Intervention de Vincent Peillon

Séance en hémicycle du 4 juin 2013 à 21h30
Refondation de l'école de la république — Article 31, amendement 180

Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale :

On brandit des fictions, on fait peur aux gens en attribuant à certains des théories ou des intentions qui ne sont pas les leurs.

Par ailleurs, je trouve malheureux qu'il y ait des comportements comme ceux qu'a évoqués Mme Pompili. C'est toujours comme ça : lorsqu'il y a confusion d'esprit et volonté d'entretenir des équivoques, cela crée de la violence et de la brutalité, et des personnes sont désignées à la vindicte d'autres. Mme Pompili a parlé des mots désagréables qu'elle a reçus, mais il y en a d'autres et parfois d'ailleurs sur vos bancs.

Je n'aime pas ce climat. Pour ce que nous représentons ici, pour ce que nous voulons pour l'école, la précision intellectuelle, le respect de l'autre, toutes ces valeurs contenues dans l'article, c'est désolant.

Que veut-on dire en parlant de genre ? C'est qu'une différence biologique, physiologique, que personne ne va contester, entre les hommes et les femmes ne peut pas servir de justification à un certain nombre d'inégalités, dans l'orientation scolaire, par exemple, qui relèvent de constructions historiques et culturelles.

C'est une évidence, et, d'ailleurs, tout le progrès de notre civilisation depuis vingt siècles, comme la théorie scolaire, ont permis de bien montrer que les différences entre les uns et les autres, comme la capacité de réussir en mathématiques, relevaient non pas de différences biologiques mais de cette éducabilité du genre humain dont on vient de parler, et d'une universelle nature.

Il est assez déplorable, et cela nous ramène des siècles en arrière, que nous en revenions à cette discussion, alors même que nous avons précisé qu'aucun de nous ne niait ou ne souhaitait nier la différenciation sexuelle entre les hommes et les femmes.

Nous restons sur la position du Sénat, mais c'est la mission de l'éducation nationale de lutter, dans l'intérêt même de notre pays, contre un certain nombre de stéréotypes, y compris de genre au sens fille-garçon, qui font par exemple que notre pays a des résultats excellents pour les filles en terminale et au baccalauréat scientifiques, et en même temps un déficit en femmes ingénieurs considérable par rapport à nos voisins européens. Au point que de grands chefs d'entreprise français viennent me dire que, pour recruter dans l'informatique, à Grenoble ou ailleurs, des cadres supérieurs et des ingénieurs, ils vont maintenant les chercher en Espagne, qui a réussi à former plus de femmes ingénieurs que nous. Nous avons la responsabilité, dans les orientations, dans le travail scolaire, de lutter très activement pour l'égalité entre les filles et les garçons. Ce sera l'une des actions de ce ministère ; elle est engagée et sera conduite avec résolution.

Second point : la lutte contre les discriminations. Je vais poursuivre et amplifier le travail accompli par mon prédécesseur contre le harcèlement. Vous avez reçu et auditionné M. Debarbieux. La question du harcèlement, qui repose presque toujours sur des discriminations, est prégnante dans notre école. Cela concerne aussi la lutte contre l'homophobie, car il y a beaucoup de souffrance chez de nombreux jeunes gens et jeunes filles, à des âges particulièrement fragiles, au moment où ils se construisent et où ils découvrent une orientation sexuelle difficile pour eux et, souvent, pour leurs proches ; ils doivent être aidés, encouragés, et non stigmatisés.

J'ai bien vu quelle était la nature du débat que certains souhaitaient ; je le déplore, par respect pour tous. Il a toujours été clair, et je vous l'ai dit, que je n'ai jamais – comment pourrait-on le faire ? – nié cette différenciation biologique ou physiologique, mais je pense qu'il est de notre responsabilité d'enseigner à chacun que les différences sociales ne reposent pas sur des différences biologiques, et de faire que l'école, qui porte cette philosophie, lutte contre toutes les discriminations, pour l'égalité filles-garçons, contre l'homophobie.

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