Intervention de Laurent Fabius

Réunion du 12 mars 2013 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères :

Je voyage effectivement beaucoup - j'en suis à mon neuvième tour du monde. Mais en dépit de mes fréquents déplacements, j'estime essentiel d'être à la disposition des commissions du Parlement et du Parlement européen, et de participer aux débats sur les questions d'intérêt commun. M. Glavany a regretté que le débat relatif à la situation au Mali n'ait pas suscité beaucoup d'intérêt chez ses collègues. J'ai jugé ce débat assez vivant, mais c'est au Parlement qu'il revient de définir les modalités de l'exercice de son contrôle de l'action gouvernementale ; je suis ouvert à toute suggestion.

Nul ne sait encore quelle sera la composition exacte du futur gouvernement israélien, question dont je me suis entretenu par deux fois avec le président Shimon Pérès lors de sa visite à Paris ; il est donc trop tôt pour savoir si un ministère sera réellement attribué à Mme Tzipi Livni, et lequel. Je puis en revanche vous indiquer ce qu'il est ressorti de mes conversations avec M. John Kerry, vous dire comment j'appréhende les positions d'Israël et des Palestiniens et préciser ce que veut faire la France.

La visite à Paris du nouveau secrétaire d'État américain s'est déroulée dans une atmosphère très chaleureuse et fructueuse. M. John Kerry est un homme politique expérimenté, qui a une excellente connaissance des questions européennes et françaises et dont la large vision des affaires internationales n'est pas très différente de la nôtre. Il a confirmé que le président Obama se rendra au Moyen-Orient sans que cette visite ait été précédée de nouvelles propositions américaines. L'administration américaine veut s'engager dans la recherche d'une solution au conflit israélo-palestinien fondée sur la coexistence de deux États. M. John Kerry et moi-même avons discuté de ce que pourraient être les rôles respectifs des États-Unis et de l'Union européenne dans ce cadre. Nous avons le même diagnostic : l'occasion est propice à une solution, mais pour peu de temps, car la conjoncture est caractérisée par le développement chaotique des printemps arabes, l'affaiblissement du Fatah par rapport au Hamas, la faible mobilisation de l'opinion publique israélienne à ce sujet lors de la campagne électorale, la situation régionale enfin, avec les répercussions de l'instabilité syrienne.

Du côté israélien, selon ce que m'a dit M. Shimon Pérès, le gouvernement souhaite aborder les questions franchement. Je n'ai pas eu de contacts avec M. Netanyahou au cours des dernières semaines, mais notre ambassadeur en Israël, présent à Paris lors de la visite du président israélien, juge que le gouvernement israélien est effectivement désireux de traiter ces questions. Nous le soutiendrons dans la mesure où les négociations prendront le tour que nous souhaitons traditionnellement : respect du principe de la coexistence de deux États, renoncement au fait accompli en matière de colonisation, dialogue réel avec les Palestiniens.

Nous entretenons des contacts avec le Fatah, organisation avec laquelle on peut tout à fait discuter et avec laquelle nous avons de bonnes relations. Nous avons envisagé l'organisation, le moment venu, de réunions internationales à Paris, et nous l'avons proposé.

Nous sommes donc en contact avec tous les protagonistes, au nombre desquels, très fréquemment, le roi de Jordanie. Ce pays, très durement touché par les conséquences du conflit en Syrie - 20 % de sa population est désormais composée de Syriens – joue un rôle majeur dans la région et peut apporter des éléments utiles à la solution du conflit. Dans les semaines qui viennent, la France essayera de faire progresser la situation en suivant sa ligne traditionnelle qui vise à assurer la coexistence des deux États, à garantir la sécurité d'Israël et à refuser la colonisation.

Je n'ai pas eu connaissance personnellement que des autocars aient été effectivement réservés aux Palestiniens, mais il va sans dire que nous sommes favorables à ce qui peut rassembler et non à ce qui peut diviser. S'agissant des prisonniers politiques, vous connaissez notre position traditionnelle ; je dois recevoir Mme Barghouti, et nous ferons tout pour promouvoir une solution.

