem a été pris la semaine dernière, alors que le MUJAO effectuait, il y a dix jours, plusieurs opérations suicides et tentatives d'enlèvement de journalistes à Gao. La sécurisation de ces deux villes sera fondamentale, mais difficile. Les missions de reconnaissance que nos forces, aidées par la population locale, y mènent pour trouver les caches des terroristes constituent le meilleur moyen d'empêcher le MUJAO de ressurgir. Seul le développement de ces territoires en viendra pourtant à bout : c'est par désoeuvrement ou par nécessité financière que certains jeunes rejoignent ces groupes, et si l'on n'y remédie pas, l'on risque de nouvelles difficultés.

Si l'on envisage, à l'avenir, de passer le relais à une force de maintien de la paix ou à une mission de stabilisation sous l'égide de l'ONU, l'armée française sera présente en soutien de la future MINUMA, sous une forme à déterminer mais très probablement pour la couverture aérienne. L'objectif final est de reconstituer les forces armées maliennes, afin que le pays puisse se gérer seul ; mais pour que ce processus se déroule bien, il faut avoir avant sécurisé tout le territoire. Notre diplomatie travaille actuellement pour faire voter une résolution d'ici trois semaines ; sa mise en oeuvre demandera ensuite du temps. Pour l'instant, nous menons notre action dans l'Adrar avec le soutien tchadien qui se concentre sur la partie est.

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