Cet article a attiré mon attention, puisqu'il vise à abroger le délit d'offense au chef de l'État afin d'adapter la législation française à un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme rendu le 14 mars 2013 dans l'affaire Eon c. France. Cette affaire concerne la pancarte qui avait été brandie lors du passage du précédent président de la République et sur laquelle était inscrite la phrase « casse toi pov'con », des propos qui avaient justifié alors l'utilisation du délit d'offense au chef de l'État à l'encontre de leur auteur.
Il me semble que la suppression ou l'abrogation de ce délit ne va pas de soi. S'attaquer au Président de la République revient en effet à s'attaquer au chef de l'exécutif – bien que, selon la Constitution, ce rôle soit attribué au Premier ministre – mais surtout au garant de l'autorité judiciaire. Le Président, clé de voûte des institutions, garantit ainsi le fonctionnement de l'institution judiciaire. On ne peut donc pas, à mon avis, au nom d'une décision de justice, fragiliser le fondement juridique qui permet à cette même décision juridique de s'appliquer : la possibilité même d'appliquer la jurisprudence Eon contre France pour faire évoluer le droit découle du fait que l'autorité judiciaire, la justice fonctionnent bien dans notre pays. La conséquence logique d'une telle disposition serait donc d'affaiblir celui qui se porte garant de la justice et, par suite, la justice elle-même ; cela revient à se tirer une balle dans le pied.
C'est d'autant moins acceptable lorsqu'on examine la philosophie qui se dégage des considérants de l'arrêt : l'élu est considéré comme un citoyen devant être moins protégé que les autres au motif que sa qualité de personnalité publique exigerait une tolérance plus grande. Je crois au contraire qu'à l'heure où les médias sont de plus en plus massifiés il faut protéger l'élu.