Ce peuple, vous ne voulez pas l'écouter, vous l'aviez sous-estimé et même méprisé. Vous préférez transformer la société française dans son dos et sans un vrai débat national.
Aujourd'hui, les choses ont changé. Ce peuple, vous en avez peur. Et c'est précisément la raison pour laquelle vous avez décidé d'accélérer les choses.
Le 13 janvier dernier, une première manifestation a rassemblé des centaines de milliers de personnes venues de toute la France pour battre le pavé parisien et manifester en famille contre votre projet.
En février dernier, je rappelle que 700 000 signataires opposés au mariage dit pour tous ont demandé au Conseil économique, social et environnemental de donner son avis sur votre texte. Cet avis, vous avez tout fait pour qu'il ne puisse pas le rendre. Cette pétition historique est restée lettre morte à la demande de Matignon.
Le déni de démocratie ne s'arrête pas là.
Le 24 mars dernier des manifestants encore plus nombreux ont à nouveau défilé dans les rues de la capitale. Mais, une fois de plus, vous avez refusé d'enlever vos confortables oeillères pour éviter de regarder la réalité en face.
« Au-dessus d'un million de personnes dans la rue, le régime vacille », disait François Mitterrand. Craignant que cette prophétie ne se réalise à nouveau, vous avez préféré accélérer le calendrier parlementaire pour éviter une nouvelle manifestation qui était prévue le 26 mai, et dont vous craigniez l'ampleur et le succès.
Récemment, un sondage paru dans le quotidien Le Parisien a révélé que 55 % des Français sont défavorables au mariage et à l'adoption par des couples homosexuels.
Dans vos propres rangs, malgré les ordres que vous avez donnés, votre projet de loi a été violemment contesté par des élus qui souhaitent maintenir ce repère fondamental que constitue la famille, et qui considèrent eux aussi que chaque enfant a le droit d'avoir un père et une mère.
Mais ces divisions, vous les avez masquées au Sénat par l'intermédiaire d'un vote à main levée, indigne de la Haute assemblée.
Que dire de plus ? Pris de panique, vous avez décidé de changer de stratégie et d'effectuer un passage en force. La tactique est simple : après avoir bâillonné le peuple, il s'agit de bâillonner ses représentants. Voilà une bien curieuse conception du débat !
D'ailleurs, la porte-parole du Gouvernement a elle-même avoué les consignes qui avaient été données : « en finir avec le débat sur le projet de loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe ».
En finir à quel prix ? Ce n'est pas en donnant l'ordre d'arrêter les manifestants à votre projet que vous parviendrez à vous faire entendre. Comme s'il s'agissait de trafiquants ou de grands criminels qui, eux, agissent pendant ce temps-là en toute impunité. Est-ce que vous vous rendez compte que c'est l'image de la France et de notre démocratie que vous êtes en train de ternir ?
Affaiblis par votre incapacité à résoudre une crise sociale, vous avez provoqué avec ce projet une véritable crise morale et divisé les Français. Car c'est bien ce dont il s'agit, mes chers collègues, vous ne rassemblez pas les Français, vous les divisez. Dans ces conditions, comment le chef de l'État peut-il prétendre être « le Président de tous les Français » ?
Quant au texte que nous examinons aujourd'hui, il offre désormais au Gouvernement la possibilité de légiférer par ordonnance, afin de court-circuiter le débat parlementaire. Une raison supplémentaire, s'il en fallait, pour m'opposer avec force à ce texte.
« Moi, Président de la République, j'engagerai de grands débats », disait le candidat socialiste durant la campagne présidentielle. Sans doute aurait-il dû préciser que ces débats seraient strictement réservés à la petite minorité qui partage aujourd'hui vos convictions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)