Intervention de Serge Letchimy

Séance en hémicycle du 27 mars 2013 à 15h00
Prohibition de la différence de taux de sucre outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'ai franchement le sentiment que les choses sont en train d'évoluer. Pour certains élus, il aurait fallu intégrer ces dispositions dans la loi santé qui sera élaborée, mais il faut les situer dans un ensemble.

La proposition a évolué. Au départ, M. Lurel avait présenté un texte sur le taux de sucre, texte fondamental en matière de santé publique, et je ne vais pas revenir sur les arguments ou donner des exemples de taux. Vous l'avez modifié, madame la rapporteure, en amplifiant son caractère législatif, ce qui me semble essentiel, en intégrant l'article 1er dans le code de la santé. Cela permet aussi de répondre aux critiques selon lesquelles on devrait procéder par voie réglementaire. Entre la voie réglementaire et la voie législative, il y a des choix politiques extrêmement importants, nous le verrons tout à l'heure.

Ce texte pose non seulement le problème du taux de sucre, avec ses conséquences sur le diabète et les maladies cardiovasculaires, mais un problème de principe. Comment peut-on tolérer que des êtres humains soient traités de manière différente, au détriment de leur santé, simplement parce que l'on a inventé une espèce de culture labiale, gustative, propre aux Martiniquais et Guadeloupéens, et non à celui qui habite dans l'hexagone ? C'est pour cette raison que le caractère législatif est important, et vous pourrez l'expliquer à vos collègues de l'UMP, monsieur Gibbes, puisque vous êtes de Saint-Martin.

Deuxième pilier essentiel, la date limite de consommation, et il fallait que ce soit une loi qui règle ce problème. C'est en effet un scandale, un grand nombre d'entre vous l'ont déjà démontré : soixante jours pour des produits destinés « aux outre-mer », expression que je n'aime pas trop, et trente jours pour la consommation locale, pour le même produit, élaboré dans les mêmes conditions.

Lorsque l'on va dans le détail, on constate qu'il s'agit en fait aussi d'un problème économique. Les règles de droit ne sont pas respectées, il y a abus de concurrence, trucage. Dans le magasin ou le centre commercial, la personne qui regarde les dates ne peut pas faire de comparaison. De plus, ces produits viennent concurrencer la production locale. Il ne faut pas oublier qu'il y a des yaourts produits localement et que l'on déforme la concurrence. Je suis donc très heureux que le Gouvernement ait accepté un amendement permettant de régler ce problème.

Troisième pilier de ce texte, l'approvisionnement de proximité. C'est très important et les anciens parlementaires savent quelle bataille nous avons déjà menée pour la production locale mais aussi pour l'approvisionnement local.

Le taux de couverture des importations par l'exportation est de 14 % et, lorsque l'on importe 2 à 3 milliards d'euros, on n'en exporte que 325 millions. Pour certains produits de base, la volaille ou les légumes par exemple, la production locale dans la consommation varie de 14 à 20 %.

On introduit une nouvelle dynamique économique pour nos pays, et je souhaite vraiment que ce circuit court, à la limite intégré dans un processus du code des marchés publics – étape qui n'avait été franchie ni dans la LMA ni dans la LME ni dans la loi Grenelle, même si l'on avait posé le socle –, nous donne la possibilité, et c'est un élément considérable, notamment dans la restauration collective, de définir des critères nous permettant de nous approvisionner localement.

Un dernier exemple : 80 % de ce qui est consommé dans les hôtels, et c'est une activité forte dans nos territoires, provient de l'extérieur. Cela signifie que nous sommes déconnectés de nos réalités culturelles dans le cadre d'un secteur porteur d'activité et de travail.

En conclusion, madame la rapporteure, vous réglez non seulement un problème de justice, d'égalité de traitement, mais aussi et surtout un problème de santé publique. Qui plus est, je pense comme Jean-Philippe Nilor que vous engagez un processus économique moderne pour nos territoires, en nous intégrant dans une politique de filières pour sortir progressivement du modèle actuel, un modèle de dépendance non seulement matérielle mais aussi intellectuelle, psychologique, mentale. C'est un acte de bravoure que je salue. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et RRDP.)

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