Je le redis, il est normal et utile que le Parlement exerce sa mission de contrôle de l'activité gouvernementale et il faut trouver les formes pour le faire, qu'il s'agisse du Mali ou de toute autre question. J'avais le sentiment de m'exprimer assez fréquemment à ce sujet ; si ce n'est pas suffisant, je m'efforcerai de le faire davantage. Sur le fond, j'ai déjà eu l'occasion de dire que lorsque l'on s'intéresse au Mali, il faut prendre en compte trois aspects : le volet sécuritaire, le volet démocratique et ce qui relève du développement.

En matière de développement, un premier rendez-vous est fixé à Lyon, le 19 mars prochain, date à laquelle une conférence sera organisée conjointement par la région Rhône-Alpes, le ministère des affaires étrangères et Cités Unies France. Cette conférence permettra aux représentants des collectivités territoriales menant des activités de coopération au Mali de retrouver leurs partenaires maliens pour traiter avec eux de la reprise de l'aide française au développement de ce pays. J'y interviendrai, ainsi que mon homologue malien, M. Tiéman Coulibaly et bien d'autres personnalités. Puis, en mai, sera organisée à Bruxelles une conférence internationale des pays donateurs, co-présidée par le Président de la République française et par M. Barroso.

Pour ce qui est du volet sécuritaire, le Président de la République, le ministre de la défense et moi-même travaillons en parfaite intelligence. Cette harmonie n'assure pas à elle seule le succès de l'opération au Mali, mais elle y contribue – j'ai en mémoire certains épisodes contraires lors de la précédente législature. Nous échangeons en permanence des informations et, lorsque des décisions importantes doivent être prises, le Président de la République réunit des conseils de défense à l'Élysée, auxquels participent le Premier ministre, le ministre de la défense, le ministre de l'intérieur, moi-même, les chefs des armées et d'autres hauts fonctionnaires lorsque cela est nécessaire. M. Le Drian et moi-même sommes ensuite chargés de l'application des décisions prises et les choses se passent très bien ainsi. Le ministre de la défense et moi-même nous exprimons chacun avec notre style propre, mais nous sommes sur la même ligne.

Vous le savez, les opérations militaires se déroulent en premier lieu dans le massif des Ifhogas, un terrain très difficile où les troupes françaises et tchadiennes accomplissent un travail remarquable. Nous avons compté quelques pertes – toujours trop nombreuses – et les troupes tchadiennes davantage, et nous avons infligé des pertes extrêmement sévères à nos adversaires. Nous avons découvert des armes en masse, ce qui a conduit le chef d'état-major des armées à parler à juste titre d'une « organisation industrielle du terrorisme » au Nord du Mali, avec des ramifications dans beaucoup d'autres pays africains. Nous avons ainsi eu confirmation que certains membres du groupe Boko Haram ont reçu une formation militaire au Mali. Nos troupes et les troupes tchadiennes poursuivent le démantèlement systématique des groupes terroristes, une action dont la difficulté est renforcée par une chaleur extrême.

Le deuxième front est à Gao, où nous n'avons pas affaire à Aqmi mais au Mujao. Il s'agit de narcoterroristes, plus nombreux que ce qui avait été envisagé, et qui mènent des opérations suicides et d'autres opérations bien préparées ; nous devrons, avec les forces africaines, cadrer la résistance qui se manifeste. Enfin, certaines zones forestières à l'Ouest du Mali doivent être surveillées, mais nous tenons les villes.

Les forces de la Misma doivent prendre le relais de nos troupes, et ce n'est pas encore suffisamment le cas. Le général Grégoire de Saint-Quentin pour ce qui nous concerne et le général nigérian Shehu Abdulkadir pour la Misma font un excellent travail à cette fin, et un calendrier a été donné – je me rappelle avoir été le premier à le faire, ce qui, à l'époque, m'avait été reproché. Le retrait des troupes françaises pourrait débuter en avril. Cela ne signifie évidemment pas que tous nos soldats quitteront le pays du jour au lendemain mais, j'y insiste, les troupes françaises n'ont pas vocation à rester au Mali. Nous continuerons d'être présents pour participer à l'opération de maintien de la paix à venir, mais nous ne serons pas stationnés au Mali de toute éternité.

