Ce serait faux de l'affirmer, ce serait faire montre d'un manque d'humilité et ne pas respecter le travail qui a été accompli pendant de nombreuses années, en particulier depuis l'action de Jacques Delors.
Toutefois, à un moment donné, certains l'ont dit, il faut passer des successions de réformes, chacune utile, à une vision globale et la plus pérenne et efficace possible. Telle a été l'ambition des partenaires sociaux au moment où ils ont souhaité que, dans cet accord sur la sécurisation de l'emploi, figure parmi les piliers mêmes de la sécurité sociale professionnelle la question de la formation.
Pour répondre à une question qui m'a été posée, c'est la raison pour laquelle il était indispensable que dans un texte comme celui-ci cet aspect de la sécurisation de l'emploi et plus précisément du parcours professionnel et individuel soit présent.
Plusieurs d'entre vous ont regretté que certaines précisions ne figurent ni dans l'accord ni dans le texte, mais nous ne pouvions pas intégrer l'ensemble des éléments relatifs à ce point dans l'immédiat. Vous aviez donc raison de le souligner ; je préfère néanmoins parler non pas d'imprécision mais d'ouvertures sur l'avenir – je préciserai ensuite le calendrier qui sera retenu –, indispensables pour permettre à tous les acteurs de trouver les solutions adaptées les plus pérennes et les plus efficaces possibles dans un délai qui soit le plus court possible.
Tel qu'il est prévu à la fois dans l'accord du 11 janvier 2013 et dans le projet de loi, le compte personnel de formation suscite des interrogations et appelle quelques précisions ; c'est d'ailleurs l'objet de certains des amendements dont nous aurons à discuter.
Sur quoi portent ces questions ? Elles concernent en premier lieu le contenu précis du compte personnel de formation : quels types de formations seront proposés pour quels types de publics ?
Elles ont également trait aux espèces sonnantes et trébuchantes qu'on aura envie de mobiliser pour ces comptes, aux mécanismes financiers qui seront utilisés pour leur fonctionnement. S'il faudra éclaircir les rôles de chacun des nombreux acteurs légitimement compétents en matière de formation – les partenaires sociaux, l'État, Pôle emploi, les régions, etc. –, il faudra également tenir compte de la complexité des mécanismes de financement, une complexité qui ne devient gênante que lorsqu'elle est un obstacle à l'efficacité. Le financement doit en particulier servir la justice sociale : les moyens doivent être accordés à ceux qui ont le plus besoin d'être formés – les jeunes sans formation, ceux qui ont perdu leur emploi, ceux qui au sein des entreprises ont des niveaux de formation faibles – car ce sont les premiers, en cas de crise ou de difficulté, à être licenciés. Tel est l'objectif qui nous rassemble, et il nous faudra par conséquent répondre à ces questions.
Nous ne pouvions pas, vous le savez, y répondre aujourd'hui.
Permettez-moi à présent de baliser les étapes que nous suivrons dans les mois qui viennent et de vous donner des précisions sur les points suivants : avec qui ? Quand ? À quel horizon ?
Nous souhaitons – et c'est aussi la volonté du Président de la République – que la prochaine grande conférence sociale, qui aura lieu au cours de l'été prochain, permette aux partenaires sociaux et aux collectivités locales – la caractéristique de cette conférence sociale est d'être ouverte également aux collectivités locales, en particulier aux régions – d'initier la concertation indispensable pour entamer ensuite une nouvelle négociation nationale interprofessionnelle dans le domaine de la formation professionnelle. Le contenu du compte personnel de formation sera alors précisé. La négociation entre partenaires sociaux est une obligation légale, mais il me semble que, au-delà de cette obligation, c'est une bonne chose.
Dans les semaines qui suivront la conférence sociale, j'adresserai aux partenaires sociaux un document d'orientation qui définira les grands axes de la négociation, qui en précisera les objectifs et, éventuellement, proposera un certain nombre de solutions aux partenaires sociaux, afin qu'ils puissent mener et conclure la négociation dans de bonnes conditions.
À quel horizon aboutira cette négociation ? Nous avons retenu un horizon suffisamment lointain pour leur permettre de travailler sérieusement, mais suffisamment proche – il est fixé bien avant la fin de cette année – pour que le projet de loi permettant de donner un contenu concret, en particulier sur le plan financier, au compte personnel de formation soit déposé à l'Assemblée nationale et discuté devant le Parlement à la fin de l'année. C'est précisément ce qu'a indiqué Jean-Patrick Gille dans son intervention.
Évidemment, la négociation ne devra pas inclure seulement les partenaires sociaux, mais aussi d'autres acteurs, en particulier l'État et les régions, dont il faudra d'ailleurs clarifier les compétences dans ce domaine.