Voilà pour le contexte, assez décevant. Quant au texte, il présente un mérite principal mais quatre défauts majeurs.
Son mérite est de renforcer enfin les pouvoirs de contrôle de l'instance chargée d'assurer la transparence de la vie publique. La Haute autorité doit disposer de pouvoirs réels et de vrais moyens d'investigation, notamment en liaison avec l'administration fiscale, afin de contrôler efficacement les déclarations de patrimoine et d'intérêts. Elle doit pouvoir enquêter et inspecter afin d'établir la vérité et transmettre au parquet, pour sanctions pénales, le dossier de ceux qui dissimuleraient cette vérité.
Pour l'exercice légitime de tels pouvoirs, la composition de la Haute autorité initialement prévue laissait à désirer. L'instance aurait compté seulement sept membres, un président et six magistrats du Conseil d'État, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, élus par leurs pairs. Le Parlement, pour sa part, n'aurait eu nullement à intervenir dans la désignation du président et des six autres membres.
Opportunément, un amendement à l'article 12 a ajouté à cette liste quatre personnalités qualifiées, deux nommées par le président de l'Assemblée nationale et deux autres par le président du Sénat, « après avis conforme de la commission permanente chargée des lois constitutionnelles, rendu à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ».
Quant au président de la Haute autorité, le texte initial prévoyait simplement qu'il était « nommé par décret du Président de la République », sans que les commissions parlementaires concernées soient consultées. Cela marquait un étrange recul par rapport à l'alinéa 5 de l'article 13 de la Constitution, résultant de la révision de 2008, et à la loi organique du 23 juillet 2010 relative à son application.
En vertu de ces textes, pour les fonctions les plus importantes, la nomination par le Président de la République s'exerce après avis public des commissions parlementaires compétentes et ne peut aboutir si les votes négatifs représentent au moins trois cinquièmes des suffrages.
La loi organique de 2010 énumère plus de 50 organismes dont la nomination des dirigeants nécessite obligatoirement la consultation des commissions parlementaires, parmi lesquels la Française des jeux, Météo-France, la Compagnie nationale du Rhône ou l'Office national des forêts.
À la différence de ces organismes – dont l'importance pour l'appareil d'État n'apparaît pas majeure –, la Haute autorité de la transparence de la vie publique n'avait pas l'honneur de figurer sur cette liste, ce qui semblait traduire un déficit initial de considération de la part du gouvernement. Cette situation a été corrigée par un amendement à l'article 4, qui ajoute la Haute autorité à ce tableau. Toutefois, cette correction n'est que partiellement satisfaisante.
Le système de veto – trois cinquièmes de votes négatifs –, prévu par l'alinéa 5 de l'article 13, est en effet imparfait. Pour assurer le choix d'une personnalité incontestable, située au-dessus des clivages partisans, il vaudrait mieux prévoir trois cinquièmes de votes positifs.