Se pose donc la question de la mission européenne de formation de l'armée malienne commandée par le général français François Lecointre. Deux cent cinquante hommes sont prévus pour l'entraînement et autant pour la protection des formateurs. Une discussion a eu lieu à ce sujet hier, à Bruxelles, au conseil des affaires étrangères. La mission, qui durera six mois, se met en route ; elle permettra que l'armée malienne soit convenablement formée et équipée.

Enfin, nous allons passer du cadre juridique actuel – la résolution 2085 du Conseil de sécurité des Nations unies et l'appel lancé par le président malien au président français dans le cadre de l'article 51 de la Charte des Nations Unies – à un nouveau dispositif diplomatique accepté par tous les membres du Conseil de sécurité : une opération de maintien de la paix. Le vote aura probablement lieu en avril, pour une application deux mois plus tard. Dans ce nouveau cadre, le dispositif est chapeauté et financé par les Nations unies, ce qui n'est pas sans conséquences pour nous. Ce vote permettra la création d'une force de sécurisation – et non d'interposition comme il est parfois dit à tort – comprenant les hommes de la Misma et qui pourra être étendue à d'autres troupes.

J'en viens au volet politique. Nous avons rappelé aux autorités maliennes que, parallèlement à l'engagement de sécurité que nous prenions, une transition démocratique devait être menée à son terme. L'Assemblée malienne a adopté une feuille de route à cette fin, qui doit maintenant être appliquée. Il s'agit d'une part de constituer une commission de dialogue et de réconciliation, dont la création a eu lieu le 6 mars par décret. Composée de représentants des différentes ethnies, la commission aura une tâche difficile mais indispensable car les antagonismes anciens, évidents, doivent être réduits ; c'est aux autorités maliennes qu'il revient de le faire.

La feuille de route fait été d'un deuxième élément sur lequel, sans ingérence, nous devons insister : les élections. Les forces politiques maliennes doivent se convaincre que les votes doivent avoir lieu sans tarder, et pour l'élection présidentielle et pour les élections législatives. La feuille de route a fixé les élections à juillet au plus tard, avant la saison des pluies. Si l'on dépassait ce terme, un problème de légitimité se poserait car le Mali n'a pas connu d'élections depuis longtemps, et rien ne progresserait. J'ai envoyé une mission sur place, qui m'a fait rapport à ce sujet. Sur le plan technique, la tenue d'élections est possible mais les formations politiques maliennes peinent à se mettre en campagne. Différentes personnalités qui participent au gouvernement de transition ne pourront se présenter aux élections ; il n'empêche que des candidats doivent se présenter devant les électeurs. Chacun doit donc se persuader qu'en juillet on votera, partout dans le pays - au Nord du pays aussi. Les élections ne se dérouleront peut-être pas exactement comme en Suisse, mais elles n'en seront pas moins démocratiques et surveillées. Il est essentiel que le délai prévu soit respecté, et chaque formation politique doit être invitée à s'y préparer.

M. Poniatowski m'a interrogé sur certaines de mes décisions relatives à l'administration du ministère. Sur ma proposition, l'ancienne responsable de la direction Afrique-Océan indien a été nommée ambassadrice en Afrique du Sud ; c'est un poste très important. Je souligne que 40% des ambassadeurs dont j'ai proposé la nomination au conseil des ministres concernent des femmes. C'est une proportion sans commune mesure avec la situation actuelle : à ce jour, elles ne comptent que pour 14 % de l'ensemble des ambassadeurs. Pour mener à bien cette politique déterminée, nous nous trouvons face à une difficulté, un décret pris par le gouvernement précédent avec de bonnes intentions ayant un effet pervers : ce texte obligeant à ne nommer ambassadeurs que des personnes ayant eu des fonctions d'encadrement pendant un certain nombre d'années. Il conviendra de prendre en compte ces données à l'avenir.

