Intervention de Pierre Lequiller

Réunion du 26 septembre 2012 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Lequiller :

Nous souscrivons à la quasi-intégralité de l'argumentaire de la rapporteure. Comment pourrait-il en être autrement, s'agissant d'un texte que nous défendons depuis des mois ? Nous aurions préféré une ratification bien plus rapide, mais, à l'époque, la gauche n'en voulait pas.

Lorsque le Premier ministre et Mme la présidente Guigou exhortent les députés à approuver le traité, ce n'est pas à nous qu'ils s'adressent : c'est à leur propre majorité ! Le Premier ministre va jusqu'à affirmer que ceux qui voteront contre ou qui s'abstiendront veulent la mort de l'euro. Mais, pendant la campagne électorale, M. Hollande a tant répété que le traité n'était pas bon et devait être renégocié qu'il a semé le trouble non seulement dans l'opinion mais aussi dans sa majorité, qui apparaît fortement divisée. Phénomène singulier sous la Ve République, certains ministres du Gouvernement appartiennent à un mouvement qui votera contre la ratification.

Pour notre part, nous restons parfaitement logiques avec nous-mêmes : le traité a été négocié par le président Sarkozy, la chancelière Merkel et les chefs d'État des vingt-cinq pays signataires. Notre vote signifie aussi que nous entendons mener une opposition constructive et non pas systématique.

Vous nous dites que le pacte de croissance a changé la donne. Pourtant, il se résume à la réaffectation de 55 milliards d'euros de fonds structurels non utilisés et à une extension – prévue dès le début de 2012 – du rôle de la Banque européenne d'investissement : ce n'est pas avec cela que l'on pourra lancer des projets importants en France. On nous parle de 7 milliards pour notre pays. C'est évidemment insuffisant pour relancer la croissance.

Notre vote favorable tient aussi à l'absence de judiciarisation du dispositif : aux termes de l'article 8, il n'appartient pas à la Cour de justice de l'Union européenne de veiller au respect du pacte budgétaire par chaque pays.

Quelques observations : les administrations publiques visées à l'article 3 sont à la fois celles de l'État et celles des collectivités territoriales. Un tel dispositif fonctionne déjà en Espagne et en Allemagne. Étant donné l'importance des budgets des collectivités territoriales en France – et sachant que celles-ci sont en majorité tenues par la gauche –, comment entendez-vous leur faire respecter le pacte ?

Je note que le sommet des chefs d'État et de gouvernement de la zone euro, prévu à l'article 12, confirme une initiative que le président Sarkozy avait prise au plus fort de la crise, durant la présidence française de l'Union.

La conférence des représentants du Parlement européen et des parlements nationaux, à l'article 13, est un projet que j'avais soutenu lorsque j'exerçais la présidence de la commission des affaires européennes. En liaison avec le représentant permanent de la France à Bruxelles, nous avons obtenu la création de cette instance interparlementaire en dépit des réticences de certains partenaires, notamment de l'Allemagne. La coordination entre les États est satisfaisante : il faut maintenant qu'elle s'établisse aussi au niveau des parlements.

À cet égard, je souscris à l'opinion de Mme la rapporteure : notre Assemblée doit améliorer son contrôle de l'action du Gouvernement. Sur les sujets importants, il nous faudrait auditionner systématiquement le ministre avant qu'il ne se rende à Bruxelles. En Allemagne, le contrôle est très rigoureux. La Chancelière est auditionnée avant de participer aux conseils de chefs d'État et de gouvernement et elle est tenue de rendre compte au Parlement après ces réunions. Sans aller jusqu'à copier ce système, nous ferions bien de nous en inspirer.

Hier, le ministre a laissé entendre que je « défendais » les propositions allemandes. Tel n'est évidemment pas mon propos. Je constate seulement que l'Allemagne a fait des propositions et j'aimerais que la France y réponde. Ce que je reproche au Gouvernement, c'est son silence. Mme Merkel et M. Schäuble souhaitent la création d'un ministre européen des finances, l'élection du président de la Commission au suffrage universel, différents transferts de souveraineté vers le niveau européen, ainsi que la réunion d'une « convention » qui réfléchirait à un nouveau traité. Il est temps que la France, deuxième puissance en Europe, se prononce. Elle peut être d'accord ou non, formuler, le cas échéant, des contre-propositions, mais il faut engager le dialogue.

Je partage enfin le voeu de la rapporteure en faveur d'une harmonisation fiscale, environnementale et sociale. Mais je doute que l'augmentation de 20 milliards de la fiscalité française, supportée pour moitié par les ménages et pour moitié par les entreprises, aille dans le sens d'une telle harmonisation. Nos prélèvements obligatoires, supérieurs de 10 points à ceux de l'Allemagne et de la moyenne des pays de l'Union, sont déjà parmi les plus élevés d'Europe. La politique engagée par le Gouvernement ne laisse pas de surprendre nos partenaires. Politique européenne et politique intérieure sont étroitement imbriquées. Mieux vaudrait mettre en actes les propositions que nous formulons et les textes que nous signons !

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