Intervention de Jacques Krabal

Séance en hémicycle du 15 mai 2013 à 21h45
Adaptation au droit de l'union européenne dans le domaine du développement durable — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

…des textes qui auront une portée normative pour une grande partie de nos concitoyens, en particulier les agriculteurs, les gens de mer, les chefs d'entreprises industrielles ou encore les transporteurs routiers.

Dans le titre Ier, il est question de dispositions relatives à l'environnement et à la santé au travail. Il transpose la directive Seveso III du 4 juillet 2012, qui traite de la prévention des risques liés aux substances dangereuses. En tant que rapporteur du programme 181 « Prévention des risques », j'étais intervenu en commission à ce sujet et je vous remercie, madame la ministre, de m'avoir apporté des réponses.

Cette directive doit entrer en vigueur dès le 1er juin 2015. Elle marque des progrès significatifs par rapport à la directive Seveso II, qu'elle a vocation à remplacer.

La surveillance des substances dangereuses est renforcée, notamment pour leur mise sur le marché.

À ce propos, ne soyons pas naïfs : les trafics clandestins existent et si une surveillance particulière ou des interdictions réglaient le problème de façon définitive, cela se saurait depuis longtemps.

Le volet « Lutte contre les trafics » est utile et indispensable, mais l'augmentation des contrôles et des sanctions lourdes pour les trafiquants doivent compléter l'arsenal.

Au-delà de cet aspect, 1 200 établissements industriels en France seront incités à mettre en place des mesures de sécurité plus fortes, avec la distinction entre les établissements dits de « seuil haut », qui ont sur leur propre site des substances en grandes quantités, et les établissements de « seuil bas » pour les quantités moindres.

Cette distinction est importante pour proportionner les normes et les risques et ne pas alourdir inutilement des contraintes qui pèsent sur les établissements.

En ce qui me concerne, je suis particulièrement sensible aux dispositions qui renforcent l'information du public et son association à la prise de décision.

S'il y a une chose que les députés peuvent faire remonter du terrain, c'est bien la volonté de nos concitoyens d'être davantage associés aux débats publics et aux décisions qui concernent directement leur territoire, leur cadre de vie quotidien, qu'il s'agisse des dangers liés aux risques industriels ou de ceux liés aux risques environnementaux pour l'installation des nouvelles infrastructures.

Seveso III va dans le bon sens, mais tâchons de faire toujours mieux ! Je salue votre engagement, madame la ministre, à vouloir combler notre retard en consentant un effort important en faveur des plans de prévention des risques technologiques.

Mais revenons à notre texte. Toujours dans le titre Ier, l'article 6 procède à des adaptations du droit français pour les produits biocides. Il tend à transférer à l'Agence européenne des produits chimiques la fonction de coordination et d'évaluation de ces substances. Ce sont des produits actifs susceptibles d'avoir des effets nuisibles sur l'homme, l'animal ou l'environnement.

La création d'une autorisation de mise sur le marché délivrée au niveau européen et les procédures visant à l'harmonisation des systèmes d'autorisation nationaux sont des dispositions que nous saluons et que nous soutenons.

Mais de nouveau se pose la question des trafics et du respect des règles dans l'ensemble des pays de l'Union, du fait de la liberté de circulation des marchandises. Lorsque nous achetons des productions agricoles européennes, nous devons avoir la garantie que des produits dangereux interdits n'aient pas été utilisés. Sinon, c'est la double peine : nos concurrents européens augmentent leurs rendements, pénalisent nos producteurs – agriculteurs, éleveurs, maraîchers – et empoisonnent potentiellement les consommateurs. Ce n'est pas une caricature, nous savons que de telles situations existent ! Madame la ministre, nous comptons sur vous pour relayer ces préoccupations à la Commission afin de maximiser les garanties de surveillance et de contrôle.

L'article 8 prévoit que les produits explosifs, qui sont actuellement soumis au seul code de la défense, puissent être soumis aux dispositions du code de l'environnement pour les aspects de mise sur le marché.

Les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes seront habilités pour le contrôle des dispositions de la présente loi. Mais en auront-ils les moyens, humains et financiers ?

Compte tenu de la RGPP, les effectifs sont passés de 3 600 en 2007 à 3 000 en 2012. Il ne reste que quelques agents dans les départements dits « ruraux ». Cette surcharge de travail, pour des services presque impuissants devant la quantité de contrôles à effectuer, ne manquera pas de provoquer de nouveaux constats de carence.

Permettez-moi de le répéter, lutter contre toutes les formes de fraudes, comme contre les paradis fiscaux, doit être une priorité. Ainsi, le groupe RRDP considère que le renforcement de la DGCCRF en moyens et en effectifs en est une condition.

La directive « Eurovignette » régule la mise en place et le calcul des péages et vignettes pour les poids lourds, et sa dernière version prévoit l'application, sous conditions, du principe pollueur-payeur, avec la possibilité d'intégrer dans le péage certains coûts externes comme le bruit et la qualité de l'air.

Le groupe RRDP se félicite aussi des dispositions concernant la convention du travail maritime et portant modernisation du droit social des gens de mer.

La directive reprend les règles et normes énoncées au sein des quatre premiers titres de la convention du travail maritime. Je ne m'étendrai pas sur ce sujet qui a déjà été abordé, mais je voudrais saluer en particulier le dispositif de protection de la maternité prévu pour les femmes marins enceintes, qui, étant inaptes à travailler à bord, ne pouvaient être reclassées. Le régime de sécurité sociale des marins et l'armateur cofinanceront le maintien d'une prestation dans ce cas.

Pour conclure, au sujet du titre III et des dispositions relatives à l'énergie, l'audit énergétique obligatoire prévu pour les grandes entreprises à l'article 27 est une avancée, à condition qu'il puisse se faire en toute objectivité et qu'il aboutisse à l'amélioration significative de l'efficacité énergétique et à la baisse de la consommation d'énergie.

Mais, même si vous venez d'annoncer, madame la ministre, la prolongation de la deuxième période des certificats d'économies d'énergie, avec une période transitoire utilisée pour améliorer les dispositifs – ce qui est une bonne décision pour les acteurs de la filière – je voudrais vous poser une question plus précise : les efforts d'obligation vont-ils changer ? Maintenir une obligation à niveau constant serait un vrai problème pour l'ensemble de la filière et menacerait les emplois, compte tenu de l'excédent qui sera atteint fin 2013. Il faudrait a minima déduire ces excédents des calculs d'obligation à appliquer en 2014, alors que ce niveau d'effort devrait être doublé pour correspondre aux objectifs fixés par la directive européenne à plus de 200 térawatts heure cumac par an.

Au-delà des remarques sur les normes et les règles, avec la volonté de simplification souvent légitime qui nous anime ici, ce qui nous paraît important, c'est que ces textes donnent de la cohérence et de la force à l'Union européenne. Oui, contrairement à ce que ne cessent de clamer les eurosceptiques, le territoire européen est pertinent pour construire des politiques efficaces dans les domaines du développement durable, de l'alimentation et de la santé.

Pour conclure, je citerai Jean de La Fontaine, né à Château-Thierry. Dans l'une de ses fables – vous la connaissez sans doute, Le Vieillard et ses Enfants –, il écrivait : « Toute puissance est faible, à moins que d'être unie ».

Voilà ce que nous ne devons jamais perdre de vue pour notre pays, la France, mais aussi pour notre Europe. Il reste encore beaucoup à faire, mais ces transitions nous montrent que nous sommes sur la bonne voie. C'est pourquoi le groupe RRDP votera ce projet de loi.

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