Intervention de Patrick Devedjian

Réunion du 24 avril 2013 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Devedjian :

Je prends acte des propos pondérés du rapporteur. Le principe de l'amnistie n'est pas en cause, mais la rédaction du texte soulève plusieurs difficultés graves.

S'agissant de l'article 1er A, il ne convient pas de laisser au Conseil d'État le soin de définir les conditions de l'amnistie prévue par cet article, sauf à s'exposer à la censure du Conseil constitutionnel. Il serait également utile de préciser quels sont les « mineurs » visés par cet article afin de lever toute ambiguïté. Cela étant, l'amnistie de faits datant de 1948 et de 1952 ne pose pas de problème.

L'article 1er prévoit en revanche l'amnistie de faits commis jusqu'au 1er février dernier ! Vous avez qualifié la loi d'amnistie de loi d'oubli. Dans le cas présent, il conviendrait plutôt de parler de « loi Alzheimer » ! Il n'est pas raisonnable d'amnistier des infractions datant de moins de trois mois.

Dans ce même article, sont exclues du bénéfice de l'amnistie la diffamation et les menaces à l'encontre des seules personnes dépositaires de l'autorité publique. Je comprends cette exception dans le cas des menaces, mais il est amusant de voir qu'on pourrait diffamer impunément n'importe qui, sauf ces dépositaires de l'autorité publique qui formeraient ainsi une sorte de noblesse, mieux protégée que toutes autres personnes.

La référence au livre III du code pénal aboutirait comme on l'a dit à amnistier de trop nombreuses infractions, mais vous y remédiez par votre amendement CL 7, semble-t-il, monsieur le rapporteur.

Aux termes du deuxième paragraphe de l'article 4, « l'inspection du travail veille à ce qu'il ne puisse être fait état des faits amnistiés ». Autrement dit, ces faits ne pourront être invoqués dans aucune instance, ce qui privera leurs victimes de toute possibilité de réparation au civil. C'est audacieux…

Enfin, l'article 11 dispose que l'amnistie « entraîne la suppression des empreintes génétiques issues des traces biologiques recueillies dans les fichiers de police ». Pour ma part, je ne jugerais nullement humiliant que mes empreintes figurent dans un tel fichier. Vous prenez là le risque de priver la police de moyens d'investigation !

Pour toutes ces raisons, je considère que ce texte n'a pas été convenablement réfléchi.

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