Madame la présidente, mesdames, messieurs, la présente proposition de loi répond, dans un premier temps, à un fort enjeu de santé et de société dans les outre-mer, à savoir la différence de taux de sucre entre les produits vendus dans les régions d'outre-mer et dans l'hexagone. Nous avons déjà tenté, en 2011, d'apporter une réponse législative à ce sujet, à votre initiative, monsieur le ministre des outre-mer. Face au poids des maladies chroniques outre-mer et de leurs conséquences incontestables en matière de durée, mais aussi de qualité de la vie, il y a là largement matière à se féliciter que la France tout entière ait pris la juste mesure des choses et ait choisi de donner un mandat fort à un gouvernement et à un Parlement majoritairement de gauche.
C'est grâce à ce changement à gauche que nous sommes aujourd'hui en mesure de dépasser la fin de non-recevoir qui nous avait été opposée en 2011 par la droite sur ce sujet d'urgence sanitaire et sociale, et que nous sommes aujourd'hui en mesure de débattre et de voter un texte à la fois urgent et utile. À ce titre, il est particulièrement navrant que le message prévalant au sein des députés de l'opposition est qu'il est une nouvelle fois urgent de ne rien faire sur ce dossier et de le renvoyer à une future loi, un autre texte, toujours et encore plus tard et – pourquoi pas ? – aux calendes grecques ! Certains à l'UMP, ont même osé nous affirmer que les Françaises et les Français outre-mer seraient en quelque sorte différents, auraient, par culture ou par nature, des goûts plus sucrés que les Françaises et les Français, différence naturelle qu'il ne faudrait surtout pas « brusquer » ! Une telle attitude, une telle vision du monde, est non seulement nauséabonde et antirépublicaine, elle est aussi irresponsable !
Premièrement, la triste réalité commerciale des sucres ajoutés sciemment dans les produits vendus outre-mer est avérée, documentée et chiffrée. Elle est incontestable. Deuxièmement, les conséquences de cette démarche industrielle volontaire sur les risques supplémentaires d'obésité, et ce dès le plus jeune âge, sont également démontrées et constituent une évidence. Dès lors, lorsque l'on connaît les effets directs de l'obésité en matière d'hypertension artérielle – six fois plus de risque, chez un jeune de vingt-cinq ans à trente-cinq ans –, en matière de diabète de type 2 avec son lot de risques accrus d'accident vasculaire cérébral, d'infarctus, d'artérite, de problèmes rénaux, ou encore de perte de vue – et je ne détaille pas les effets en termes, entre autres, d'insuffisance veineuse, d'insuffisance cardiaque ou encore d'arthrose. Une telle attitude de la part d'élus de la République est effectivement navrante ! Fort heureusement, ce n'est là que posture politique de la part des députés de l'opposition pour justifier leur abstention et éviter d'avoir à se rallier ouvertement à un bon texte de loi, un texte qui était déjà bon en 2011 et que de nombreux députés du groupe UMP ont immédiatement soutenu et persisté à soutenir, il faut le dire, en dépit du revirement de dernière minute de la majorité présidentielle de l'époque !
Les mesures prévues dans le texte examiné aujourd'hui en séance constituent donc un bon équilibre entre les enjeux de santé, d'une part, et les impératifs économiques, d'autre part. Si le texte est ferme – et c'est tant mieux –, il prévoit néanmoins les dispositions pratiques permettant à l'ensemble des acteurs d'en tirer les conséquences et de le mettre en application sans heurts.
Accessoirement, messieurs les ministres, il est intéressant de souligner que ces sucres ajoutés ne sont pas pour rien, me semble-t-il, dans le surcoût des produits vendus outre-mer et la cherté de la vie qui en résulte.
Il sera essentiel, mais je sais pouvoir vous faire confiance sur ce point, tant nous partageons la même ardente motivation dans la lutte en faveur du pouvoir d'achat outre-mer, que les conséquences de la présente proposition de loi soient contrôlées de très près par l'ensemble des instances chargées du suivi et du contrôle des prix et du pouvoir d'achat, afin de s'assurer que la baisse des sucres ajoutés se traduise aussi par une baisse des prix pour les ménages.
Aussi, vous l'aurez compris, les radicaux de gauche et le groupe RRDP se rallient sans hésitation à ce texte empreint de justice, de volontarisme et de raison.
Il est particulièrement louable que la commission des affaires sociales ait saisi cette occasion pour aborder un ensemble d'autres problématiques visant à favoriser et à renforcer encore la qualité globale de l'offre alimentaire outre-mer, et je remercie Mme Vainqueur-Christophe d'avoir porté ce texte.
Il s'agit ainsi de prévoir une égalité de traitement en matière de dates limites de consommation, ce qui relève de la justice basique et du bon sens car, franchement, ce n'est pas parce qu'un produit doit être livré outre-mer que sa durée de vie est subitement supérieure à celle d'un produit consommé en métropole.
Le texte met également en place un nouveau dispositif de soutien aux productions agricoles locales outre-mer, en incitant législativement à leur consommation dans le cadre des marchés publics de restauration collective, ce qui répond non seulement à un objectif évident de développement économique, mais également à des enjeux de traçabilité, de sécurité alimentaire et d'impact environnemental, en encourageant le développement de filières locales et de circuits courts. Il faudra faire de même, messieurs les ministres, pour la pêche et l'aquaculture.
S'agissant d'un texte adapté principalement pour le contexte spécifique des départements d'outre-mer, je me permettrai toutefois de souligner l'importance de prendre en compte les spécificités de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon au moment de l'adoption de l'arrêté prévu à l'article 1er.
Comme vous avez pu le constater lors de votre récent déplacement dans nos îles, monsieur le ministre, et en l'attente du développement des filières de production locale, que j'appelle de tous mes voeux, notre consommation repose toujours en grande partie, malheureusement, sur l'importation de produits canadiens. Il sera essentiel de veiller à ce que les mesures mises en place pour les DOM n'aient pas pour conséquence inattendue de créer des problèmes réglementaires d'approvisionnement en produits canadiens à Saint-Pierre-et-Miquelon. Messieurs les ministres, je sais l'attention que vous portez, ainsi que vos services, à la défense des spécificités de chaque collectivité d'outre-mer et je suis sûre que, forts de cet avertissement et de la volonté du législateur, vous saurez y prendre garde et mener à bien ce grand chantier de justice sanitaire et sociale.
Pour toutes ces raisons, le groupe RRDP votera ce texte sans réserves et se félicite de cette nouvelle démonstration pratique et concrète que notre majorité agit de façon résolue et ambitieuse pour la prise en compte des enjeux spécifiques de l'ensemble des outre-mer. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC et écologiste.)