Intervention de Brigitte Allain

Séance en hémicycle du 27 mars 2013 à 15h00
Prohibition de la différence de taux de sucre outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain :

Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la rapporteure, mesdames, messieurs, il est temps que nous votions un tel texte ! Cette proposition de loi soumise aujourd'hui par des députés du groupe socialiste est attendue depuis longtemps. L'adoption de cette disposition relative à la régulation du taux de sucre dans les produits alimentaires outre-mer a été reportée à plusieurs reprises et de façon incompréhensible. Proposée par Victorin Lurel en 2011, l'Assemblée l'a rejetée en première lecture. Il en est allé de même lors de l'examen, en ce début de législature, du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer Les écologistes avaient alors déposé un amendement similaire. Celui-ci n'a pas été adopté au motif qu'une telle disposition devait figurer dans une loi plus large.

Le texte a été complété en commission des affaires sociales la semaine dernière. Ainsi, deux articles ont été ajoutés et le titre a été modifié, puisque cette proposition vise, aujourd'hui à « garantir la qualité de l'offre alimentaire en outre-mer. »

Quatre articles composent le nouveau texte. Mais je dois dire que je suis un peu surprise de sa faible ambition, alors que le changement de nom de ladite proposition de loi annonçait justement une approche plus globale. Nous aurions dû, ainsi, voter la disposition sur la prohibition de la différence de taux de sucre il y a longtemps, d'autant qu'il y a urgence. Outre-mer, les produits de consommation courante ont une concentration en sucre supérieure à celle des mêmes produits de marques identiques vendus en France hexagonale. Par exemple, un soda à l'orange acheté à Paris comporte 9,5 grammes de sucres pour 100 grammes, et ce taux atteint entre 13 et 14 grammes lorsque ce même produit est acheté dans les outre-mer, soit une augmentation de près de 40 %. Cette pratique inadmissible, qu'aucun argument objectif ne justifie, a des effets directs sur la santé des ultramarins, puisque les sucres sont une des causes principales de l'obésité qui n'a, jusqu'ici, pas été suffisamment traitée outre-mer. Selon une enquête de 2012, 25 % des enfants et adolescents et plus d'un adulte sur deux sont en effet touchés par des problèmes de surcharge pondérale outre-mer, ce qui correspond quasiment au triple des estimations nationales. Or, rappelons-le, l'obésité favorise la survenue de diabète, d'hypertension, de maladies cardiovasculaires et respiratoires et d'atteintes articulaires, sources de handicaps. La santé des ultramarins mérite mieux que des dérogations !

De même, je souligne l'importance de l'article 4, lequel vise à promouvoir les denrées issues des circuits courts de distribution afin de favoriser l'approvisionnement des sites de restauration collective en produits frais et de saison. Cette mesure, engagement du Grenelle de l'environnement et du Gouvernement, doit être promue, non seulement dans les territoires ultramarins dont les économies sont très dépendantes des importations, mais aussi dans toute la France. Les outre-mer vont montrer la voie à la métropole.

Outre-mer, le poids des importations est en partie responsable de la vie chère qui caractérise ces territoires. Développer l'économie locale pour une consommation locale nécessite une véritable politique et des mesures d'incitation et d'accompagnement pour stimuler la coopération et l'investissement. Produire local pour consommer local présentera le double avantage de créer des emplois, mais également de réduire l'empreinte carbone qu'entraînent les longs trajets des marchandises. Cela permettra aux départements d'outre-mer de sortir de leur dépendance des importations, de garder la valeur ajoutée de leurs productions et d'intervenir sur le coût de leur alimentation.

Dans la loi relative à la régulation économique outre-mer, nous avions déjà demandé la publication d'un rapport sur ce sujet. Ce rapport devait permettre de comprendre les contraintes pesant sur la production locale dans les outre-mer et d'esquisser des propositions pour que l'économie locale soit accessible aux habitants de ces territoires. L'article 4 est une première réponse à cette question de la production locale, mais elle n'est pas suffisante. Lors du débat, le Gouvernement nous avait assuré qu'une réponse serait apportée lors de la conférence économique et sociale de cet été. Cette dernière l'a elle-même renvoyée au projet de loi d'avenir de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, lequel comportera, je cite, « un titre spécifique aux outre-mer afin de tenir compte des difficultés spécifiques à l'agriculture ultramarine, notamment l'insularité, l'éloignement, et la difficulté d'accès au foncier ». Nous en prenons acte.

Pour conclure, je dois dire que, même si je considère comme trop partiel le traitement qui a été fait, dans cette proposition de loi, à la problématique de l'alimentation et de la production outre mer, ces dispositions complémentaires ont leur raison d'être et doivent être adoptées sans tarder. En conséquence, le groupe écologiste votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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