Que comptez-vous faire, au-delà de la décote, en ce qui concerne le foncier ?
J'avais d'ailleurs fait inscrire cette décote dans deux textes – la loi de programmation pour la cohésion sociale et la loi portant engagement national pour le logement –, en la fixant à 35 %. De votre côté, vous nous répétez ce que les technocrates disaient déjà à l'époque : « On va procéder par décret. » Or ce n'est un décret qu'il faut prendre pour savoir quels terrains on va retenir dans le foncier de l'État ou des organismes parapublics. Pour ce faire, il faut engager une concertation sur le terrain, avec les collectivités locales.
C'est ainsi que, dans ma commune de la communauté urbaine de Lille, que Mme la rapporteure connaît bien, nous avons la capacité de discuter de l'ensemble du foncier de l'État, mais dans une relation partenariale et en contact avec un certain nombre d'organismes – Voies navigables de France, la SNCF, Réseau ferré de France ou encore les centres hospitaliers régionaux – pour jouer gagnant-gagnant. Bien sûr, une partie des terrains – par exemple certains délaissés ferroviaires de la SNCF, à côté de telle petite gare – peut être mise à disposition pour construire du logement social. Mais on aura du mal à m'expliquer comment la SNCF pourrait renoncer au bénéfice d'un terrain comme celui de Saint-Sauveur, en plein centre de Lille, à côté de la mairie, dont elle a un grand besoin. On aura tout autant de mal à m'expliquer, au moment où personne ne peut nous rassurer sur le canal Seine-Nord Europe, que nous sommes un certain nombre ici à avoir défendu, comment on va pouvoir piquer de l'argent à VNF, alors même qu'il lui manque 1 milliard, voire plus, pour boucler son budget !
Ce n'est donc pas par décret qu'il faut procéder ; il faut utiliser une autre méthode. Vous savez, j'ai été plusieurs fois ministre ; le coup du décret, on me l'a fait ! Ce n'est rien d'autre qu'une manière, pour Bercy, de mettre la main – et pas de façon amicale – sur la politique du logement.
Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, si les 3,5 à 5 milliards d'euros qui vont être piqués au Crédit immobilier – c'est ce qui reste dans la caisse – vont être affectés au budget du logement ? Ou bien ne serviront-ils pas plutôt à boucher les trous d'un budget dont, aujourd'hui encore, on ne sait pas comment il va pouvoir financer, par exemple, les contrats de génération ?
Quand vous dites que vous allez quintupler les amendes et que l'argent ainsi versé à la caisse que vous allez créer sera laissé à la diligence, non pas des communes, ni même des intercommunalités, mais de l'État, nous craignons que cela ne serve à boucher les trous d'un budget qui ressemble de plus en plus à un fromage de gruyère !
Voilà donc les questions qui se posent ; voilà l'ensemble de la chaîne du logement qu'il faut évoquer ; voilà pourquoi nous ne sommes pas très rassurés, et cela d'autant moins que vous voulez passer à la hussarde. Il n'y a quasiment pas eu de discussion au Sénat, alors que certains amendements, qui n'étaient ni politisés ni idéologiques, avaient été présentés par des personnes comme Valérie Létard ou François-Noël Buffet, dans le but d'avoir une discussion loyale…