Intervention de Sylvia Pinel

Séance en hémicycle du 27 juin 2013 à 9h30
Consommation — Après l'article 4, amendement 334

Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme :

M. le rapporteur vient de répondre en partie aux interrogations des uns et des autres.

Monsieur le député Thévenoud, votre objectif est d'informer autant que possible le consommateur et je ne peux que vous rejoindre sur ce point. Votre proposition a été longuement débattue dans le cadre du comité de filière pour la restauration que j'ai lancé à l'issue du bilan du contrat d'avenir. Cela fait plus d'un an que nous travaillons avec les professionnels. À cette occasion, ils nous ont fait part des difficultés d'application de votre amendement, qui pose en outre un problème de lisibilité pour le consommateur. Je ne suis pas sûre que les visiteurs étrangers puissent comprendre autant d'informations mentionnées sur la carte, autant de signes sur une carte. Le dispositif que vous proposez est intéressant dans son objectif, mais il ne me paraît pas aujourd'hui possible de le retenir dans la mesure où la proposition du Gouvernement permet d'ores et déjà de répondre à votre préoccupation.

J'ajoute que la modernisation du titre de maître-restaurateur permet doublement de satisfaire votre amendement, notamment en termes de qualité.

Si ce titre n'a pas connu le succès escompté, madame Got, c'est qu'il reposait sur des critères très nombreux et qu'il supposait de remplir un dossier assez rébarbatif, notamment pour les très petites entreprises.

Dans le cadre du comité de filière, nous avons donc travaillé avec les professionnels pour apporter des améliorations à son cahier des charges. Lundi dernier, j'ai proposé à la filière, aux organisations professionnelles, aux syndicats de salariés, aux réseaux consulaires des simplifications de ses critères. Vous parliez de la qualité, de la formation, du personnel, autant de critères qui seront pris en compte. Nous allons également réduire le nombre imposé d'entrées, de plats et de desserts : il passera de quatre à trois, ce qui conduira à un renouvellement plus régulier de la carte et garantira une bonne utilisation des produits de saison. Nous procéderons également à une simplification des critères relatifs à l'environnement et à l'aménagement des établissements, en particulier s'agissant des portemanteaux, élément qui ne me paraît pas fondamental.

Les aspects que vous avez évoqués sont donc pris en compte par la mention « fait maison » et par la rénovation du titre de maître-restaurateur.

Monsieur Fasquelle, vous considérez que l'instauration de la mention « fait maison » est une demi-mesure. Non ! Tout d'abord, c'est une mesure qui fait consensus au sein de la filière. Ensuite, c'est une avancée : pour la première fois, nous donnons une définition juridique au « fait maison » alors que jusqu'à présent, cette qualité relevait d'une jurisprudence qui n'était pas codifiée.

Pour ce qui concerne l'emploi et les retombées touristiques, je partage bien sûr vos objectifs. En revanche, je ne partage pas votre volonté de réserver l'appellation « restaurant » aux établissements qui élaborent leurs plats à partir de produits bruts. Tout d'abord, le titre de maître-restaurateur rend déjà possible une telle valorisation et je souhaite que les professionnels s'impliquent davantage dans ce dispositif. En outre, cela stigmatiserait les brasseries, les bistrots, les auberges, les relais qui peuvent eux aussi élaborer des plats « fait maison ». J'appelle aussi votre attention sur le fait que cette appellation serait en quelque sorte un mauvais signal pour ceux de nos concitoyens que leur pouvoir d'achat empêche de fréquenter certains établissements et qui ont quand même envie d'aller au restaurant. La transformation des produits bruts a bien évidemment un coût. C'est un aspect qui mérite d'être pris davantage en considération. Le Synhorcat, pendant les débats avec le comité de filière, a d'ailleurs insisté sur le fait qu'il faudrait mener une étude d'impact pour cerner en profondeur l'incidence du pouvoir d'achat.

Dans la situation économique actuelle, cela ne me paraît pas pertinent de dresser les professionnels les uns contre les autres. Nous devons essayer de tirer toute la filière vers le haut en incitant ses acteurs à valoriser davantage les produits et la qualité, à se former et à s'impliquer auprès des jeunes pour les attirer vers ces métiers. C'est cette démarche que nous avons suivie pendant nos travaux et je crois que nous avons bien avancé sur beaucoup de points.

S'agissant du titre d'« artisan-restaurateur », madame Got, sujet, qui je le sais, vous tient à coeur – nous en avons longuement discuté –, vous rejoignez une proposition du comité de filière. En tant que ministre de l'artisanat, j'apprécie tout particulièrement le terme d'« artisan ». Je vous rappelle toutefois que c'est une appellation protégée, qui renvoie à une activité et une qualification. Ce sera d'ailleurs l'un des axes de travail du futur projet de loi que je présenterai sur l'artisanat, le commerce et les petites entreprises que d'apporter des correctifs pour éviter certaines dérives qui se sont produites sous l'ancienne majorité.

Reste que cette proposition d'« artisan-restaurateur » n'a pas fait consensus au sein du comité de filière qui réunit l'ensemble des parties prenantes pour la bonne et simple raison qu'à l'heure où nous souhaitons instaurer davantage de simplification pour les entreprises, demander une double inscription entraînerait des doubles frais d'inscription auprès des chambres de métiers et de l'artisanat, des chambres de commerce et d'industrie. Autrement dit, cela ajouterait de la complexité pour les petites entreprises. En outre, ce dispositif serait difficile à mettre en oeuvre puisque certaines entreprises concernées dépassent les onze salariés. Par ailleurs, cette exigence de qualité peut être établie grâce à un label existant, que nous devons améliorer. C'est dans ce cadre que nous avons déposé cet amendement. Vos inquiétudes, madame Got, sont donc dissipées.

Nous avons travaillé avec les professionnels pendant plusieurs mois, je tiens à le dire. À l'issue du bilan du contrat d'avenir sur la TVA, nous avons décidé de mettre en place un comité de filière, qui a été un lieu de travail et d'échanges très constructif. Il s'est beaucoup consacré à la qualité et à l'information du consommateur et je suis heureuse de voir aujourd'hui que le Parlement s'intéresse à ces sujets. Mais il s'est aussi penché sur d'autres aspects – les conditions de travail, la lutte contre le travail illégal, la formation professionnelle, le développement de l'apprentissage – sur lesquels, je l'espère, nous aurons des débats dans le cadre de futurs projets de loi.

S'agissant du sous-amendement de la commission des affaires économiques, je dois vous dire que je n'en comprends pas la logique. Le restaurateur aura bien sûr tout intérêt à apposer la mention « fait maison » sur sa carte puisqu'elle est valorisante. Pourquoi n'indiquerait-il pas qu'il a lui-même transformé les produits ? Nous savons très bien que c'est un cercle vertueux qui va s'installer grâce à cette nouvelle possibilité. Je vois bien que vous espérez qu'en rendant cette mention obligatoire, davantage de restaurateurs se lanceront dans cette démarche et qu'ils le feront plus rapidement. Vous voulez les inciter à valoriser les produits frais, les produits régionaux dans leur travail, ce qui peut être une bonne chose.

Le Gouvernement s'en remettra à la sagesse de votre assemblée s'agissant de ce sous-amendement de la commission des affaires économiques et demandera le retrait des autres amendements.

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