Nous recevons cet après-midi Mme Valérie Niquet, responsable du pôle Asie à la Fondation pour la recherche stratégique et M. Pascal Dayez-Burgeon, directeur adjoint de l'Institut des sciences de la communication du CNRS, pour une réunion consacrée à la Corée du Nord. Ces dernières semaines ont en effet été marquées par une multiplication des provocations et des menaces de la part du nouveau dirigeant, Kim Jong-Un, qui a succédé à son père il y a à peine un an. Cette montée des tensions a fait l'objet d'une grande attention médiatique, en particulier aux États-Unis mais pas seulement.
Je rappellerai brièvement l'enchaînement des faits. Après un tir de missile en décembre 2012 puis un troisième essai nucléaire le 12 février 2013, des sanctions internationales ont été adoptées, avec le soutien de la Chine. En réaction, Pyongyang a multiplié les déclarations agressives : évocation d'une guerre thermonucléaire le 9 mars, menaces adressées aux États-Unis de frappes préventives sur leurs bases au Japon et à Guam le 21 mars, déclaration de l'état de guerre avec la Corée du Sud le 30 mars, enfin installation d'un missile le 5 avril ainsi que de lanceurs.
La Corée du Nord nous a bien sûr habitués à une rhétorique guerrière, mais son nouveau dirigeant s'adonne aussi, fait nouveau, à l'invective. Il est difficile de savoir si le régime est irrationnel, imprévisible et incontrôlable comme certains le pensent, ou s'il poursuit une stratégie trop connue consistant à se placer au centre du jeu pour assurer sa survie politique et monnayer une aide économique.
La France n'entretient pas de relations diplomatiques avec la Corée du Nord et peu d'informations filtrent permettant d'avoir d'une vision claire de la situation intérieure comme des risques pour la sécurité internationale. Le calme observé dans la région, notamment en Corée du Sud, est certes rassurant. Un acte belliqueux localisé déclenchant une riposte n'est toutefois pas exclu, et la capacité nucléaire du pays représente toujours une menace.
Alors que nous assistons, semble-t-il, ces derniers jours, à une certaine désescalade, la question se pose à moyen terme de la volonté et de la capacité du régime nord-coréen à s'ouvrir, au moins sur le plan économique, ce qui fragiliserait sans doute le clan au pouvoir, et des conséquences d'un tel bouleversement pour l'ensemble de la région, à commencer par la péninsule coréenne, le Japon et la Chine.
Dans ce contexte, la position de la Chine apparaît toujours aussi ambiguë, entre engagement à réduire les tensions et intérêt au maintien du régime. La Chine doit aussi composer avec le pivot stratégique américain en direction de l'Asie-Pacifique et réaffirme ses revendications en mer de Chine, suscitant de vives tensions avec la Corée du Sud et le Japon.
C'est pour nous aider à y voir plus clair sur l'état de la situation que nous vous avons conviés, madame, monsieur. Je donnerai d'abord la parole à Mme Niquet, qui interviendra sur les enjeux stratégiques de cette nouvelle crise, puis M. Dayez-Burgeon présentera un point de vue « de l'intérieur », c'est-à-dire la perception qu'ont les acteurs régionaux de la situation et les évolutions possibles de la péninsule nord-coréenne.