Intervention de Marie-George Buffet

Séance en hémicycle du 23 avril 2013 à 15h00
Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-George Buffet :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la garde des sceaux, chers collègues, dans quelques instants, par un vote solennel, nous allons ouvrir à toutes et tous, le droit au mariage. C'est une avancée majeure dont notre pays peut être fier.

Depuis des années, des hommes et des femmes se battent contre les discriminations liées à l'homosexualité. Le coeur de ce combat n'est pas la reconnaissance d'un statut particulier, spécifique : il est seulement une formidable exigence d'égalité.

Notre République est fondée sur ces valeurs : liberté, égalité, fraternité. Elle ne peut admettre que des discriminations frappent ses enfants. En France, l'homophobie est un délit. La justice aura à le rappeler aux individus et aux groupuscules d'extrême droite, auteurs ces derniers jours de violences homophobes.

Mais notre République doit aller plus loin. Elle doit assurer l'égalité des droits. C'est l'objet de ce projet de loi.

Le débat sur le mariage pour les couples de même sexe est depuis très longtemps présent dans la société. Il a permis à l'égalité de se frayer un chemin dans le dédale de tous les a priori et préjugés. Il était temps de légiférer. Nos échanges, à part quelques moments de tension, ont porté sur le fond. Le débat a fait appel à des pans entiers de notre expérience sociale et humaine. Face à la vision statique de la famille exprimée par les opposants au texte, nous avons donné à voir son évolution au fil de l'histoire. La famille a bougé. Les femmes sont sorties de leur statut premier de reproductrices grâce à leur combat contre le patriarcat. Elles ont gagné leur indépendance et la maîtrise de leur fécondité. La famille s'est conjuguée, monoparentale, homosexuelle, et s'est recomposée. Aussi est-il temps de mettre le droit en accord avec le fait.

Les opposants au texte nous présentent le mariage comme une institution basée sur l'altérité – un père et une mère – et sur la filiation, alors que, d'ores et déjà le mariage est un droit, le droit pour chaque individu, quelle que soit son identité sexuelle, de se donner un projet de vie avec la personne qu'il aime et de fonder famille.

Tout au long de ce débat, l'opposition a opposé au mariage pour toutes et tous le droit des enfants. Mais justement, cette loi va permettre à de très nombreux enfants d'avoir enfin des parents de plein droit, et d'être donc des enfants de plein droit. Car ce qui importe le plus, pour les enfants, c'est bien l'amour qui les entoure, la démarche éducative, la protection accordée par leurs parents. Les droits des enfants, ce sont le droit à la santé, le droit à l'éducation, le droit au bien-être, quelle que soit l'identité sexuelle de leurs parents.

Hier, dans le journal L'Équipe, l'ancienne attaquante de l'équipe de France de football Marinette Pichon disait de très belles choses en faveur de ce projet de loi. Je vous conseille, mesdames les ministres, si vous n'êtes pas lectrices habituelles de l'Équipe, de vous pencher sur cet entretien ! (Sourires.) Marinette Pichon y dit qu'elle veut simplement vivre sa vie, pas prendre les droits de Pierre, Paul ou Jacques. Elle termine en disant qu'elle a une femme qu'elle aime et qui l'aime, un grand garçon bien dans sa peau et équilibré, qu'elles ont réussi à construire leur petite famille avec leurs convictions et leurs valeurs, et qu'elles sont heureuses…

Mesdames les ministres, vous avez mené un très beau combat. C'est un bonheur de pouvoir voter votre projet de loi et ainsi d'assurer à toutes et tous la possibilité de vivre leur amour en toute quiétude, dans une société plus humaine. Comme de nombreux élus, j'ai hâte de célébrer les premiers mariages de ceux et celles qui me l'ont déjà demandé. Alors s'il vous plaît, mesdames les ministres, ne tardez pas sur le décret et la circulaire : marions-les, marions-les dès l'été ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SRC, écologiste et RRDP, dont de nombreux membres se lèvent. – Clameur dans plusieurs tribunes du public, où une banderole est déployée. – Huées sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion