Je crois, monsieur Chassaigne, que ce projet va au-delà de ce que nous avons porté ensemble. Aujourd'hui, vous venez de le rappeler vous-même, la possibilité de mettre en place un plan social est une prérogative du chef d'entreprise, de manière unilatérale, avec une procédure d'information et de consultation. Demain, il faudra soit l'accord des salariés – vous parlez dans votre amendement d'un droit de veto, mais votre demande n'est-elle pas déjà satisfaite, avec l'exigence de l'accord des syndicats représentant plus de 50 % du personnel ? –, soit l'accord de l'administration. Je ne sais si vous mesurez bien la conséquence de la non-homologation administrative : c'est la nullité de la procédure, qui empêche tout licenciement !
Je comprends les inquiétudes de M. Guaino – j'en profite pour reconnaître, monsieur Cherpion, que j'ai un peu simplifié le débat tout à l'heure –, car un pouvoir très important est désormais conféré à l'administration. C'est pourquoi j'ai parlé d'un vrai changement en profondeur, qui va non seulement dans le même sens, mais plus loin que tout ce que nous avons défendu ensemble – même si ce n'est pas exactement le dispositif que vous défendez, monsieur Chassaigne.
On ne peut pas dire qu'il y aura moins de juges dans la procédure, ce qui était effectivement un objectif poursuivi par le MEDEF. La première version de l'accord, mise sur la table par le MEDEF le 14 octobre 2012, fait très clairement apparaître le souhait que l'administration donne son accord sur la procédure – pas sur le fond : il ne s'agit que d'une formalité administrative, un simple coup de tampon –, ce qui interdit ensuite tout recours. Dans notre projet, le juge des prud'hommes et judiciaire – sur le motif individuel après un licenciement – demeure, et ses pouvoirs restent entiers. Un deuxième juge, administratif, intervient ensuite : on ne peut pas parler d'un désengagement des juges, puisqu'il y en aura désormais deux au lieu d'un. Tout cela avec un seul objectif : agir le plus en amont possible, faire peser tout le poids de l'administration pour tenter de trouver des solutions de nature à éviter les licenciements, plutôt que de tenter de réparer après coup ce qui a été fait.