Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du 15 mai 2013 à 21h45
Adaptation au droit de l'union européenne dans le domaine du développement durable — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Autre thématique capitale : la problématique énergétique, et notamment l'activité gazière et le transport du gaz. Dans ce domaine, nous avons plusieurs propositions et je me félicite de l'adoption d'un amendement qui ouvre explicitement la possibilité pour les entreprises de transport de gaz d'exercer diverses activités en dehors de l'espace communautaire.

De même, l'instauration d'un audit énergétique obligatoire dans les grandes entreprises, souhaitable, n'en pose pas moins des difficultés de calendrier : près de 5 000 entreprises devront être auditées d'ici à décembre 2015. Si l'on estime la durée d'un audit à trois semaines, plus de 500 auditeurs devront être agréés, ce qui devrait prendre environ un an. Si la disposition législative correspondante est adoptée en 2014, les auditeurs seront prêts en 2015, ce qui laissera moins d'un an aux entreprises pour respecter leurs obligations en la matière. On peut donc être dubitatif sur les possibilités de mise en oeuvre de la mesure dans les délais prévus et souhaiter davantage de souplesse pour ces entreprises. Nous y reviendrons au cours des débats.

Une fois de plus, la technicité des sujets suppose une précision et une exigence considérables. C'est dans cet objectif que nous avons souhaité accentuer l'intervention du ministre en charge de l'énergie à défaut de recourir à la voie réglementaire, peu convaincante. Et c'est dans ce même esprit que nous défendrons des amendements visant à clarifier et à simplifier la rédaction du code de l'énergie.

En conclusion, je souhaite insister sur le fait que si le texte est globalement acceptable, il n'en est pas de même pour l'une de ses dispositions très importantes, celle de l'article 10 visant à ratifier l'ordonnance du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l'environnement.

Cette disposition autorisait le Gouvernement à prendre des mesures de bon sens pour, notamment, regrouper les procédures ainsi que les sanctions, voire rendre davantage applicables les peines en cas de manquements au droit de l'environnement par le biais, en particulier, des transactions. Nous avons détecté, très récemment il est vrai, beaucoup d'erreurs – mais il faut reconnaître que le peu de moyens à notre disposition ainsi que la complexité du texte rendent nos missions très difficiles.

Parmi ces erreurs, une grave omission : la méconnaissance du droit de la défense dans le cadre de la généralisation des transactions. Nous introduisions des transactions, il fallait évidemment aménager un droit à la défense. Pourquoi ne pas avoir prévu la communication des procès-verbaux ainsi que le droit à l'assistance d'un avocat ? Cette simple omission amènera inéluctablement le Conseil constitutionnel à rejeter ces dispositions. De même, des oublis fâcheux conduiront à ne plus considérer demain ce qui était hier un délit. Si aujourd'hui l'absence d'exécution d'une mise en demeure est ainsi un délit, ce ne sera plus le cas demain.

Autre exemple : nous n'avons pas débattu des raisons pour lesquelles on ne condamne pas l'absence de respect d'une décision du juge administratif en matière d'environnement ou on n'oblige pas une collectivité à exécuter une condamnation par ce même juge.

J'ai déposé en hâte des amendements en commission du développement durable, soutenus par les juristes de France Nature Environnement, extrêmement inquiets sur un grand nombre de sujets. Je les avais d'ailleurs encore au téléphone lors de la dernière réunion de la commission du développement durable. Ils m'ont bien répété qu'ils contestaient le texte tel qu'il était rédigé, lequel ne pourrait pas être mis en oeuvre. Et l'on demande au Parlement de ratifier une ordonnance avec des orientations de fond qui n'ont jamais été discutées !

C'est d'autant plus étonnant que le Gouvernement a décidé d'engager des états généraux du droit de l'environnement. Que s'est-il passé pour en arriver là, madame la ministre ? J'ai discuté de ces amendements avec notre excellent rapporteur, pour qui il s'agit de mesures de bon sens mais qui arrivent au dernier moment et qui seront certainement réexaminées dans le cadre des états généraux. Pourquoi alors vouloir reprendre aujourd'hui cette ordonnance, alors que tout un travail de fond est actuellement lancé ?

Nous sommes très inquiets de la précipitation avec laquelle vous voulez ratifier une ordonnance qui ne tient pas compte de l'esprit de l'autorisation donnée au Gouvernement à l'époque.

J'espère que les amendements déposés par notre groupe en commission seront reçus favorablement et que nous obtiendrons des réponses précises à ces questions, qui inquiètent la seule grande organisation environnementale française qui a vraiment travaillé d'arrache pied sur ce sujet et qui a d'ailleurs eu à plusieurs reprises votre cabinet au téléphone, madame la ministre.

Je souhaite donc que nous obtenions des réponses positives, faute de quoi, contrairement à ma prise de position en commission, nous réexaminerons les conditions de notre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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