Ce que vous proposez a déjà été voté : pourquoi donc le proposer une deuxième fois ? La loi comprend aujourd'hui des dispositions qui permettront demain à l'administration de s'opposer à des licenciements. Si l'entreprise veut obtenir cette homologation, il faudra qu'elle renchérisse – c'est la proposition n° 35 du candidat François Hollande – jusqu'au moment où le licenciement ne sera plus intéressant de son point de vue. Quand une entreprise veut licencier pour gagner beaucoup plus d'argent mais que ce licenciement lui coûterait finalement beaucoup plus cher, elle n'y procède pas. C'est le principe même du dispositif adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat.
Un deuxième point fait débat – ce que je peux comprendre puisqu'il s'agit de deux cultures différentes et j'y ai fait référence dans mon discours liminaire. S'agissant des organisations syndicales, lesquelles, je le rappelle, peuvent négocier et conclure un accord dans l'entreprise, y compris sur un plan de licenciement, vous nous dites qu'elles sont faibles, voire incapables de négocier, si je pousse un peu votre raisonnement. Même si cela ne correspond pas à votre pensée profonde, une telle analyse correspond à une forme de défiance, en tout cas à un manque de confiance dans la capacité d'une organisation syndicale de se battre dans son entreprise. Pour ma part, j'ai confiance dans les organisations syndicales. Toutes, signataires ou non de l'accord, seront les premières – elles nous l'ont dit – à utiliser les outils que la loi va leur donner dans quelques jours pour négocier fermement dans l'entreprise. S'il n'y a pas d'accord, l'administration pourra, suivant les mécanismes que j'ai décrits, faire en sorte que les licenciements soient abandonnés ou renchéris de telle manière que l'entreprise n'ait plus intérêt à les mettre en oeuvre.
C'est le coeur du débat entre nous, monsieur Chassaigne. J'entends votre argument consistant à dire que nous n'y arriverons pas avec les dispositions de la loi telle qu'elle a été votée. Mon argument au contraire est de dire que les dispositions de la loi vont nous permettre tout de suite, dans quelques jours, de mettre en oeuvre les dispositifs visant à limiter les licenciements de caractère boursier, à les renchérir jusqu'à les empêcher.
D'un côté, il y a ceux qui croient aux dispositions qui viennent d'être adoptées et, de l'autre, ceux qui n'y croient pas et qui les ont combattues. Cela étant, nous ne sommes plus dans la croyance, mais dans l'analyse des systèmes juridiques et sociaux. J'ai à la fois confiance dans la loi et la force des organisations syndicales et du débat dans l'entreprise. Cela ne signifie évidemment pas que je considère que tout le monde est gentil. Non, il existe des contradictions extrêmement puissantes dans les entreprises, je l'ai rappelé tout au long du débat. Les patrons ne sont pas, par essence, des patrons voyous. Mais, au nom des actionnaires qu'ils représentent, ils peuvent défendre des intérêts contraires à ceux des salariés. Comment résoudre cette contradiction ? Par la confrontation, ou par la recherche d'un compromis fondé sur le dialogue pour aboutir à un accord ?
Voilà ce que je tenais à rappeler. Certains pensent qu'il n'y a pas de solutions, alors même que nous venons de les adopter, et d'autres, comme nous-mêmes, pensons qu'un travail très important a été accompli au sein de l'Assemblée nationale et du Sénat en mettant en oeuvre des dispositifs nouveaux.
Je tiens à vous remercier, mesdames et messieurs les députés, pour vos interventions. La position du Gouvernement est la suivante : je suis d'accord avec l'objectif que vous poursuivez, monsieur Chassaigne, tant et si bien que je considère que pour l'atteindre, l'application de la loi sur la sécurisation de l'emploi est la première des priorités.