Intervention de Jean-Marie Le Guen

Séance en hémicycle du 27 mars 2013 à 15h00
Prohibition de la différence de taux de sucre outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Le Guen :

Cher Victorin Lurel, nous avons mené ensemble ce combat sous la législature précédente, convaincus de l'importance de cette question de santé publique dans les outre-mer, et convaincus également que l'impulsion de la régulation devait venir du Parlement.

Ce texte est non seulement le résultat des engagements pris par François Hollande – témoignant par là de son rapport particulier avec les outre-mer –, mais également l'aboutissement d'un combat politique, d'abord mené dans l'opposition.

La lutte contre l'épidémie d'obésité qui touche notre pays, en métropole ou dans les outre-mer, où la situation est encore plus inquiétante que dans l'hexagone, représente aussi un enjeu international. Notre combat est à destination de tous les citoyens qui, sur la planète, n'ont pas toujours à leur tête des gouvernements ou des parlements soucieux de la régulation des activités de l'industrie agro-alimentaire.

Nous avons fait oeuvre de justice, car il était proprement choquant d'imaginer que les populations d'outre-mer soient traitées différemment. Ceux qui s'intéressent à ces problèmes de santé publique et d'obésité savent qu'il nous fallait travailler autour de la question de l'appétence au sucre qui mène peu à peu à la dépendance chez le consommateur : notre action devait donc envisager une régulation.

Le Parlement est, depuis le début, le moteur de la lutte contre l'obésité. À l'occasion de la loi de 2004, relative à la politique de santé publique, un certain nombre de parlementaires, parfois même de la majorité de l'époque – je salue à ce propos notre ancien collègue Yves Bur, qui avait une conscience aiguë de ces sujets –, avaient su imposer au gouvernement d'alors de mener une action de régulation sur la publicité, la distribution des produits et leur composition.

Cette action était politique, car le phénomène est lui-même politique, qu'il s'agisse de l'injustice faite aux ultra-marins, du problème de santé publique ou de la nécessité d'agir par la loi afin de contraindre l'industrie agro-alimentaire à modifier son comportement. Il est regrettable de devoir stigmatiser cette industrie, comme d'autres d'ailleurs, mais elle devrait s'interroger afin d'anticiper des régulations dont la nécessité est évidente. Par exemple, nous nous sommes battus pendant des années pour interdire la publicité alimentaire dans les programmes pour les jeunes enfants. Les industriels ont pris des engagements, mais l'un d'entre eux refuse de les appliquer. Aujourd'hui encore de la publicité pour des produits alimentaires funestes à la santé publique est diffusée dans le cadre de programmes enfantins.

Nous faudra-t-il légiférer une fois de plus ? Ne pouvons-nous pas espérer que les industriels anticipent cette nécessaire régulation, puisqu'ils prétendent vouloir agir de façon contractuelle et refusent une loi qui selon eux serait discriminante ?

Nous menons ce combat pour la santé des enfants, tout particulièrement dans les outre-mer, mais également parce que nous savons que la France a vocation à être un modèle ; c'est-à-dire que nous interpellons les industries agro-alimentaires bien au-delà de nos frontières. Notre action dans les outre-mer peut ainsi être entendue et reprise, notamment dans les pays caribéens ou de l'Asie-Pacifique, particulièrement touchés par l'obésité. Notre message est raisonnable, raisonné et scientifiquement démontré : il est possible de ne pas laisser notre monde sous la domination de forces qui l'entraînent vers des cataclysmes sanitaires. Voyez l'exemple des États-Unis, où 66 % de la population sont en surpoids et un tiers menacé par le diabète, ce qui n'est pas, vous l'imaginez, sans conséquences sur la santé publique et sur les soins.

Pour conclure, je me réjouis de ce projet de loi pour les outre-mer, pour la santé publique, mais également parce que nous montrons, d'une façon raisonnable et raisonnée, qu'il est possible de ne pas laisser le marché nous entraîner vers des formes de civilisation problématiques, qui détruisent et fragilisent l'ensemble de nos sociétés, en remettant en cause la santé humaine ; car si nous légiférons à l'intention d'un certain nombre de nos concitoyens, nous le faisons avec une conscience plus large.

Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir soutenu ce combat dans l'opposition comme dans la majorité désormais.

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