Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, aujourd'hui, en France, quasiment 2 millions de foyers attendent un logement social et, selon le dernier rapport de la fondation Abbé Pierre, plus de 10 millions de personnes seraient touchées par la crise du logement.
Les « mal-logés », comme on les appelle, ne sont pas seulement les SDF qui doivent immédiatement se voir offrir un hébergement permanent et durable en vue d'obtenir un logement. Les mal-logés, ce sont aussi toutes celles et ceux qui vivent dans un habitat insalubre, qui sont entassés dans des logements trop exigus ou qui subissent une cohabitation forcée.
J'ai encore en tête l'abominable incendie de l'été 2005, boulevard Vincent Auriol à Paris : dix-sept personnes dont quatorze enfants avaient péri. À droite comme à gauche, l'ensemble de la classe politique était alors unanime pour faire du mal-logement, une priorité nationale. Hélas ! les annonces faites par le gouvernement Villepin n'ont jamais été suivies d'effet.
Aujourd'hui, plus que jamais, il y a urgence, car les dix ans de politique de droite, auxquelles il faut ajouter les effets de la crise que nous endurons depuis de nombreuses années, n'ont fait qu'affaiblir les plus fragiles d'entre nous.
La pénurie de logements, conjuguée à la baisse du pouvoir d'achat des ménages, aggrave les effets de la forte augmentation des prix. Entre 2000 et 2010, les prix des logements anciens ont augmenté en moyenne de 110 % sur le plan national : 120 % en région Rhône-Alpes, 135 % en Île-de-France et 140 % en Provence-Alpes-Côte-d'Azur. Sur la même période, les prix des logements ont progressé de 86 % pour les maisons et de 94 % pour les appartements.
Que l'on ne s'y trompe pas, le problème du mal-logement ne se réglera qu'au prix d'importants moyens dévolus par l'État.
À Marseille, par exemple, il faudrait investit de 30 à 40 milliards d'euros pour remettre en ordre le parc social dans les quartiers nord – je sais de quoi je parle : j'en suis l'élu. La vétusté des logements y est inacceptable. On ne peut pas laisser des familles entières vivre dans ces conditions.
Le candidat Hollande avait bien compris que pour faciliter l'accès au logement pour tous, il fallait une politique ambitieuse. Le Président de la République tient parole puisque le projet de loi élaboré par Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement propose notamment le relèvement du seuil minimal de logements sociaux prévu dans la loi SRU, et la décote des terrains de l'État ou d'établissement publics au profit du seul logement social. Cette décote, qui pourra atteindre 100 %, sera fixée en fonction de la catégorie à laquelle appartiennent les logements car il s'agit de privilégier ceux accessibles au PLAI, dont les bénéficiaires sont les populations les moins favorisées, par rapport à d'autres types de logements tels ceux financés à l'aide d'un prêt locatif social (PLS). Elle pourra également varier selon les circonstances locales. Il sera ainsi tenu compte du comportement des collectivités concernées.
Vous l'aurez compris, l'ensemble de ces mesures visent à contrer l'inflation des prix et à remédier à l'insuffisance de l'offre de logements, en particulier dans le parc locatif social.
Le projet de loi a un triple objectif : améliorer les conditions de vie des Français, développer l'offre foncière et favoriser la mixité sociale. Concrètement, il s'agit de construire chaque année 500 000 logements, dont 150 000 logements sociaux.
Tout à l'heure, j'ai été étonné d'entendre les réticences d'un certain nombre de nos collègues de l'opposition. Pardonnez-moi d'évoquer ma ville. Il est vrai que la situation y est très complexe : il y a de la délinquance, des assassinats. Mais j'aimerais que les plus réticents d'entre vous viennent un jour visiter Marseille et constater l'état du parc social, construit dans les années 1960. Certains bailleurs jouent le jeu, mais 90 % d'entre eux ont, hélas ! démissionné.
Il faut savoir les conditions dans lesquelles vivent ces familles abandonnées : le parc HLM est entièrement concentré dans cinq arrondissements, les quartiers nord, alors que le sud de la ville est nanti. Dans une cité comme la Castellane, où vivent 8 000 habitants, vous n'avez pas 1 millimètre carré – je n'exagère pas – de pelouse ni infrastructures sportives ou éducatives. Comment voulez-vous – même si cela n'excuse rien – que les jeunes ne s'adonnent pas à la délinquance ? C'est un terreau fertile.
Ce soir, le logement devient un droit pour tous. C'est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter ce texte avec force. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)