Intervention de Patrick Devedjian

Réunion du 27 mars 2013 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Devedjian :

C'est un très bon rapport qui ouvre des perspectives et fait réfléchir. Il m'a fait penser au très bon livre de Mme Dominique Schnapper, Une sociologue au Conseil constitutionnel, que je recommande à ceux qui s'intéressent à l'histoire du Conseil constitutionnel.

Il est vrai qu'avec le temps et la question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel s'est transformé. À l'origine, il a été créé pour assurer le respect de l'article 37 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel n'a pas joué ce rôle, mais il en a rempli bien d'autres depuis, ce qui est une bonne chose !

La transformation du Conseil constitutionnel en Cour constitutionnelle est une évolution normale. Elle induit naturellement beaucoup de conséquences. J'ai entendu un peu plus tôt, sur les bancs de l'opposition, des observations sur l'attitude de la Cour de cassation. La réticence de la Cour de cassation vient du poids du Conseil d'État dans le fonctionnement du Conseil constitutionnel, le second étant la courroie de transmission du premier. Le secrétaire général du Conseil constitutionnel est toujours issu du Conseil d'État et promis à l'avenir le plus brillant. Les rapporteurs-adjoints du Conseil constitutionnel en sont pratiquement toujours issus. Il y a là un déséquilibre qui ne va pas sans susciter des questions. Je comprends les réserves de la Cour de cassation même si je ne les approuve pas toujours. Nous devons veiller à garantir l'autonomie intellectuelle du Conseil constitutionnel.

Parmi les pistes présentées dans votre rapport, il y en a une que je trouve intéressante, en l'occurrence le soulèvement d'office d'une QPC par le juge. Cette question mérite sans doute une évolution.

Vous évoquez aussi le passage du nombre de membres de neuf à douze. On peut soupçonner les intentions politiques sous-tendant cette proposition. Je suis favorable à la disparition des membres de droit, même si je ne suis pas certain qu'il faille nécessairement s'inspirer du modèle italien et faire des anciens présidents de la République des sénateurs de droit. Il n'est pas évident qu'il faille leur réserver une place « à vie » dans nos institutions.

La désignation du président du Conseil constitutionnel par le président de la République, qui n'a pas été abordée, est une vraie question. J'observe que lorsque le président de la République est réélu, celui qui préside l'organe qui juge ses comptes a souvent été nommé par lui. Cela pose un problème d'impartialité qui invite à réfléchir à la question de la nomination du président du Conseil constitutionnel.

L'utilité du Tribunal des conflits me paraît faire débat à présent. Le Conseil constitutionnel pourrait très bien remplir les fonctions qui sont les siennes actuellement.

Je suis d'accord avec la règle proposée pour les nominations, à savoir la désignation par les commissions parlementaires aux trois cinquièmes positifs. Le soupçon ne sera pas totalement écarté mais cela constituerait néanmoins un vrai progrès.

Il faut effectivement qu'un seuil minimal de compétences juridiques soit requis pour les membres même si je constate que la pratique a évolué positivement sur ce point. Peut-être faudrait-il toutefois inscrire la règle dans notre droit.

Un point important n'a pas été abordé : les membres du Conseil constitutionnel sont presque toujours issus de la fonction publique. Je pense qu'il serait utile de prévoir une plus grande diversité afin de prévenir le corporatisme et de disposer d'une meilleure ouverture sur la société. Il n'est pas interdit d'y nommer des chefs d'entreprise, des avocats, etc.

En conclusion, je souhaiterais dire que puisque la question prioritaire de constitutionnalité fait l'unanimité, je ne peux pas m'empêcher de dire ma fierté d'appartenir à la majorité qui l'a mise en place. En tout état de cause, c'est un très bon rapport qui invite à la réflexion.

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