Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, les échanges de vues très variés auxquels cette proposition de loi a donné lieu, de même que le dépôt d'une motion de renvoi en commission de ce texte témoignent bien de l'intérêt que nous portons tous à cette question. Dans le même temps, ils démontrent la nécessité de ne pas la traiter d'une manière isolée et hâtive.
Le Gouvernement est très attaché à la préservation du niveau de vie des retraités dans leur ensemble, et parmi eux à celui des bénéficiaires du minimum vieillesse. Permettre aux bénéficiaires de ce minimum social qui le souhaitent d'augmenter le niveau de leurs ressources en cumulant des revenus d'activité avec leur allocation peut donc apparaître comme une solution pragmatique.
Il m'apparaît toutefois important de ne pas s'en tenir à cette première analyse. Elle conduit en effet à aborder la question de manière trop rapide et partielle.
Trop rapide, car à l'heure actuelle, nous ne disposons pas de données permettant de mesurer l'impact d'une telle mesure. Combien d'assurés y auraient recours ? Pour quelle durée ? Dans quels secteurs d'activité ? Les pistes successivement évoquées comme, par exemple, les recrutements liés à la réforme des rythmes scolaires ou le remplacement des débitants de tabac n'ont pour l'instant fait l'objet d'aucun chiffrage, ni d'aucune analyse. La seule indication disponible concerne le nombre de bénéficiaires du minimum vieillesse au régime général qui perçoivent un salaire. Ils sont 1 % à ce jour.
Il est légitime de penser que ce nouveau droit serait en tout état de cause utilisé de façon marginale, pour au moins deux raisons. La première est que le public concerné est âgé en moyenne de plus de 74 ans, et la deuxième est que ce public comprend une grande majorité d'allocataires invalides ou reconnus inaptes au travail. Sans doute seraient-ils peu enclins à reprendre une activité professionnelle. L'invalidité ou l'inaptitude concerne plus de la moitié des allocataires du minimum vieillesse.
L'analyse serait également partielle, car cette question ne peut être traitée de manière isolée. Elle mérite, au contraire, d'être étudiée de manière approfondie, en liaison avec les réflexions conduites dans le cadre du « rendez-vous des retraites » qui se tiendra cette année.
Vous le savez, l'IGAS a remis récemment un rapport sur le cumul emploi-retraite dans lequel elle souligne la nécessité de certains ajustements du dispositif global et propose des pistes d'évolution. Je ne crois pas que l'on puisse proposer un cumul spécifique pour les bénéficiaires du minimum vieillesse sans réfléchir à la cohérence d'ensemble du dispositif.
Ce travail devrait être mené à la lumière du rapport que je viens d'évoquer, mais aussi des travaux que conduit actuellement la commission pour l'avenir des retraites. Cette commission, installée par Premier ministre en février dernier, doit identifier des pistes de réforme permettant d'atteindre simultanément des objectifs de pérennité financière, de renforcement de l'équité et d'amélioration du système de retraite par répartition. Elle pourrait approfondir l'analyse de cette question que vous avez largement – et je vous en remercie – contribué à faire avancer.
Compte tenu de ces divers éléments, il m'apparaît souhaitable de poursuivre l'examen de cette question. Pour cette raison, je suis favorable à un renvoi de la proposition de loi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)