M. Laurent Bigot occupait le même poste depuis plus de quatre ans. Au ministère, on occupe les mêmes fonctions pendant trois ou quatre ans en moyenne, et j'ai estimé qu'il convenait qu'il soit affecté à un autre poste. M. Jean Félix-Paganon, homme aux compétences précieuses, demeure conseiller diplomatique du Gouvernement. J'ai nommé à la tête de la direction Afrique M. Jean-Christophe Belliard, excellent connaisseur du continent et précédemment ambassadeur à Addis-Abeba, qui fait un travail remarquable dont vous voyez le résultat tous les jours. Et puis, conscient que la situation au Mali requérait les compétences de directions différentes, j'ai créé, sur le modèle des task forces anglo-saxonnes une cellule spéciale Mali-Sahel pour permettre à nos services et à ceux du ministère de la défense de collaborer plus étroitement. Cette méthode fonctionne parfaitement. L'un de nos diplomates les plus compétents, M. Gilles Huberson, a notamment négocié à Kidal un accord définissant les conditions de remise aux autorités maliennes des prisonniers faits par les troupes françaises ; le Mali n'ayant pas aboli la peine de mort, un accord spécifique était nécessaire à ce sujet.

Au ministère, le ministre décide, et j'entends privilégier les compétences. Cela fonctionne très bien ainsi, avec un personnel extrêmement compétent qui sert parfaitement la France et qui est heureux de le faire.

À deux ans du début de l'insurrection, la situation en Syrie demeure épouvantable. Les organismes officiels estiment le nombre de morts à 60 000 ; pour d'autres, on est plus près de 90 000 morts, sinon de 100 000. C'est bien d'un carnage qu'il s'agit. Est recensé un million de réfugiés, ce qui signifie qu'en réalité ils sont bien davantage ; j'ai dit combien ils sont nombreux en Jordanie, mais au Liban aussi plus de 20 % de la population est maintenant d'origine syrienne. Des millions de personnes déplacées vivent dans des conditions effroyables. Tout cela fait écho à la conclusion d'un rapport que je lisais récemment, dont l'auteur écrit que « de plus en plus, la Syrie ressemble à une fosse commune ».

Face à cet échec effrayant, quelle est la position de la France, dont les instruments peuvent évoluer mais dont la ligne reste la même, et qui a toujours souhaité être parmi les premiers pays à prendre des initiatives ? Le conflit syrien a une dimension humanitaire, une dimension politique et une dimension sécuritaire. La bonne solution serait évidemment une solution politique et c'est pourquoi nous avons, les premiers, favorisé la constitution de la coalition nationale syrienne, dont le chef est M. Ahmed Moaz Al Khatib. Lorsque nous avons reconnu la coalition, nous nous sommes heurtés à un fort scepticisme de la part de nos partenaires, notamment européens ; aujourd'hui, en dépit de ses difficultés, la coalition a pris une ampleur qui fait d'elle le pilier de l'opposition. Il faut une force politique alternative au régime de Bachar Al Assad, et la France souhaite un gouvernement issu de cette opposition. La chose est complexe en raison des divisions internes, et cela signifie, outre une reconnaissance internationale, des moyens : un gouvernement n'est possible que s'il dispose de finances – un gouvernement qui ne peut rien faire pour la population ne durera pas – et d'armes pour se protéger des forces de Bachar Al Assad. Qui lui fournira cette aide et ces armes ? Des discussions sont en cours à ce sujet.

La France est sur la ligne politique précédemment définie – le soutien à la coalition nationale syrienne. Les premiers, nous l'avons reconnue ; nous avons reçu, en juillet, ses représentants ; nous avons accrédité son ambassadeur, auquel nous allons dans les semaines à venir donner des locaux. Les premiers encore, nous avons fait passer de l'aide directement aux zones libérées. Ce n'est pas un hasard si les personnalités syriennes qui font défection viennent en France, et nous sommes en contact avec un grand nombre de gens en Syrie même.

