Intervention de Jean-Louis Bricout

Séance en hémicycle du 11 avril 2013 à 21h45
Prorogation de l'éco-participation pour les équipements électriques et électroniques ménagers — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord saluer le travail du rapporteur. En effet, si la proposition de loi qui est aujourd'hui soumise à l'examen de notre assemblée fait l'objet d'un seul et unique article, elle n'en demeure pas moins essentielle.

Pour le comprendre, peut-être est-il judicieux de remonter à la création de cette filière spécifique que constitue la filière de gestion des déchets d'équipements électriques et électroniques, dite D3E. Celle-ci a été mise en place il y a maintenant sept ans, dans la droite ligne de ce qu'imposait le droit européen, qui était alors soucieux de responsabiliser les producteurs de produits électriques et électroniques ménagers quant à la durée de vie de leur produit.

Cette filière innovante fonctionne, car elle repose sur des éco-organismes, dont la mission consiste d'abord et avant tout à gérer de façon mutualisée les flux de déchets des D3E. Il s'agit d'une filière innovante, qui est appelée à se développer encore davantage, comme en témoignent les chiffres que les précédents orateurs ont déjà évoqués, mais qu'il me semble tout de même pertinent de rappeler.

Selon une étude de l'ADEME publiée en 2010, ce sont 600 millions d'équipements qui sont déclarés mis sur le marché chaque année, ce qui représente plus de 1,6 million de tonnes – soit 25 kg par an et par habitant – dont 80 % sont de type ménager. Le gisement annuel des D3E ménagers se situe donc entre 16 et 20 kg par an et par habitant.

Il existe aujourd'hui près de 4 000 points de collecte, dont la récolte était estimée à 371 000 tonnes en 2009, soit l'équivalent de 5,7 kg par an et par habitant. C'est dire si nous avons encore la possibilité de progresser, en faisant évoluer nos comportements et nos habitudes individuelles et collectives face à la question de la gestion des déchets en général.

J'ai souligné, au début de mon intervention, l'importance de cette proposition de loi, dont nos collègues sénateurs sont à l'origine. Importante, elle l'est assurément, au regard des enjeux qu'elle soulève en termes de compétitivité et d'emploi pour notre pays. Nos concitoyens ne savent peut-être pas – et je veux y insister fortement – que la filière possède un atout non négligeable, qui réside dans sa dimension sociale. Elle génère en effet un grand nombre d'emplois d'insertion, dont notre pays a besoin.

J'en veux pour preuve une initiative qui a vu le jour dans le département de l'Aisne, où je suis élu : à Soissons, l'atelier Recycl'@isne, qui a d'abord pris la forme d'un chantier d'insertion, puis d'une entreprise d'insertion, s'est spécialisé dans le reconditionnement et le recyclage des déchets informatiques récupérés dans une vingtaine de points de collecte à travers le département. Ces tâches sont assurées par neuf salariés, dont six sont reconnus comme étant des travailleurs en situation de handicap. Au passage, on notera à bon escient, et à l'attention de qui en douterait, que l'insertion de tous par le travail est une réussite.

De toute évidence, la prorogation du mécanisme d'éco-participation, qui permet d'en garantir le financement, est un enjeu majeur pour consolider une filière à haute qualité environnementale et à fort gisement d'emplois, en particulier dans nos territoires ruraux, dont je suis ici l'un des représentants. Ces territoires souffrent, et cette filière leur permet d'amorcer leur désenclavement. Par ailleurs, en ces temps où la crise et ses conséquences ont parfois tendance à nous faire douter de nous-mêmes, nous avons là un formidable exemple de coopération réussie entre tous les grands acteurs : l'État, la région et le département. Il s'agit d'un système vertueux et, parce qu'il est vertueux, son développement doit être encouragé. À ce propos, je souhaite aborder successivement deux points, qui débordent certes le cadre de cette proposition de loi, mais qui doivent néanmoins trouver leur place dans nos esprits et dans nos débats.

Premièrement, je pense effectivement qu'il ne suffit pas de consolider les filières de recyclage, et qu'il faut aussi, et peut être surtout, agir en amont. Nous devons nous assigner pour objectif de repenser notre modèle économique, qui montre aujourd'hui ses limites. Madame la ministre, je ne doute pas un seul instant que vous partagiez cet objectif : s'il n'est pas trop tôt, pouvez-vous nous indiquer les actions conjointes que vous comptez mener, en matière d'obsolescence programmée, avec M. le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation, dans le cadre du futur projet de loi sur la consommation ? Nous devons lutter contre la désuétude planifiée des produits et contre la surconsommation contrainte qu'elle génère.

Deuxièmement, je pense que notre réflexion commune sur la gestion des déchets doit s'inscrire de façon plus globale dans le cadre de l'élaboration du plan « Déchets 2020 ». Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

En conclusion, nous sommes capables de nous rassembler – les débats qui ont eu lieu au Sénat l'ont également montré – sur un sujet qui pourrait sembler mineur, mais dont on perçoit bien les multiples implications. Étant donné les défis qui nous attendent dans ce domaine, il importait que nous ayons, comme ce fut le cas en commission, un débat serein et constructif.

Pour ma part, je souhaite vivement le prolonger, et j'apporte mon plein et entier soutien à l'adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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