Que reproche-t-on au mode de scrutin en vigueur ? En premier lieu, d'assurer aux grands partis le plus grand nombre d'élus. Il est vrai qu'il n'est pas facile, en démocratie, de faire valoir son point de vue quand on est minoritaire, mais l'argument manque vraiment de consistance ! En deuxième lieu, de ne pas favoriser la parité. Mais il n'empêche pas qu'elle s'applique !
Il est en revanche plus juste de constater que les huit circonscriptions ne correspondent à aucune réalité politique ou humaine, qu'elles ont un caractère artificiel. Toutefois, si cette formule présente bien des inconvénients, le dispositif que l'on nous propose de mettre en place les aggraverait.
En effet, le scrutin proportionnel au niveau national entraînerait un émiettement de la représentation française au Parlement européen, au détriment de la cohérence de l'action. Ne pratiquons pas l'angélisme : les sensibilités nationales jouent au Parlement européen où chaque nation a sa sensibilité et sa vision de l'Europe ! Il faut donc maintenir une certaine cohésion de nos élus.
Ce mode de scrutin éloignerait davantage les députés européens du terrain et de leurs électeurs. Les investitures se gagneraient encore plus dans les antichambres, et les députés hors-sol prospéreraient.
De ce fait, l'éloignement des territoires serait accentué car Paris et l'Île-de-France seraient surreprésentés. Tous les états-majors se trouvant dans la capitale, ceux qui en sont le plus proches auraient le loisir d'y faire leur cour en vue d'augmenter leurs chances d'être bien placés sur la liste nationale.
J'ajoute que l'on a la mémoire à la fois sélective et courte quand on défend la circonscription unique au motif qu'elle permettrait aux chefs de parti d'incarner un débat qui deviendrait ainsi national. En effet, quand tel était le cas, avant 2003, ces derniers démissionnaient à peine élus, et les électeurs n'étaient pas dupes. Ce n'est donc pas ainsi qu'on les incitera à voter, d'autant que ce serait aussi faire fi des progrès souhaités en matière de non-cumul des mandats.
Le changement qui nous est proposé me semble donc inopportun. De plus, nous donnerions une mauvaise image de la politique si nous modifiions les modes de scrutin à chaque changement de majorité.