Par ailleurs, nous discutons de la situation syrienne avec les Russes, dont le concours est nécessaire pour parvenir à une solution politique. Ce fut notamment le cas lors du voyage en Russie du Président de la République : nous avons évoqué avec nos hôtes une liste de responsables syriens que M. Al Khatib jugerait être des interlocuteurs acceptables. Il a en effet, de manière très audacieuse, fait savoir que s'il n'était pas question pour lui de traiter avec Bachar Al Assad, il le ferait avec d'autres personnes du régime en place, pour trouver une issue à la crise. Nous avons traité de cette question avec les Russes, ainsi qu'avec les Américains. Des échanges se poursuivent qui visent à trouver une solution politique dans la ligne de l'accord de Genève qui, bien que signé, n'a pu être appliqué faute d'une interprétation univoque de ce qu'il signifiait pour Bachar Al Assad.

Mme Ameline m'a interrogé sur l'embargo européen sur les armes à destination de l'opposition syrienne. Sur le plan juridique, la position à prendre en matière d'embargo est définie à l'échelle européenne. L'embargo précédemment décidé est venu à échéance ; le Royaume-Uni et la France se sont dits favorables à son allègement. Chacun comprend l'explication théorique qui sous-tend l'embargo - éviter l'escalade du conflit -, mais un problème se pose si les résistants se font bombarder par les forces du régime alimentées en armes alors qu'eux-mêmes ne le sont pas. Notre proposition s'étant heurtée à l'opposition de nos collègues, nous nous sommes mis d'accord sur le compromis suivant : nous reverrons la question sous trois mois au plus tard et, dans l'intervalle, l'Union européenne permettra un « soutien non létal » plus important aux insurgés et exclura de l'embargo « une assistance technique » destinée à la protection des civils. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que la France souhaite que l'on aille plus loin dans la levée de l'embargo sur les armes destinées aux insurgés. Est-ce contradictoire avec notre volonté d'une solution politique ? Nous ne le pensons pas : pour faire bouger Bachar Al Assad, il faut lui faire comprendre qu'il ne pourra l'emporter par les armes. Pour autant, un consensus européen est nécessaire, je l'ai dit.

S'agissant de la Turquie, j'ai eu avec mon homologue, M. Ahmet Davutoglu, un entretien au cours duquel je lui ai fait savoir que la France est prête à lever son veto sur la négociation du chapitre 22 relatif à la politique régionale dans la discussion relative à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Sans préjuger de ce qu'il adviendra, nous considérons qu'il y a lieu de reprendre langue avec les Turcs. Pour ce qui est des Arméniens, il nous faut à la fois respecter la décision du Conseil constitutionnel et ce que pensent les parties en présence, tout en cherchant à avancer avec la Turquie, pays d'une grande importance, sans méconnaître les questions relatives au respect des droits de l'homme.

La France, qui n'a pas à se prononcer sur ce sujet, n'a pas de position sur la composition du gouvernement tunisien. Mais si l'on élargit la réflexion à l'évolution des différents « printemps arabes », et même en tenant compte du fait que les révolutions ne sont pas des phénomènes linéaires, force est de constater que trois évolutions semblables apparaissent à ce stade : la polarisation de la scène politique entre les forces islamistes et les forces non islamistes, singulièrement en Egypte et en Tunisie ; de graves problèmes de sécurité ; une désorganisation économique complète, qui a des conséquences sociales et politiques. Face à ces facteurs d'instabilité, la France a fait le choix de soutenir les évolutions en cours. Discutant récemment avec mon homologue russe, Sergueï Lavrov, de la situation en Syrie, je lui ai fait observer que l'on ne peut proposer comme seule alternative aux populations les dictateurs ou les terroristes. Il y a un autre chemin que nous n'avons pas à tracer à la place des peuples concernés mais qui ressemble au processus démocratique. Nous n'avons pas à nous ingérer dans les décisions prises par les gouvernements de pays souverains, mais nous devons assumer notre rôle en rappelant quatre principes bien connus : le refus de l'usage de la violence contre le peuple ; la défense des droits fondamentaux - notamment ceux des femmes ; le respect du pluralisme et des droits des minorités ; la nécessité de réformes de fond qui permettront de répondre aux attentes des populations en matière économique et sociale. C'est ce que la France doit favoriser sans s'ingérer dans les affaires intérieures des pays considérés.

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