J'ai découvert le rôle qui est aujourd'hui le mien à la Caisse des dépôts et consignations, très ancienne institution publique, lorsque vous m'avez désigné, chers collègues, avec Marc Goua et Arlette Grosskost, pour siéger à sa commission de surveillance.
Les pouvoirs de cette commission – qui n'est pas un conseil d'administration – ont été renforcés par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008. Lui a notamment été confié le rôle de veiller sur le modèle prudentiel de la Caisse des dépôts et, de manière plus générale, sur ses investissements stratégiques, ses prises de participation, la gestion du fonds d'épargne. Elle a également une responsabilité particulière en matière d'émission d'emprunts.
Le périmètre d'intervention de la Caisse des dépôts est très étendu, surprenant parfois même, et son mode de fonctionnement particulier. Elle gère à la fois les dépôts de fonds des notaires, les encours centralisés du livret A, des encours d'assurance-vie au travers de CNP Assurances, et intervient, à travers ses filiales, dans bien d'autres domaines.
J'en viens sans plus attendre aux comptes 2012. Le directeur général, avec l'approbation de la commission de surveillance, a fait le choix d'apurer les comptes de la Caisse des dépôts. Selon sa propre expression, il s'est agi de « passer la paille de fer ». Des provisions ont dû être passées pour tenir compte d'importantes dépréciations sur plusieurs participations. Ainsi le Fonds stratégique d'investissement – FSI –, détenu à 51 % par la Caisse des dépôts, a-t-il dû intégrer la dépréciation de sa participation dans France Télécom, dont l'État lui avait apporté une partie du capital lors de sa création. La Caisse des dépôts a également été pénalisée par la dépréciation du groupe de transports publics Veolia-Transdev, et bien sûr de Dexia. Il a fallu compter également avec la situation de la Société d'aménagement urbain et rural – SAUR.
En 2012, pour la deuxième fois en cinq ans, les comptes consolidés de la Caisse des dépôts laissent apparaître une perte, de 458 millions d'euros, moins élevée toutefois que celle enregistrée en 2008. Les comptes sociaux en revanche restent bénéficiaires. Le modèle de la Caisse des dépôts a fait preuve d'une bonne résistance, le bénéfice récurrent avoisinant 1,6 milliard d'euros. En raison de ses pertes, la Caisse des dépôts n'octroiera pas de dividende à l'État cette année. Elle lui versera en revanche plus de 500 millions d'euros au titre de la contribution représentative de l'impôt sur les sociétés – CRIS.
L'assainissement des comptes était nécessaire. La Caisse des dépôts n'avait guère le choix. Si la provision pour dépréciation de France Télécom n'avait pas été constituée cette année, elle aurait dû l'être l'année prochaine, et comme France Télécom est apportée à la BPI, c'eût été prendre le risque de mettre celle-ci en perte lourde pour sa première année d'activité.
Marc Goua, Arlette Grosskost et moi-même représentons l'ensemble des députés à la commission de surveillance. Nous devons vous rendre compte de notre travail et vous, vous devez nous aider à garder une distance suffisante par rapport à des choix souvent imposés par l'exécutif et qui, par le passé, hélas, n'ont pas toujours été heureux. S'appuyant sur le Parlement au travers de la commission des finances, la commission de surveillance doit dire ce qui est possible et ce qui ne l'est pas. Un dossier est actuellement sur la table, qui pose problème : celui de la SNCM. La Caisse des dépôts n'est guère allante pour participer à un sauvetage qui pourrait la placer de nouveau en déficit. Gros émetteur sur les marchés financiers, elle doit en effet veiller à préserver son image et sa réputation.
En 2012, la Caisse des dépôts a battu son record de prêts. Cela s'explique à la fois par les disponibilités nées du doublement du plafond du livret A et par la demande. Elle est venue au secours des collectivités locales au moment où Dexia a fait défaut, au travers de prêts mais aussi de sa participation dans la nouvelle banque des collectivités, la Société de financement local – SFIL –, dont elle détient 20 % du capital, aux côtés de l'État à 75 % et de La Banque postale à 5 %. Finançant la trésorerie de la SFIL – un prêt de 11 milliards d'euros lui a été accordé – et garantissant sa capacité à émettre des obligations, la Caisse des dépôts se trouve de nouveau en première ligne non comme prêteur direct aux collectivités, encore qu'elle le fasse par le biais du fonds d'épargne, mais comme co-actionnaire du prêteur.
Je profite de l'occasion pour dire qu'il faudra se pencher sur le sujet des collectivités qui espèrent faire annuler en justice les taux d'intérêts de certains prêts octroyés par Dexia – une décision de première instance a déjà été rendue en la faveur de l'une d'entre elles. Autant il est légitime de chercher à éviter que des collectivités en grand danger ne connaissent un sort funeste, autant il serait anormal qu'une prise en charge générale par l'État aboutisse à ce que les contribuables des collectivités bien gérées aient à payer pour ceux de collectivités mal gérées. Il faut trouver le moyen d'une sécurisation juridique. Nul, ni à la commission de surveillance ni à la direction générale, n'était enthousiaste à l'idée d'une participation de la Caisse des dépôts au capital de la SFIL. La Caisse des dépôts n'y est entrée qu'à hauteur de 20 % avec des actions de préférence, si bien qu'elle ne serait pas appelée en cas de recapitalisation éventuelle.
En conclusion, je redis être à votre disposition, ainsi que les deux autres députés membres de la commission de surveillance, pour répondre à toutes vos questions quand vous le souhaitez. À l'inverse, la commission de surveillance doit pouvoir s'appuyer sur vous.