Intervention de Emmanuelle Wargon

Réunion du 28 février 2013 à 9h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Emmanuelle Wargon, déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle :

L'ANI et le projet de loi prévoient par ailleurs une présence accrue de l'administration tout au long de la discussion et, dans bien des cas, nous ne saurons qu'à la fin de la négociation si le plan reposera sur un accord majoritaire ou sur un document unilatéral. Il est même vraisemblable que des plans contiendront des parties négociées et d'autres unilatérales. Les syndicats pourraient, en effet, accepter quelques éléments d'un PSE comme les mesures de reclassement, et en refuser d'autres comme les critères d'ordre qui sélectionnent les personnes auxquelles des postes sont proposés. Le paquet global de la négociation sera évalué par l'administration, d'où son suivi de l'ensemble de la procédure. Aujourd'hui, l'administration est déjà informée en amont des PSE de grande taille ; elle reste en contact régulier avec l'entreprise, elle passe des messages sur le contenu du plan – notamment au moyen de lettres d'observation si l'entreprise rencontre des difficultés – et se trouve ainsi associée à l'ensemble du processus.

Les critères d'homologation du plan et la nature des outils dont disposeront les DIRECCTE pour les contrôler constituent une question centrale. La loi posera les principes généraux, leur application sera régie par des décrets, mais c'est la pratique qui s'avérera in fine déterminante. Une circulaire de mise en oeuvre du texte sera donc nécessaire pour fournir des indications sur la procédure d'homologation. À ce stade, nous restons réticents à l'idée d'insérer des critères dans la loi, car leur appréciation doit s'opérer au cas par cas. Ni la validation, ni l'homologation, ne portent sur le motif économique. L'examen des conditions économiques ayant entraîné l'entreprise à licencier relève du juge judiciaire. Or la Cour de cassation, dans son arrêt Viveo du 3 mai 2012, a refusé d'annuler un PSE pour défaut de motif économique. Le juge judiciaire peut donc constater l'absence de fondement économique, en tirer des conséquences sur les licenciements en proposant une réintégration – avec l'accord de l'entreprise – ou une indemnisation, mais ne peut pas pour autant déclarer la nullité du PSE. Tel est le droit positif que nous n'avons pas l'intention de modifier.

Puisque l'administration interviendra sur la qualité de la procédure, son action devra reposer sur la notion de proportionnalité : plus l'entreprise disposera de moyens pour accompagner ses salariés et plus l'administration se montrera exigeante. L'appréciation ne portera donc pas sur le motif, mais sur l'ampleur du plan et le devenir des salariés au regard de la situation de l'entreprise. Ainsi, un groupe en bonne santé financière, qui déciderait de se séparer d'une activité qu'il estimerait condamnée, ferait l'objet d'une exigence quantitative et qualitative très poussée de la part de l'administration, afin qu'il investisse significativement dans le reclassement et l'indemnisation de ses salariés. Les orientations et les outils fournis aux services seront conçus à partir de ce concept de proportionnalité.

Comme vous l'avez affirmé monsieur Castaner, se pencher sur l'anticipation des mutations économiques conduit rapidement à analyser les risques par filière. Les analyses menées dans les comités stratégiques de filières, nationaux et régionaux, visent à accompagner les branches – et donc les entreprises – dans une réflexion stratégique portant sur les métiers menacés ou ceux qui sont à développer, ainsi que sur la façon d'adapter les compétences, par une politique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et de formation intelligente, pour atténuer les effets des mutations économiques. Nous ne distinguons pas ces deux politiques qui forment un continuum.

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