Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 15 mai 2013 à 15h00
Adaptation dans le domaine de la justice au droit de l'union européenne et aux engagements internationaux de la france — Article 8, amendement 20

Christiane Taubira, garde des sceaux :

Madame la rapporteure, vous me permettrez de lire un autre passage de la décision-cadre. Aux termes de l'article 9 sexies relatif aux « demandes émanant des membres nationaux lorsque les pouvoirs ne peuvent être exercés » « Le membre national […] est au moins compétent pour soumettre à l'autorité compétente une proposition […] lorsque l'attribution de ces pouvoirs à un membre national est contraire : aux règles constitutionnelles ou à des aspects fondamentaux du système de justice pénale ». J'ai rappelé que les instruments juridiques auxquels aboutit l'Union européenne résultent de compromis entre des conceptions et des cultures juridiques différentes, et des systèmes juridiques divers. Nous sommes dans une telle situation puisque tous les pays européens n'ont pas un ministère public organisé comme le nôtre. En France, la Constitution, en vertu de l'ordonnance organique de 1958, réserve l'action publique au parquet, plus précisément au procureur. Notre membre national d'Eurojust est évidemment choisi au sein du parquet, mais une fois affecté à La Haye, il n'exerce plus l'action publique au titre de l'ordonnance organique.

Or les compétences que vous proposez de donner au membre national d'Eurojust seraient susceptibles de le conduire à exercer l'action publique, c'est-à-dire à mobiliser la police judiciaire, conformément aux articles 30, 32 et 34 du code de procédure pénale, se retrouvant à agir comme s'il représentait le parquet installé en France, exerçant l'action publique sous l'autorité hiérarchique du procureur général. Il y a donc là un risque réel, sur lequel j'attire votre attention, et que la décision-cadre prend en compte puisque l'article 9 sexies prévoit que si jamais il y a un empêchement lié soit à l'organisation de l'institution judiciaire, soit aux lois constitutionnelles, le membre national est dispensé d'exercer les compétences prévues aux articles 9 quater et 9 quinquies.

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