Je voudrais enfin vous indiquer que, alors que nous étions en séance, le secrétariat général des affaires européennes nous a transmis, en urgence, hier soir, le projet de décision du Conseil demandant officiellement à Chypre de mettre en oeuvre le programme d'ajustement macroéconomique lié au mécanisme de sauvetage financier de Chypre décidé par l'Eurogroupe le 25 mars dernier.
Le Gouvernement justifie cette procédure par l'urgence à mettre en oeuvre le programme d'ajustement structurel, la signature du protocole d'accord avec la Commission européenne devant en effet avoir lieu le 26 avril.
Avant de revenir plus en détail sur les questions de procédure, je souhaiterais vous dire quelques mots sur le contenu même du programme d'ajustement proposé.
Ce programme d'ajustement accompagne le plan de sauvetage financier destiné à Chypre qui prévoit une aide financière de 10 milliards d'euros, dont 1 milliard provenant du FMI et 9 milliards prenant la forme d'un prêt accordé au travers du mécanisme européen de stabilité (MES). Compte tenu des clés de répartition au sein du MES et du fait que les États sous programme d'aide financière ne sont pas mis à contribution, la participation de la France devrait s'élever à un peu plus de 2 milliards d'euros. Le Conseil des gouverneurs du MES devrait être en mesure d'approuver formellement l'accord sur la facilité d'assistance financière une fois que se seront achevées les procédures parlementaires nationales. L'Allemagne et la Finlande se sont ainsi prononcées la semaine dernière, l'Autriche et les Pays-Bas devraient le faire la semaine prochaine. Le versement d'une première tranche d'aide par le MES est ainsi prévu pour mi-mai.
Le programme d'ajustement macroéconomique de Chypre a pour principaux objectifs de restaurer la solidité du secteur bancaire et de poursuivre le processus de consolidation budgétaire, ainsi que de mettre en place des réformes structurelles. Couvrant la période 2013-2016, il met tout particulièrement l'accent sur la restructuration bancaire, avec la résolution de la banque Laïki via la création d'une banque de défaisance, et la recapitalisation de la Bank of Cyprus, avec le principe finalement retenu de la protection des dépôts en-dessous de 100 000 euros. S'agissant de la consolidation budgétaire, le programme est directif et détaillé : est ainsi demandée, pour 2013, une baisse des dépenses de 36 millions d'euros avec en particulier des coupes plus importantes dans les salaires du secteur public et la rationalisation de certains dispositifs sociaux. Il est également précisé quels impôts doivent être augmentés. Il est enfin demandé à Chypre de se conformer aux directives européennes relatives aux services et à l'énergie.
Il s'agit donc d'un programme particulièrement exigeant, où il est malgré tout précisé que les conséquences pour les plus défavorisés doivent être minimisées. Autant dire que c'est la quadrature du cercle !
Sur la forme, nous sommes, à ce stade, dans le cadre d'une simple procédure d'information. Nous n'avons pas été saisis officiellement au titre de l'article 88-4 de la Constitution, pour des raisons de forme principalement puisque nous n'avons pas de version française du texte. Il n'en demeure pas moins que, alors que le document date du 18 avril, il n'a été transmis à notre Commission que hier soir. L'absence de version française à ce stade nous conduit à une situation absurde où nous ne serons saisis formellement, sur le fondement du texte français, qu'une fois la décision prise... Cela ne peut que nous conduire à nous interroger sur les moyens d'améliorer l'information et l'implication de notre Assemblée sur ces sujets essentiels, même si notre quitus sur ce sujet spécifique va de soi.
S'agissant tout d'abord de l'aide financière octroyée dans le cadre du MES, force est de constater qu'il existe des marges de progression. Aujourd'hui, notre Parlement en est saisi, globalement, lors de l'examen de la loi de finances, alors que les Parlements allemand, néerlandais, autrichiens et finnois doivent donner leur accord en amont de la décision du conseil des gouverneurs. Il serait donc souhaitable que nous soyons, à tout le moins, informés en amont de la prise de décision par le Conseil des gouverneurs et pas seulement après coup. Aussi, je vous propose que, à l'avenir, un mécanisme d'information spécifique soit mis en place. Il devrait, bien entendu, être articulé avec la conférence interparlementaire budgétaire, au sujet de laquelle, je vous le rappelle, nous avions proposé qu'elle puisse se saisir des décisions du MES. Nous ferons d'ailleurs prochainement avec Christophe Caresche une communication sur la mise en place de cette Conférence décidée par les présidents à Chypre hier et avant-hier.
Il serait par ailleurs utile que nous auditionnions le Ministre de l'Économie et des finances avant les réunions du Conseil des gouverneurs et de l'Eurogroupe lorsque des décisions importantes doivent être prises.
S'agissant de la décision du Conseil relative au programme d'ajustement macroéconomique, il serait souhaitable que le Gouvernement demande un point de méthode auprès de la Commission européenne et du Conseil pour que, dans des cas exceptionnels comme celui d'aujourd'hui, une version française soit rapidement disponible. En tout état de cause, il convient de mettre en place un mécanisme d'information spécifique en la matière, pour que, sur des sujets de cette importance, notre Parlement puisse être pleinement informé, en amont, et émettre des recommandations en conséquence.