Intervention de Maître Linda Weil-Curiel

Réunion du 2 avril 2013 à 17h30
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Maître Linda Weil-Curiel, avocate au Barreau de Paris :

Il ne s'agit pas seulement d'argent dans ces pratiques, mais aussi d'avantages, parmi lesquels – je parle ici des mariages forcés – la nationalité française ou le droit au séjour.

En France, être exciseuse est très rémunérateur. Mais c'est aussi un statut social. Ces sociétés sont encore organisées en castes – les tisserands, les pêcheurs… Les forgerons sont investis d'un grand nombre de pouvoirs. Ce sont eux qui manient le métal. Les hommes circoncisent donc les garçons, tandis que les femmes – celles qui ont été initiées – ont le devoir social d'exciser. J'ai été surprise, au début de mon combat, d'entendre les parents – qui ne dénoncent bien sûr jamais l'exciseuse – expliquer que c'était pour elle un devoir social. Elle leur « doit » ce service. En 1999, lors d'un procès retentissant en cour d'assises – il y avait 24 parents dans le box des accusés – l'exciseuse, qui avait été dénoncée par une jeune victime, s'est défendue en expliquant qu'elle « devait ce service à ces nobles parents ». De fait, c'est son rôle, sa fonction sociale. On peut certes faciliter la reconversion de ces femmes, mais cela ne les dispensera pas de ce devoir aux yeux de leurs compatriotes. Pour l'anecdote, l'exciseuse dont j'avais obtenu la condamnation à huit ans de prison lors de ce procès, Hawa Gréou, a aujourd'hui rallié notre cause. Elle a le courage de s'exprimer dans les médias, alors qu'elle a été exclue de sa famille et de son cercle social. C'est moi qui l'ai défendue face à son mari pour lui obtenir une pension alimentaire qui lui permet de survivre. Elle a réfléchi : la prison lui a fait du bien.

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