Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 25 juin 2013 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

On parle beaucoup à la place des Français, au lieu de les écouter. Lorsque la question leur est posée de façon générale – êtes-vous pour ou contre une limitation du cumul des mandats ? –, 80 à 90 % d'entre eux répondent positivement. Mais si la question est formulée de façon plus précise, les réponses changent considérablement. Ainsi un sondage effectué il y a un mois par BVA proposait des questions plus concrètes : souhaitez-vous que votre député puisse rester maire ? Êtes-vous pour ou contre les députés-maires ? On constate alors que, si 55 % de nos compatriotes s'opposent au cumul, 44 % acceptent le cumul entre un mandat national et le mandat de leur maire.

Mais les Français s'expriment aussi et surtout à travers les élections ; lors de l'élection législative partielle de dimanche dernier, ils ont ainsi élu un nouveau député-maire, convaincus que son enracinement local en fera un député de terrain, au fait des réalités concrètes. Et si les Français ne voulaient plus de députés-maires, ils n'auraient pas réélu, aux dernières élections législatives, ceux d'entre nous qui exerçaient cette double fonction. Laissez-leur donc la liberté du choix, ne décidez pas à leur place. S'ils considèrent que cumuler les mandats conduit à devenir un mauvais député, un mauvais maire ou les deux à la fois, ils nous sanctionneront à l'élection suivante. Ils nous réélisent parce qu'ils estiment que nous faisons correctement notre travail ; le nier revient à ne plus croire dans la démocratie et dans l'élection.

En l'état, le projet de loi laisse perplexe. S'il est souhaitable de mieux réglementer le cumul, il faut aller au bout de la démarche. Comment justifier l'idée qu'un député puisse être conseiller général ou régional, mais non maire d'une petite commune ? Ces fonctions peuvent exiger plus de temps que le mandat de maire, surtout si l'on habite à l'autre bout de la région. Le texte souffre donc d'une inconséquence.

La question du fonctionnement de nos institutions dépasse les clivages politiques : maire d'arrondissement, M. Vaillant souhaite le rester, tout comme je souhaite rester maire. Ne faites pas disparaître les parlementaires de terrain, ne coupez pas ce lien entre les Français et leurs élus. Contrairement à ce que pensent nos concitoyens, la fin du cumul ne rendra pas leur député plus proche : avec les mesures qui viendront s'ajouter à celles-ci – diminution du nombre de députés et introduction de la proportionnelle –, ils ne le verront tout simplement plus !

On souhaite enfin, en amenant les députés à être présents à l'Assemblée à temps plein, renforcer le poids de celle-ci. Mais priver les députés et les sénateurs de leur ancrage local, en les empêchant d'être maires ou présidents de communautés d'agglomération, les rendra plus faibles que jamais face au pouvoir exécutif et aux partis politiques.

On aboutira donc, en tout point, au résultat inverse de celui qu'on recherche : on aura des députés moins proches des Français et une Assemblée nationale au poids amoindri.

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