Intervention de Maître Linda Weil-Curiel

Réunion du 2 avril 2013 à 17h30
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Maître Linda Weil-Curiel, avocate au Barreau de Paris :

Je n'approuve pas du tout l'expression de mutilations génitales féminines – bien qu'il figure dans un certain nombre de textes. C'est un anglicisme. L'Académie de médecine a d'ailleurs entériné en 2004 celle de mutilations sexuelles féminines. En effet, les actes dont il est question ne s'attaquent pas à la fonction reproductrice, mais à la vie sexuelle et au plaisir féminin procuré par le clitoris, qui est un organe sexuel, et non génital. Je suis donc irritée que même en France, on parle de mutilations génitales féminines. Nous devrions mieux défendre notre langue ! On ne parle qu'anglais dans les forums internationaux ; il faut souvent plusieurs mois pour que les textes soient disponibles en français. Par exemple, le dernier rapport de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), qui porte sur les mutilations sexuelles – genital dans le texte – féminines, n'est disponible qu'en anglais. Alors que la France est pionnière en matière de lutte contre les mutilations sexuelles féminines, mais aussi de prévention, pas un seul Français ou une seule Française n'a contribué à cette étude, qui aborde la question des poursuites pénales.

Mon expérience en la matière remonte à 1982. À l'époque, nous n'avions pas tous ces textes, qui sèment la confusion dans la mesure où ils peuvent être contradictoires et offrent la possibilité d'ergoter sur leur application. La mutilation est reconnue comme un acte de nature criminelle par le code pénal ; et selon le dictionnaire, l'excision est une mutilation. J'ai donc pu plaider que l'excision devait être jugée par la cour d'assises, et qu'il n'y avait pas lieu de distinguer entre la mutilation de tel ou tel organe et la mutilation sexuelle infligée à une petite fille noire. S'il s'agissait d'une petite fille blanche, il n'y aurait aucune hésitation : ce serait un scandale et un crime. C'est ainsi que j'ai commencé il y a trente ans. Les textes sont explicites. Je dois dire que le code pénal, tel qu'il existait avant la réforme de 1994, se lisait et se comprenait aisément.

Le projet de loi dont vous me parlez introduit dans le code pénal un nouvel article 227-24-1 ainsi rédigé : « Le fait de faire à un mineur des offres ou des promesses ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, ou d'user contre lui de pressions ou de contraintes de toute nature, afin qu'il se soumette à une mutilation sexuelle est puni, lorsque cette mutilation n'a pas été réalisée, de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. »

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