Mon doctorat portait sur l'apprentissage des savoirs de base. Dans les années 1970, l'université s'est tournée vers ces immigrés, s'apercevant que leurs besoins étaient différents de ceux des étudiants : s'ils souhaitaient apprendre le français, c'est qu'ils en avaient besoin pour leur travail et la vie de tous les jours. C'est grâce à ce public qu'est née l'approche communicative, qui permet d'adapter la formation aux besoins. La définition d'un « niveau seuil » ou B1, issue cette approche, a permis de créer le cadre européen commun de référence.
L'université s'est par la suite et durant plusieurs années désintéressée de ce public. C'est le secteur associatif qui a alors pris la relève. Il s'est progressivement professionnalisé. L'AEFTI a créé de nombreux outils en direction de ce public – elle mettra à disposition à compter du 29 avril 2013 un logiciel interactif pour apprendre à se servir des bornes automatiques.
L'approche doit en effet être d'autant mieux adaptée aux différents publics auxquels nous avons affaire que les flux migratoires ont changé. Les nouveaux publics relèvent désormais en majeure partie du flux français langue étrangère (FLE), du fait qu'ils ont été scolarisés dans leur langue maternelle mais ne maîtrisent pas la langue française. En revanche, les chibanis, qui proviennent de pays francophones, connaissent le français « oral » : ce dont ils ont besoin, c'est d'un apprentissage du français « écrit ». Il ne s'agit donc pas de la même approche : la formation doit être différente.
Les AEFTI étant militantes, elles ont créé des formations sur la grève ou le droit – récemment encore sur le droit du travail. Il est important de ne pas réduire la formation à la seule approche linguistique.
La réussite dépend de la motivation de celui qui suit les cours.
Je souhaiterais évoquer le label qualité « FLI », dont j'ai été une des contributrices et qui a donné ses lettres de noblesse à l'apprentissage de l'usage quotidien de la langue française. Ce label est délivré par l'État aux organismes professionnels de formation. Assurer une formation de qualité implique en effet d'avoir auparavant défini les besoins des personnes. Il était également prévu de mettre en place un agrément pour les structures employant des bénévoles, ceux-ci ayant pour fonction de servir d'intermédiaires entre les immigrés et des formateurs professionnels de qualité. Notre public est composé d'adultes et non pas d'enfants : les cours qui leur sont dispensés doivent absolument prendre en considération cette caractéristique essentielle.
Au plan politique, je regrette que les titres de séjour soient conditionnés au niveau de langue de l'immigré. Pour les primo-arrivants, il conviendrait de prendre en considération leur progression. Quant aux immigrés âgés, ils sont à mes yeux citoyens français de fait. On leur doit la qualité de la formation.